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Presquevoix...
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23 avril 2008

Tu sens comme ma mère

« J’aime pas ton odeur, tu sens comme ma mère. » C’est tout ce qu’il lui avait dit, mais avec ses yeux des mauvais jours. Elle avait vainement essayé de lui répondre que ce parfum, elle venait de l’acheter, qu’il coûtait très cher, qu’elle l’aimait, mais il n’en démordit pas et répéta buté « J’aime pas ton odeur, tu sens comme ma mère.»
Elle préféra ne rien ajouter et se dirigea lentement vers la salle de bain, le flacon à la main. Elle ferma la porte à clef et vida l’eau de parfum dans le lavabo tout en la regardant, pensive, s’écouler le long des parois blanches. Quand elle eut fini, elle sortit et  lui dit juste « Voilà, c’est fait ! »
Il lui répondit gravement, comme si cette odeur pouvait briser leur union « Très bien, maintenant nous allons recommencer sur de bonnes bases. »
Depuis ce jour-là, elle se rendit compte  que quelque chose avait changé.

22 avril 2008

Maupassant ou la magie de la nouvelle

En ce moment je grappille les contes et nouvelles de Maupassant, dans la collection La Pléiade.  Je les lis au hasard des titres. Il suffit qu’un titre me plaise, pour que je commence une nouvelle, mais si les premiers paragraphes me déplaisent, je l’arrête : je ne m’interdis rien !

L’ extrait qui suit a été lu dans une nouvelle intitulée « Rêves » :

«  L’homme, dit-il, qui découvrirait un vice nouveau, et l’offrirait à ses semblables, dût-il abréger de moitié leur vie, rendrait un plus grand service à l’humanité que celui qui trouverait le moyen d’assurer l’éternelle santé et l’éternelle jeunesse. »

Celui-ci, a été lu dans la nouvelle « Confessions d’une femme » :

« On sentait que cette tête-là était close, qu’il n’y circulait point d’idées, de ces idées qui renouvellent et assainissent un esprit comme le vent qui passe en une maison dont on ouvre portes et fenêtres. »

Et cet autre, dans  « Un coq chanta » :

« On sentait traîner dans l’air des odeurs de terre humide, de terre dévêtue, comme on sent une odeur de chair nue quand tombe, après le bal, la robe d’une femme. »

Férocité, misogynie, passion, vice, vertu, humiliation, revanche sociale, pouvoir… On frémit, on sourit et on s’incline devant cette plume qui domine l’art de la chute.

21 avril 2008

Comment rompre?

Rompre avec l’être qu’on a aimé mais qu’on n’aime plus n’est jamais simple, facile ni agréable. Au moment clé, il faut affronter les larmes, les supplications, la colère, la vengeance sans compter qu’on passe un mauvais moment avant (comment je vais faire), pendant (c’est moins facile que prévu) et après (le remord et le soulagement mélangé, affreux cocktails).

Pour les timides, les « je-m’en-foutiste », les « sans-cœurs », les « j’veux-pas-vivre-ça », les veules, les lâches et les faibles, une nouvelle ère est née grâce à internet et aux services d’alibi-béton.com, le moyen le plus sûr de se débarrasser de cette corvée et la refiler à un intermédiaire payant ! Au choix : le courriel, la lettre, le téléphone et même le face à face.

Au fait, pour le face à face, faudra-il payer un supplément pour la gifle que ce professionnel ne manquera pas de recevoir à notre place ?

www.alibi-beton.com/rompre

21 avril 2008

Vous avez une vie de merde ? Faites-le savoir !

Vous voulez hurler votre tristesse, votre solitude, votre colère contre vous, vos parents, votre conjoint(e), vos enfants, votre patron, votre amant, votre maîtresse, votre voisin(e), ceux qui nous gouvernent, le monde… ? Faites-le sur le site : www.uneviedemerde.fr
Je vous livre quelques perles savoureuses du site. Je sens qu’elles irriteront ceux qui veulent toujours savoir si l’histoire racontée est vraie ou fausse ! Il faut sans doute juste prendre ces micro-histoires pour ce qu’elle sont… des histoires racontées par des hommes et des femmes qui ont sans doute effacé les frontières entre le mensonge et la vérité !

« Aujourd’hui, j’ai mis un porte jarretelle et des bas résilles ; il m’a dit que je ressemblais à un rôti de porc ficelé »
ou
"Aujourd'hui, j'essayais de joindre mon chef sur son téléphone. Au bout de 5 sonneries je dis: "Mais il va répondre cet enculé ?!" A ce moment-là, j'entends : "L'enculé vous écoute..."
ou
« Aujourd'hui, j'ai reçu ma copine par la poste. Il me reste plus qu'à la gonfler ! »
ou
"Aujourd'hui, la prof d'anglais nous a demandé en cours ce que voulait dire "swallow", je réponds "avaler" et c'est là qu'elle sort devant tous les étudiants : "Eh bien vous voyez que ça sert les films de cul"...
ou
« Aujourd'hui, ma fille de 9 ans que j'élève seule devait faire une rédaction sur la personne de sa famille qu'elle admire le plus. Elle a eu 9/10 en composant un texte très émouvant sur Skippy, son cochon d'Inde... »

20 avril 2008

Merde à l’amour !

jardinPlantes1Elle en avait marre de l'amour galvaudé, marre de ces « Je t’ai-ai-ai-me » vides de sens bêlés au quotidien, dans les chansons,  les feuilletons, les romans,  les films et les pubs. Merde à l’amour avait-elle envie de dire. Tiens, un jour elle sortirait avec une banderole où elle  écrirait «  Merde à l’amour !  », et elle défilerait dans les rues, toute seule. Peut-être que d’autres la rejoindraient et que ça deviendrait une vraie manifestation avec des gens  qui pensaient comme elle.
A chaque fois qu’elle avait rencontré un homme, elle avait toujours eu envie de lui dire ce qu'elle pensait de l'amour mais, par crainte de ne pas être comprise,  elle était restée silencieuse. Et puis, au bout de quelques jours, quelques semaines ou quelques mois, la relation mourait d’épuisement comme une fleur gorgée d’eau !
Quand elle rencontra le huitième homme de sa vie, forte de son expérience, elle se décida de lui dire « sa vérité ». Ils étaient allongés sur la pelouse et il lui passait la main dans ses cheveux, quand soudain elle lui annonça : « Aime-moi comme je ne suis pas et je t’aimerai comme tu n’es pas.* » Il arrêta instantanément le mouvement de va et vient de sa main dans ses cheveux, se redressa et lui rétorqua furieux.

- Putain, tu es complètement givrée ou quoi !
Elle s’attendait à une réaction de sa part, mais pas celle-là, pas cette profonde remise en cause d’elle-même. Comment pouvait-il penser qu’elle disait n’importe quoi ? Mais elle ne souhaitait pas discuter avec lui. Si elle l’avait un jour trouvé intelligent, elle avait eu tort ! Certes, il faisait bien l’amour, mais il n’était pas le seul  et ce n’était  pas ça qui la retiendrait. Elle lui répondit sèchement.
- Je ne sais pas si je suis givrée, mais toi, tu es con  ! Tu  me fais gerber ! Se leurrer ça évite de penser, c'est ça ? 
Et elle partit en courant sur l’herbe qui faisait déraper ses chaussures aux semelles lisses…

* phrase que j’avais écrite en commentaire suite à  une citation vue sur le blog : la colline aux cigales.

* Photo vue sur le site : http://caensortir.com

19 avril 2008

« Ma chérie » ou dialogue à peine fictif

- Je crois que tu es « une salope ».
- Une salope ? Moi ? Mais pourquoi ? Qu’est-ce que je t'ai fait ?
- N’en parlons plus… je disais ça comme ça.
- Ah… mais quand même, tu ne crois pas que c’est bizarre de me dire ça, comme ça, après un verre de vin, entre le fromage et le dessert ?
- N’y pensons plus, tiens, passe-moi plutôt  le fromage ma chérie.
- Ne me dis pas « ma chérie », dis-moi plutôt « ma salope » !

18 avril 2008

C'est pas beau une ride?

Elle lit et relit la lettre, les mots elle commence à les connaître par cœur, c’est d’ailleurs toujours les mêmes phrases mais cette fois, elle en attendait d’autres.

Elle se souvient de l’entretien. Elle avait, du moins le croyait-elle, trouvé les bons arguments, contourné les obstacles, répondu en arrivant à positiver même ses points faibles, déjoué les pièges tendus. Elle s’était entrainée avec Sylvie, avait soigné sa présentation, bref il lui avait semblé que tout était fait pour que ça marche. Quand elle était ressortie de l’entretien, l’impression était positive, les sourires francs, la poignée de main ferme et le responsable RH l’avait même raccompagnée jusqu’à la porte.

Alors pourquoi cette réponse négative ? Et sans explications autres que les banalités d’usage. Elle en pleurerait de rage si ses larmes n’avaient pas été taries depuis tous ces mois qu’elle recevait ces réponses négatives. Elle en a marre de ne pas convenir, si au moins elle savait pourquoi, si au moins les gens avaient le courage de leurs opinions. Elle a bien sa petite idée…Elle est trop vieille, elle le sait. Elle est trop chère, son expérience ne servirait donc à rien. Le constat est là et il est terrible.

Sans cette problématique d’emploi, elle serait heureuse car elle n’a jamais été si bien dans sa peau. La femme mûre, dans toute sa splendeur, c’est elle, ou du moins cela le serait sans cette chaîne qu’elle traine comme un boulet qui lui bouffe la vie. Merde ! Pourquoi les rides font-elles peur à des employeurs potentiels ? C’est pas beau une ride, comme un petit sourire du coin de l’œil ?

18 avril 2008

Le café du Cora

Voilà quatre matins que mon mari et moi allons prendre notre café au « café du Cora ». On connaît déjà les habitués en quatre jours. Eux aussi nous connaissent, mais moins, forcément : nous les observons plus qu’ils ne nous observent ; un journal est un bon paravent. J’ai  surtout remarqué Daniel – c’est comme ça que les autres l’appellent – un grand échalas de deux mètres au moins, à la veste jaune et à la démarche inclinée ; il ressemble à M. Hulot. Un habitué du demi de rosé de 1O heures 15. Daniel est bavard, très  bavard, il faut dire qu’il répète la même chose trois fois de suite -  avec quelques motifs différents d’une fois sur l’autre -  alors bien sûr, ça rallonge chacune de ses interventions. Au programme des "cénacles matinaux" auxquels Daniel participe, il y a la lecture des faits divers du Parisien et leur analyse. Et puis, au bout d’une demi-heure, le rosé avalé, l’œil brillant et la curiosité rassasiée,  Daniel part. Il va travailler, si j'en crois sa tenue...

17 avril 2008

Ils ne parlent pas le même langage

- Voilà, je pars.
- Tu vas où ?
- Je pars, je te quitte.
- Comment ça, tu me quittes ? Tu sors ?
- Non, je te quitte, je m’en vais, je pars, je ne reviens plus.
Mario se lève, il n’a toujours pas l’air de saisir la situation.
- Tu vas où ?
Elle soupire.
- Tu te répètes mais bon, c’est peut-être difficile à comprendre. Je pars vivre chez une copine en attendant de trouver un appartement. Je ne veux plus vivre avec toi, j’en ai marre de toi, de tes absences, de tes silences, de cette vie de vieux qu’on mène, des soirées devant la TV à t’écouter ronfler et de tes beuveries avec tes copains tous les vendredis soirs parce que c’est une coutume et que les filles ne sont pas acceptées. Je suis jeune, je veux profiter de la vie, trouver un compagnon avec qui découvrir le monde, avec qui visiter la ville, avec qui marcher le nez au vent, avec qui partager des envies de livres, de films, de petits restos sympas, de…
- Oh ! stop, ça va, tu pouvais pas le dire avant que t’étais pas contente de notre vie ? T’es pas fine de me dire ça juste avant de te tirer.
- Mais cela fait des mois que j’essaie de dialoguer, de te parler de mon mal-être mais toi tu n’écoutes pas, tu n’écoutes rien, tu as toujours quelque chose à faire de plus important que m’écouter. Je suis fatiguée de te courir après alors que tu n’en as rien à foutre.
- Mais tu le savais que j’avais un boulot exigeant, tu le savais que je travaillais dur pour avoir ma promotion, il te suffisait d’être encore un peu patiente et on aurait pu changer d’appartement, en louer un plus grand et avoir une vie plus confortable.
- Et à quoi ça sert d’avoir plus de fric si on n’a plus rien à se dire ? Ce n’est pas de l’argent que je veux, c’est de la tendresse, de l’amour, du partage, de la connivence, des câlins…
Elle se met à pleurer. Il reste là sans comprendre. Ils ne parlent pas le même langage. Elle renifle, le regarde encore une fois, espère elle ne sait quoi puis saisit sa valise, tourne les talons et disparaît. Il ne fait pas un geste, il reste les bras ballants le long du corps, il cherche ce qu’il a fait de faux.

17 avril 2008

La retrouvée

Quand elle le vit se précipiter sur elle, elle eut un moment de recul, voulut l’éviter, mais il s’accrocha à son bras et la retint, haletant…
- Ne pars pas, ne pars pas, tu ne te souviens pas de moi ?
Elle essaya de lui dire qu’elle ne le connaissait pas – ce qui était vrai – qu’elle n’habitait pas à Rouen – ce qui était vrai – qu’elle n’avait pas fait d’études de droit – ce qui était vrai - et qu’elle ne s’appelait pas Marie – ce qui était faux. Peut-être flaira-t-il le mensonge parce qu’il lui dit très haut, presque exalté
- Jure-moi que tu ne t’appelles pas Marie !

Cela lui était difficile de jurer que son prénom n’était pas le sien, aussi tenta-t-elle d’éluder la demande, mais il ne lâcha pas prise. Il voulut l’inviter au café pour parler d’elle, d’eux, de ce qu’ils avaient vécu pendant ces 15 ans où ils avaient été séparés. Elle lui répondait qu’il se trompait, qu’elle n’était pas celle qu’il croyait, mais rien n’y fit. De guerre lasse, elle l’accompagna et ils se retrouvèrent face à face au café de la Gare, à une table  non loin d’une fenêtre. Profitant d’un moment d’inattention de sa part il emprisonna sa main droite qui était restée posée sur la table et il commença une déclaration enflammée à laquelle elle dut couper court.
- Je ne suis pas celle que vous croyez, tout ceci est ridicule ! Je suis une autre, je ne vais pas faire semblant d’être quelqu’un d’autre pour vous faire plaisir. Et si vous me montriez la photo de cette Marie dont vous me parlez depuis tout à  l’heure !

Il prit son portefeuille, sembla trier quelques papiers, puis sortit triomphalement une photo qu’il plaça devant elle
- Voilà. Maintenant tu ne peux pas me dire que ce n’est pas toi !
Elle prit la photo, la regarda attentivement et il lui fallut se rendre à l’évidence : c’était elle, 15 ans plus tôt, devant la gare, habillée d’un pantalon blanc et d’un pull-over noir. Elle ne se souvenait ni de la photo, ni de celui qui l’avait prise, mais c’était bien elle et elle souriait radieuse à celui qui la photographiait. Elle regarda l’homme avec plus attention,  où avait-il bien pu se procurer cette photo ?
- Alors ? Demanda-t-il ?
- Je ne sais pas quoi vous dire !
- C’est toi oui ou non ?
- Je ne sais pas, fut la seule chose qu’elle put dire.
- Ne me dis pas que ce n’est pas toi !
- Oui, c’est moi et ce n’est pas moi ! Concéda-t-elle.
Elle regarda à nouveau la photo, puis l’homme et …  peut-être que…elle le fixa à nouveau, et elle n’eut plus aucun doute, c’était lui.

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