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Presquevoix...

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7 décembre 2017

Le professeur et l'élève

Elle était au fond de la classe et bavardait avec sa voisine, sans prêter la moindre attention au cours. Le professeur s’est interrompu pour lui demander d’être attentive à l’exercice sur le livre. Elle a répondu.

-          J’ai pas de livre.

Patiemment, le professeur a rétorqué.

-          Très bien. Je le rétro projette et tu te mets au travail.

Une fois le livre rétro projeté, le professeur a remarqué qu’elle continuait ostensiblement à ne rien faire.

-          Tu te mets au travail maintenant ! lui a-t-il répété d’un ton sec.

-          Je peux pas voir, je suis hypermétrope.

Enervé, le professeur a répondu.

-          Toi, tu n’es pas hypermétrope, tu es simplement hyper casse-couilles.

A la fin du cours, l’élève s’est rendu chez le conseiller d’éducation et a demandé à faire un rapport sur le professeur. Une feuille lui a été donnée et elle a tranquillement rédigé son compte-rendu des faits…

5 décembre 2017

Rêve

20170606_114703Il suffit de peu pour rêver, surtout si on file la femme qu’on aime. La dernière fenêtre au deuxième étage, c’est là qu’elle habite. Que fait-elle ?

Il se prend un pêcheur qui jette ses filets ; le poisson, c’est elle, mais elle ne l’aime pas. Elle se refuse à lui. Il est obsédé par cette femme qui pourrait s’appeler Fantasme.

L’arbre tend ses branches vers la fenêtre. Aura-t-il le courage de monter et de frapper au carreau ? Mais si elle n’est pas seule ?

Soudain il entend qu'on l'appelle et il se retourne. Elle est là, souriante, accrochée au bras d’un homme qui fait deux têtes de plus qu’elle, et donc une de plus que lui. Il lui adresse un sourire crispé. Elle lui demande.

-          Bonjour, qu’est-ce que tu fais là ?

Son visage s’empourpre et il s’enferme dans une explication stupide.

-          Oh, j’allais voir une expo d’un photographe que personne ne connaît.

-          Tu veux monter prendre un thé ?

-          Non merci.

-          Je te présente Juan, mon amoureux.

Amoureux, comme ce mot peut-être douloureux. Il sourit mécaniquement à Juan, le chanceux, et préfère s’éloigner à grands pas sans même adresser un au revoir à celle qu’il adore en silence.

 

PS : photo prise à Paris non loin de St Germain des Prés.

3 décembre 2017

la part d'ombre

Le jour où je suis arrivé chez ce psychanalyste, choisi au hasard dans l’annuaire, en  disant « Je voudrais connaître ma part d’ombre » ; il a ri. Quand il s’est arrêté, il m’a regardé droit dans les yeux et m’a répondu.

-        Ça va vous coûter cher.

J’ai rétorqué.

-        Je suis prêt à payer le prix qu’il faudra.

Alors il a ajouté avec un petit rictus étrange.

-        Si ce n’était  qu’une question de prix… et il a laissé sa phrase en suspens.

Juste après, il m’a demandé de m’allonger. J’ai failli refuser, mais je ne pouvais plus reculer, j’aurais eu l’air ridicule. C’était il y a 20 ans.

Je crois que maintenant, j’ai compris pourquoi il riait.

1 décembre 2017

Le masque

20171117_113211L’homme avait soudain surgi du renfoncement de l’escalier, un masque de clown sur son visage.

-          Bouge pas ! Lui intima-t-il.

Elle obéit. Que voulait-il d’elle ? Elle ne mit pas longtemps à le savoir.

-          Ouvre ta porte !

Il la poussa à l’intérieur.

-          Pourquoi ? osa-t-elle.

-          Ta gueule ! Fais-moi à bouffer !

Elle lui réchauffa du  bœuf bourguignon et le mit sur la table où elle avait placé une assiette, des couverts et un verre.

-          Vous n’allez tout de même pas manger avec votre masque ? se risqua-t-elle.

-          Qu’est-ce que ça peut te foutre, geula-t-il.

Quand il retira son masque de clown, elle hurla.

-          C'est toi ? Mais tu es complètement cinglé !

-          Ben oui, c'est moi, et alors ? Après un an de vie commune, tu m’as fichu à la porte, et jamais une seule fois, pendant ces douze mois, tu n'as accepté de me faire à manger. Il fallait bien prendre les grands moyens !

 

PS : photo prise à Paris, au marché St Pierre.

 

29 novembre 2017

Le général

Le général était un pisse-froid, sec comme une trique. On ne connaissait aucune faille au général, le général était un roc. Debout à cinq heures, exercices de 5 heures à 5 heures 25, douche froide à 5 h 30 déjeuner à 5 h 45, départ pour le quartier général à 6 h,  arrivée à 6 h 15... une partition réglée à la seconde près. Pas de place pour l’imprévu, une hygiène de vie méticuleuse, un corps d’armée qui lui obéissait au doigt et à l’œil et, pour toutes distractions, des parades militaires et des cérémonies de décoration. Le général était le genre d’homme dont on pouvait dire à voix basse, sur son passage : « Il ne rit que quand il se brûle.»

Le général était marié. Sa femme, Bernadette - 30 années d’active au service du général - avait déjà une belle carrière derrière elle ; il faut dire qu’elle avait été elle-même, fille de général. 

Le général était misogyne, personne  ne s’en étonnera. Il s’était marié par convenance, avait eu deux enfants réglementaires - un garçon et une fille – et  menait son « unité » familiale à la baguette. Il ne tolérait aucun manquement au règlement et ses sanctions étaient à la mesure de ses exigences. Son fils faisait une brillante carrière dans la cavalerie, quant à sa fille, il ne la voyait plus, pour incompatibilité d’humeur.

En 30 ans,  Le général n’avait jamais ri ; lâcher prise n’était pas dans ses habitudes.

Quand sa femme avait voulu passer son permis de conduire, à 50 ans, le général avait simplement dit, d’un ton qui ne souffrait aucune réplique : «  Bernadette, une femme de général ne conduit pas, elle se fait conduire ! ». Mais sa femme tint bon.

60 leçons de conduite plus tard, Bernadette échoua à son examen. Ce fut un drame. Quand elle l’annonça au général, il eut un « rictus » qu’elle prit – peut-être n’eut-elle pas tort -  pour un sourire. Ce fut la seule et l’unique décontraction de la mâchoire inférieure qu’elle lui eut jamais connue en 30 ans de mariage et elle en fut blessée.

A partir de ce jour-là, la vie de famille du général devint une véritable guerre de tranchée…

27 novembre 2017

Idées

20160227_124248Il lui avait dit.

-          Tu connais ma maxime, non ?

Elle avait répondu, telle une élève connaissant bien sa leçon.

-          Oui, pas d’idéaux, juste des idées hautes.

L"’élève" avait 45 ans et le professeur 55. Cela faisait 20 ans qu’ils étaient mariés et elle se lassait des maximes pontifiantes de son professeur de mari.

Elle savait que son humour ravissait ses étudiantes et que plus d'une avait cédé à ses avances avant d’achever son mémoire de maîtrise.

Avec le temps, elle se rendait compte que sa culture tenait plus du vernis que d’un savoir construit et nourri. Et elle lui en voulait de lui retirer la seule chose  qui aurait pu la satisfaire, au profit de jeunes femmes dont la candeur et le charme comblaient sa vitalité sexuelle.

Ce jour-là, elle ajouta malgré tout.

-          Et tu connais ma maxime, à moi ?

-          Ta maxime ? Mais tu n’en as pas !

-          Pourtant si, j’en ai une maintenant, et la voici : «  Se faire une haute idée de soi-même est le reflet d’un vide profond. »

-          Que veux-tu dire par là ?

-          Rien, bien sûr, rien.

Et ils continuèrent leur promenade sur le front de mer comme si de rien n’était.

 

PS : photo prise à Deauville.

25 novembre 2017

85 ans

Pour les 85 ans de sa femme, il avait fait un salto arrière - involontaire - sur les cinq dernières marches de l'escalier de la cave. Au service des urgences le verdict était tombé :  une vertèbre lombaire fracturée !

Pour elle, donc, l’obligation  de s’occuper de lui pendant au moins deux mois. Joyeux anniversaire !

23 novembre 2017

Libération

20171024_215111Éléonore avait été mise sous cloche depuis son mariage avec Henri de la Narcissière. Pauvre enfant,  jamais elle n’aurait dû consentir à épouser cet homme qui n’avait pour tout horizon que la classe  sociale dont il s’enorgueillissait : la noblesse.

 Éléonore était l’épouse d’un comte qui ne se souciait d’elle qu’au moment de la « copulation ». Oui, je sais, ce terme vous surprendra - et peut-être même vous choquera-t-il - mais comment appeler autrement cet acte  auquel il la soumettait et qui lui avait déjà donné deux ravissants enfants qu’elle disait aimer.

Je ne résiste pas au plaisir de vous raconter comment elle se libéra de sa cage dorée. C’était un 23 novembre. L’employée de maison avait déposé sur la table de l’entrée le courrier du jour. Les enfants étaient à l’école et sa journée se déroulerait, pensait-elle, comme toutes les autres. Mais une enveloppe jaune attira son regard. Elle lui était adressée, chose rare.

Une fois l’enveloppe décachetée, elle découvrit un carton vert où il était écrit.

«  Chère Eléonore,

Prenez le train pour Fougères. Descendez et allez jusqu’au château. Aux portes du château, demandez Mélusine. C’est elle qui vous donnera la clef de votre cage et vous délivrera du tortionnaire que vous avez pour époux. Courage. 

Une amie qui vous connait de longue date. »

A 11 h00, Eléonore partait. Jamais on ne la revit. La clef que Mélusine lui avait donnée devait être la bonne...

 

PS : photo prise à Bruxelles. Modèle : Raphaëlle.

 

21 novembre 2017

Dialogue

-           Dis maman, quand on est mort, c’est pour combien de temps ?

-           Ben …

-           Alors ?

-           Toujours !

-           C’est quoi toujours ?

-           Je sais pas moi, toute la vie !

-           Oui mais quand on est mort, ça peut pas être pour toute la vie, puisqu’on est mort !

-           Ecoute, quand on est mort, on est mort, voilà, c’est fini, point barre !

-           Oui mais…

-           On verra ça plus tard, hein ? T’as vu l’heure qu’il est ? Et puis la mort, t’as toute la vie pour y penser, maintenant faut penser à aller au lit !

19 novembre 2017

Eclat

20160704_134857Ne lavez jamais vos rêves ou si vous les lavez, préférez un savon doux, à la lavande ou à la camomille. N’oubliez jamais que les lavages répétés, même à la main, risquent de donner aux couleurs originales des teintes que la mémoire ne  reconnaîtrait plus… et quand une mémoire se sent trahie, elle peut y perdre son âme.

 

PS : photo prise à Nancy, dans une boutique très particulière.

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