Eloge à la marche en ville.
Coincée entre la vitre et la paroi du bus d’un côté et quelques ados bruyants de l’autre, elle prend son mal en patience. Elle n’aime pas les transports publics, que ce soit le bus ou le métro. Elle l’a pris aujourd’hui car pour remonter chez elle, elle aurait dû se taper une marche de 40 min en montée continuelle et avec ses paquets, elle n’en a pas eu le courage mais elle regrette ce choix qui n’en était pas un!
Elle aime marcher dans la ville, croiser des maîtres avec
leurs chiens, des mamans avec poussette et bambins, des retraités en goguette,
des piétons comme elle, le nez en l’air et les pensées en vadrouille. Elle aime tester un nouveau chemin et prend un malin plaisir à lever les yeux pour
découvrir une façade qu’elle n’avait jamais remarquée. Elle aime entendre ses
talons marteler le sol même si elle jure parfois quand son pied se tord sur les
pavés des rues piétonnes.
Dans le bus, c’est le sourire en berne et les grimaces qui
prédominent, quand il ne faut pas en plus subir les conversations téléphoniques
intimes par le biais de ce fléau qu’on nomme téléphone portable. Et que dire de
la musique de mauvaise qualité que certains partagent avec tout le bus sans
qu’on leur ait demandé quoi que ce soit ! Quand il pleut, l’air est moite
et de la buée empêche de voir au dehors. Quand il fait chaud, c’est les odeurs
fortes qu’il faut partager. Quand c’est la fin des classes ou les heures de
pointe, c’est l’impression de se transformer en sardine coincée dans sa boîte
qui la fait suffoquer.
Elle pourrait faire comme ces personnes qui disparaissent
dans leur monde musical, écouteurs sur les oreilles et yeux dans le vague ou
lire un livre si intéressant qu’il la ferait partir dans un autre monde…mais
elle n’y arrive pas! Elle, ce qu’elle aime c’est partager un sourire ou un
regard, avoir l’impression de ne pas être seule au monde dans la foule, parler
de la pluie ou du beau temps. Quand elle est dans le bus, elle cherche parfois
un regard, esquisse un sourire mais c’est à croire que les usagers ne font que
regarder leurs pieds ou le lointain, passant à travers elle comme à travers une
vitre.
Ouf ! Elle sort enfin et se retrouve à l’air libre sur le trottoir. Elle respire et sent son corps se détendre, sa tête se libérer, ses pensées s’envoler vers des idées plus sympas. Clac-clac font ses pas sur le macadam et c’est accompagnée de ce rythme qu’elle fredonne un air qui la fait avancer en cadence. Oui, définitivement, elle aime la marche en ville.