Ils ne parlent pas le même langage
- Voilà, je pars.
- Tu vas où ?
- Je pars, je te quitte.
- Comment ça, tu me
quittes ? Tu sors ?
- Non, je te quitte, je m’en
vais, je pars, je ne reviens plus.
Mario se lève, il n’a toujours
pas l’air de saisir la situation.
- Tu vas où ?
Elle soupire.
- Tu te répètes mais bon, c’est
peut-être difficile à comprendre. Je pars vivre chez une copine en attendant de
trouver un appartement. Je ne veux plus vivre avec toi, j’en ai marre de toi,
de tes absences, de tes silences, de cette vie de vieux qu’on mène, des soirées
devant la TV à t’écouter ronfler et de tes beuveries avec tes copains tous les
vendredis soirs parce que c’est une coutume et que les filles ne sont pas acceptées.
Je suis jeune, je veux profiter de la vie, trouver un compagnon avec qui
découvrir le monde, avec qui visiter la ville, avec qui marcher le nez au vent,
avec qui partager des envies de livres, de films, de petits restos sympas, de…
- Oh ! stop, ça va, tu pouvais
pas le dire avant que t’étais pas contente de notre vie ? T’es pas fine de
me dire ça juste avant de te tirer.
- Mais cela fait des mois que
j’essaie de dialoguer, de te parler de mon mal-être mais toi tu n’écoutes pas,
tu n’écoutes rien, tu as toujours quelque chose à faire de plus important que
m’écouter. Je suis fatiguée de te courir après alors que tu n’en as rien à
foutre.
- Mais tu le savais que j’avais
un boulot exigeant, tu le savais que je travaillais dur pour avoir ma
promotion, il te suffisait d’être encore un peu patiente et on aurait pu
changer d’appartement, en louer un plus grand et avoir une vie plus
confortable.
- Et à quoi ça sert d’avoir plus
de fric si on n’a plus rien à se dire ? Ce n’est pas de l’argent que je
veux, c’est de la tendresse, de l’amour, du partage, de la connivence, des
câlins…
Elle se met à pleurer. Il reste
là sans comprendre. Ils ne parlent pas le même langage. Elle renifle, le
regarde encore une fois, espère elle ne sait quoi puis saisit sa valise, tourne
les talons et disparaît. Il ne fait pas un geste, il reste les bras ballants le
long du corps, il cherche ce qu’il a fait de faux.