Le restaurant
Lorsqu’Isabelle était gênée - et là, la situation qu’elle vivait confinait au ridicule - elle avait l’habitude de se passer sa langue sur ses lèvres, un geste parfois mal interprété. En face d’elle, dans un restaurant bon chic bon genre, un compagnon d’un soir - amoureux de lui-même - ne lui laissait pas placer un mot.
Enervée, elle essaya d’adopter une attitude naturelle. L’homme, lui, continuait à parler jusqu’à ce que surgît l’épineux problème de son épouse ; parce qu’il avait une femme aimante, bien sûr, douce, mais « pas assez sexuée », lui dit-il en fixant son regard sur ses seins généreux.
Isabelle détestait déplaire, mais ce presque inconnu n’était rien pour elle. N’écoutant que son intrépidité, elle le regarda dans les yeux et décida d’arrêter sa diarrhée verbale.
La dernière et presque seule réplique d’Isabelle au cours de ce dîner fut la suivante.
- Ecoutez, il faut que vous sachiez trois choses très importantes : d’abord, quand il n’y a pas de gêne, il n’y a pas de désir ; ensuite, si vous ne savez pas pourquoi votre femme se refuse, demandez-le lui car elle, elle saura pourquoi ; et, pour finir, rien ne sert de biaiser, il faut aimer à point. Voilà, bonne nuit monsieur et merci pour ce repas excellent que vous m’avez offert.
Son partenaire d’un soir l’observa rassembler ses affaires puis il lui lança, presque hystérique : « Salope… toutes des salopes ! »
PS : prochain texte, jeudi.