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30 novembre 2020

Le masque rouge

Dans l’immeuble, tout le monde en parlait et, confinement ou pas, tout le monde l’avait immédiatement su : elle s’était pendue avec un masque rouge.

« Un masque rouge ? » avait hurlé la voisine du deuxième étage en faisant vertige sur vertige et croyant que le COVID était entré en elle. Quant à la voisine du troisième, elle, elle se contentait de répéter en boucle « Ah mon Dieu » en enlevant son masque de son nez. Celles du premier et du cinquième, le masque sous le menton, pleuraient à chaudes larmes alors qu’elles lui disaient à peine bonjour de son vivant. Il faut dire qu’elle avait une drôle de vie. Tout le monde racontait qu’elle recevait des hommes ; nettement moins depuis le confinement, car certains s’étaient chargés d’avertir les autorités.

Oui, l’immeuble entrait dans une période dépressive – si l’on peut dire - et, seuls les enfants continuaient leur vie d’enfants comme si de rien n’était, car les enfants savent très bien vivre dans un autre monde …

 

PS : prochain texte jeudi prochain.

28 novembre 2020

Le Messie

Son amie lui avait posé une question étrange entre la poire et le fromage, et soudain, sa gorge s’était coincée.

-          Et si le virus profitait à un nouveau Messie ?

Après son café, elle avait prétexté des cours à préparer pour partir vite. Elle regrettait d’avoir rempli deux « fausses » attestations, à la main, pour aller chez elle. Ne devenait-elle pas folle ?

Le Messie, diantre, il ne manquerait plus que ça. Enfin, avec la police qui est la nôtre, il ne marcherait pas longtemps…

25 novembre 2020

Le CSF

Il était devenu membre d’honneur du CSF* pour avoir été l’un des plus célèbres utilisateurs de l’expression « Casse-toi pauv’ con ». Au CSF sont entrés un certain nombre de personnes de « haut vol ».

Cette « ONG » a plusieurs cordes à son arc et, comme le disait l’un de ses premiers membres, il n’y a pas de fatalité pour celui qui veut oser ; donc ses membres osent. L’un des derniers projets de cette ONG, presque confidentielle, est l’arc mondial des cons de bonne volonté, un arc qui rapportera gros, car ses membres osent voler très haut…

*cons sans frontières

 

PS : prochain texte samedi prochain

23 novembre 2020

La messe

En ce dimanche brumeux, les fidèles s’étaient réunis, gentiment vêtus de couleurs foncés, et manifestaient pacifiquement, la croix – discrète ou non - autour du cou, pour la reprise des messes en présentiel.

J’avais oublié que les familles catholiques pouvaient avoir autant d’enfants !

L’Avent arrivant, la soif de communion était encore plus vive, et cela se sentait dans cette petite foule.

Certains avaient des pancartes : « Il me manque un guide » ou « Nous voulons l’eucharistie » ou « prier chez soi ne suffit pas ». D’autres chantaient et d’autres encore avaient des slogans divers et variés, tous aussi catholiques les uns que les autres. Je me suis demandée, à un moment donné, si Dieu adhérait aux gilets jaunes car l’un des chants était celui-ci : « On est là, on est là, même si Macron ne veut pas nous on est là, pour l’honneur des catholiques et pour un monde christique, on est là pour toi mon Dieu nous on est là ». Certains n’ont pu s’empêcher de s’agenouiller, malgré le bitume humide et là, la police est intervenue…

 

20 novembre 2020

L’enterrement

Il était mort d’avoir eu peur. Triste destin. D’autant plus que ses funérailles eurent lieu dans la grisaille du Covid. Grand fut le vide ce jour-là, car ses amis ne se déplacèrent pas. Seuls sa femme et son fils étaient présents, mais l’un et l’autre ne se parlaient plus depuis longtemps.

Dans l’église, lorsque le curé eut fini son homélie, les pleurs de la mère entonnèrent un chant violent. Le curé trembla, sans parler du Christ qui tomba de sa croix.

Le fils, lui, avait l’habitude de ces débordements et il ne dit rien. Mais au cimetière, debout près de sa mère, il lui dit à l’oreille.

-          Je crois que père sera heureux, la mort parfois libère.

Sa mère le gifla et le curé fit semblant de ne rien voir, comme il l’avait fait tant et tant de fois avec tant de paroissiens, pardon oblige…

 

PS : prochain texte lundi prochain

 

18 novembre 2020

L’élève et le professeur

Il avait dit à son professeur, à la fin du cours.

-          J’ai trop de problèmes dans ma tête, même un prof de maths ne pourrait pas les résoudre

Et le professeur avait répondu.

-          Essaie d’abord de résoudre les équations, c’est beaucoup plus facile que de résoudre ses problèmes personnels. Moi, les miens, je t’avoue que je ne les ai pas encore tous résolus, et tu imagines l’âge que j’ai avec mes cheveux blancs, alors…

L’élève sourit, mais aussitôt il eut dans sa tête la maison familiale, son père, sa mère, son frère, les disputes, la peur, les silences. Il conclut tout de même.

-          Oui, vous avez raison, je vais essayer de résoudre les équations.

-          Voilà, parfait, répondit le professeur. Résoudre une équation du second degré, ça remet les neurones en place. C’est le professionnel qui te le dit.

Une fois l’élève parti, le professeur repensa avec émotion que oui, les mathématiques pouvaient sauver la vie, ou presque. Que serait-il devenu sans elles ?

 

PS : prochain texte, vendredi prochain.

16 novembre 2020

On line

Depuis qu’ils faisaient l’amour ensemble « on line », par ordinateurs interposés - lui dans sa chambre, elle dans la sienne - tout allait pour le mieux. Mais cela allait-il durer ?

 PS : prochain texte, mercredi prochain

12 novembre 2020

Du coup, pas de souci ?

Il lui avait dit que le totalitarisme sanitaire* menait le monde.

-          C’est simple, on nous drogue au confinement et on nous fait enduire notre corps de gel hydro alcoolique. Du coup, on masse nos cerveaux avec des émotions en médiatisant la pandémie et pas de souci, le mimétisme* part au galop. Du coup on fait déraper l’économie, la culture et l’éducation, et pas de souci le monde déraille* et seuls survivent les plus friqués.

Enervée par ses « du coup » et « pas de souci », je n’avais pas vraiment compris son discours. Il s’en est aperçu aussitôt et a ajouté.

-          Bon, tu ne me comprends pas ? Pas de souci, tu vas continuer à te droguer aux attestations de sortie et tu vas y perdre ta santé mentale, crois-moi !

-          Eh bien, euh... Bon, je vais réfléchir à tout ça. Allez, salut.

Deux jours plus tard, je lui ai téléphoné en lui disant.

-          J’ai réfléchi Victor. Ouais, tu as raison, la psychose nous tue. Du coup, il faut lutter contre la psychose, non ?

C’est après que je me suis rendue compte que le « du coup » était rentré dans mon cerveau, comme toutes ces attestations et tous ces protocoles sanitaires dont on nous abreuvait en faisant défiler au journal de vingt heures des hôpitaux asphyxiés par la covid 19 qui, elle, n’en demandait pas tant !

Soudain, cette question a envahi mon cerveau : Et si on cherchait à nous anesthésier ?

 

*mots lus dans le petit livre de B. Renaud Girard et J. L. Bonnany publié chez Tract : « Quand la psychose fait dérailler le monde », 3 euros 90 chez vos marchands de journaux

PS : prochain texte, lundi 16 novembre

 

9 novembre 2020

Le caveau

Dans la famille, elle avait été la seule enfant à être enterrée dans le caveau familial. Pourtant, quatre enfants étaient déjà morts. Il faut dire qu’il ne restait plus qu’une place dans ce caveau. Mais pourquoi elle et pas les autres ? Une injustice.

Qu’allait-il se passer dans ce lieu obscur entre elle et eux ? Avait-elle hurlé de rage dès son entrée sous terre ou avait-elle décidé de leur parler pour la première fois et de leur dire la souffrance qui avait été la sienne dans le monde des vivants ? Nul ne le savait, nul ne le saurait, et la vie continuerait dans la blancheur de son voile amnésique…

PS : prochain texte, jeudi 12 novembre.

7 novembre 2020

L’air

Elle lui avait dit qu’elle s’était reconnue dans le tableau. Combien de fois l’avait-elle répété ? Peut-être dix, et à la onzième il lui avait dit.

-          Bon, écoute, plutôt que de vivre dans des tableaux, joue à exister, et puis après, tu pourras mourir.

Là, elle l’avait traité de « salaud » avec la litanie habituelle qui commençait par : « C’est dur pour toi le respect des autres, hein ? »

Il avait aussitôt répondu.

-          Bon, encore le grand n’importe quoi au pays du grand nulle part ! Tu m’excuses, je pars. Je laisse la place à ton mari, et je le plains !

Après avoir fermé la porte de l’appartement de sa soeur, il pensa à son mari. Comment pouvait-il encore la supporter, lui qui avait l’air si « normal ». Mais sans doute ne se donnait-il qu’un air.

Et lui, finalement, de quoi avait-il l’air ? Il faudrait qu’il demande à sa femme…

 

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