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Presquevoix...

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20 janvier 2009

La chevelure ( gballand )

Il ne pouvait jamais sortir sans avoir passé une demi-heure à coiffer ses cheveux noirs, c’était presque maladif. Tout devait être parfait, chaque cheveu devait trouver sa place. Il commençait par les démêler, puis il les peignait,  ensuite il les mouillait légèrement, il les repeignait, puis il les mouillait à nouveau… pour en arriver à l’étape finale : quelques légères touches de gel qui fixaient les trois ou quatre cheveux rebelles que le peigne n’avait pu dompter. Sa chevelure était sa fierté.

Son réveil sonnait chaque matin à 6 heures afin qu’il puisse partir au travail à 07 h 30 précises. Il se trouve que le 30 novembre, pour la première fois de sa courte vie – il n’avait que 30 ans - le réveil ne sonna pas. Il se leva en catastrophe à 07 h 20, passa 2 minutes dans la salle de bain, au lieu de la demi-heure habituelle, prit un café rapide et, au comble du désespoir, enfonça sur sa tête un bonnet bleu-marine qu’il ne quitta pas de la journée.

Ses collègues se montrèrent surpris mais ne firent aucun commentaire, son visage hostile les en dissuada. Seule Sandrine, une jeune stagiaire tenta une plaisanterie. Voyant qu’il ne réagissait pas, elle finit par toucher son bonnet en lui disant que ça portait certainement bonheur, comme le pompon des marins… bien mal lui en prit, il lui donna un coup de poing qui l’envoya rouler au sol, le nez en sang.
Depuis ce jour là, toutes ses nuits sont hantées par le même cauchemar : un visage tuméfié, toujours le même, qui se penche au-dessus de son lit, comme une mauvaise fée…

19 janvier 2009

Les Deschiens ont la fibre familiale

Ah, ce petit sketch ! Un bijou de savoir-vivre familial ! Une perle de culture d’anthropologie sociale  dont je ne me lasse pas. Comment ne pas être ému face à ce père et cette mère désespérés de constater que leur fils rejette la culture familiale ?
« Tu écoutes quand on essaie de t’éduquer ! » Dit la mère. 
Ah, l’éducation ! C’est l’unique question !

18 janvier 2009

Le voyage en stop ( gballand )

Je l’ai laissé réciter son catéchisme*, rien de tel pour mieux comprendre un type, mais quand même, pour qui il se prenait ce vieux con… 30 ans de plus que moi, une bedaine confortable, des joues qui s’affaissaient, un look de presque retraité et il se mettait à me susurrer des choses bizarres  et à me mettre sa main sur les genoux alors que j’étais dans sa voiture depuis à peine une demi-heure. « Connard ! » Ça c’est ce que j’ai pensé, mais je ne le lui ai pas dit …

- Vous êtes mariée ? Je lui ai demandé, l’air de rien, en lui enlevant sa main qui se faisait insistante.
- Oui… mais …
- Mais quoi… ?

Là j’étais sûre qu’il allait me débiter le chapelet habituel, que sa femme et lui faisaient chambre à part,  qu’il ne couchait plus avec elle qu’une fois par an, qu’elle ne l’attirait plus, qu’elle était frigide…

- Ma femme… a d’autres chats à fouetter  !

Si j’avais été franche, je lui aurai répondu que ça ne m’étonnait pas, mais je n’ai pas pu. Il avait l’air un peu perdu dans son costume sombre et, après tout, en deux ans de stop, c’était la première fois que j’entendais cet argument. Je pouvais lui accorder une petite grâce…

- Qu’est-ce qu’elle vous reproche  ?
- Ce que je suis.

Là il marquait un autre point. Sa main était revenue sur le volant et il regardait attentivement la route, perdu dans ce que j’imaginais être la grisaille de ses pensées. J’avais bien une question qui me titillait le bout de la langue, mais est-ce que j’allais pouvoir…

- Et vous ?
- Quoi, moi ?
- Vous l’aimez ?
- Je la hais !

Et au moment où il prononçait ces mots, il s’est tourné vers moi en ajoutant.

- Je hais toutes les femmes !

A ce moment, les choses auraient dû  me sembler claires, mais il a fallu que j’ajoute.

- Pourquoi m’avoir pris en stop alors, puisque je  suis une femme ?
- Pour me donner une raison supplémentaire de les haïr, a-t-il dit bizarrement.

Ce type était barge, c’était certain, et il cachait sa folie dans son costume sombre. J’ai compris que je devais me tirer de sa voiture le plus vite possible ou alors il pourrait m’arriver un gros problème…

- Vous avez peur ? Vous croyez peut-être que je vais vous violer ? me dit-il soudain.

Je suis restée silencieuse.

- Et puis vous tuer ensuite ?

Je ne pouvais pas le laisser raconter de telles conneries sans rien dire. Dans un souffle, je lui ai répondu.

- Vous me faites pas peur, c’est pas la première fois qu’on me raconte des salades quand je fais du stop !
- Je vais vous faire une confidence, me dit-il tout de go, j’allais me tuer !

Silence. J’ai eu dû mal à déglutir et je n’ai rien trouvé à lui répondre.

- Alors ? A-t-il repris presque provocateur.
- C’est votre vie après tout ! Et ça, je l'ai dit sans réfléchir ; maintenant, je regrette.

Il a fait le reste du voyage sans rien dire, les deux mains sur le volant. Il avait mis la radio qui gueulait des vieux tubes des années 70, et moi je regardais fixement le paysage qui défilait, pour ne pas croiser ses yeux. Avant l’entrée de la ville, il a freiné brusquement et m’a dit.

- Sortez !
- Vous voulez que je descende ici ?
- Oui, j’ai à faire.

Je suis descendue en articulant un « merci » et rien d’autre. Le lendemain j’ai acheté le journal local, une intuition, et il y était. Il ne faisait pas la une, mais la deuxième page. J’ai appris qu’il avait un garage, une femme et une fille de 23 ans. Le même âge que moi, ça m’a fait drôle. Maintenant, je ne peux pas l’oublier.

* citation extraite de l’été meurtrier  de Sébastien Japrisot

17 janvier 2009

Ma voisine et l’actualité des médias ( gballand )

Ma voisine a 80 ans et écoute la radio et la télévision du matin au soir ;  c’est mon baromètre médiatique ! Quand je  veux savoir ce qu’on attend que l’opinion publique française sache et pense, je vais chez elle. Depuis que je lui rends visite, je comprends à quel point nous ne sommes pas libres !

Comme le dirait  Anne Roumanoff : “ On ne nous dit pas tout ! ”

16 janvier 2009

Le dîner ( gballand )

20 heures, toujours rien ; les doigts du père pianotent sur la toile cirée ; regards, silences. La pintade arrive sur la table.

- J’ai préféré la pintade à la dinde, la viande est plus fine, dit ma mère pour faire diversion.

Mais elle, elle n'est toujours pas là. Qu’est-ce qu’elle fait ? Quand elle arrivera, elle dira sans doute que le bus a eu du retard ou qu'elle a rencontré quelqu'un. Moi, je sais que le « quelqu'un », c'est celui qui remplit son vide, celui qui lui dit qu'elle est plus belle qu'Isabelle Adjiani ; et elle le croit ! Que les filles sont connes !

Mais la voilà qui arrive et tout le monde fait semblant de rien. Elle s'installe à côté du père ; il ne la regarde même pas. Elle a les lèvres roses un peu fatiguées de celle qui a trop embrassé. Je suis sûr qu'elle a couché avec lui.

15 janvier 2009

Le miroir ( gballand )

A trop se regarder dans le miroir on finit par y voir le diable, mais Marc ne le savait pas*…
Quand il avait emménagé dans son nouvel appartement, il avait mis  des miroirs partout, non qu’il se trouvât beau, mais pour se surveiller. Depuis que Jeanne l’avait quitté il était devenu gros, triste et chauve ; c’était insupportable. Il comptait sur la thérapie des miroirs pour trouver la force de changer de corps.

Pour remplacer Jeanne, Marc avait pris un chien, un bâtard, le plus laid, exprès. Un chien ne remplace jamais tout à fait une femme, mais il avait besoin d’entendre respirer à ses côtés.

L’animal n’aimait pas les miroirs, surtout celui de la salle de bain. Quand Marc s’en approchait, il aboyait à fendre l’âme. Sans doute devinait-il que ce miroir-là était le plus cruel d’entre tous les miroirs. Marc l’appelait « le miroir du diable » et ce qu’il  y voyait, semaine après semaine, le remplissait d’effroi.


Un lundi, tourmenté par son reflet et fatigué des aboiements du bâtard, il décida de détacher le miroir pour le mettre à la cave. Aussitôt que le miroir fut au sol, le chien s’en approcha en remuant la queue, comme s’il avait compris que l’objet allait bientôt disparaître. Il le flaira, puis tomba raide sur le carrelage, un filet de bave à la gueule.


Marc fut incapable de faire un geste. Son regard incrédule allait du miroir aux flancs immobiles de la bête et il resta longtemps ainsi. Quand il se résolut enfin à faire un pas et qu’il s’agenouilla près du chien, il vit se dessiner, sur la surface polie du miroir, le visage de son père, déformé de vin et de colère. Comme il se saisissait d’une serviette de bain pour couvrir l’objet, deux mains puissantes aux racines veinées sortirent du reflet,  lui agrippèrent le cou et serrèrent. Marc lutta comme il put, mais les mains eurent raison de lui.

* phrase proposée par le site des “impromptus littéraires” dans le cadre de leur atelier hebdomadaire

14 janvier 2009

Être désiré ( gballand )

Mais tu t'es vu ? Regarde-toi ! J'avais envie de lui crier. Mais il ne voulait pas se voir. Quand je lui parlais de lui, il était aux abonnés absents. J'avais essayé de le faire sortir de sa torpeur, impossible. Il me regardait comme s'il ne me voyait pas, puis il finissait pas me dire.

- Oh toi, tu ne dois pas aller bien pour me harceler comme ça !

Je désespérais ;  jusqu'au jour où il s'est effondré dans mes bras sans parler. J'ai attendu, patiemment. Au bout de quelques minutes, il s'est redressé, presque vivant, et il a crié.

- Elle m'a dit... puis sa voix s'est brisée.
- Qu'est-ce qu'elle t'a dit ? Ai-je repris.
- Elle m'a dit qu'elle ne m'avait jamais désiré, a-t-il sangloté.

Je me demandais qui était cette femme ; je ne lui avais jamais connu de liaison. Je ne voulais pas m’immiscer dans sa vie, mais ma curiosité l’emporta.


- Mais de quelle femme tu me parles ?
- De ma mère ; elle ne m’a jamais désiré ! C’est ce qu’elle m’a dit hier, juste avant le dessert !


Je lui ai tendu un mouchoir et je me suis tue.

13 janvier 2009

Un chocolat chaud, un vrai ! (MBBS)

Elle s’assied à la table, contente de reposer ses pieds fatigués. Dehors il fait très froid et la sensation de froid est amplifiée par cette bise qui, vent du nord, fouette le visage et pénètre les os. La douce chaleur du salon de thé lui fait du bien après cette marche certes revigorante mais finalement pénible par ce froid de canard. Elle enlève son bonnet, son écharpe, ses gants et se débarrasse de sa veste, se laissant envahir par un début de torpeur qui s’installe en elle. Ce qu’il lui faudrait maintenant c’est un bon chocolat chaud, onctueux, sucré mais avec un brin d’amertume, juste ce qu’il faut pour que le goût soit doux au palais. Oui, c’est ce dont elle a envie et c’est aussi pour cela qu’elle a choisi cet établissement et pas un autre. La serveuse s’approche et le breuvage des dieux est commandé. Alors qu’elle attend, elle regarde autour d’elle. Le décor est charmant, les tables sont en bois, les chaises recouvertes d’une housse crème ou bordeaux et un napperon crocheté sur lequel un arrangement floral séché repose donne un petit côté vieillot à souhait. Au fond de la salle, une cheminée dispense sa chaleur éphémère.

Elle se sent bien et soupire d’aise. La serveuse dépose devant elle un petit plateau en porcelaine rectangulaire avec trois récipients. Une grosse tasse de lait chaud trône au centre, à droite du chocolat 72% fondu et onctueux dans un petit godet, à gauche de la crème fraîche battue dans un autre godet identique. Les papilles en alerte elle prend des cuillérées de chocolat fondu non sans se permettre d’en goûter un petit peu du bout de sa langue et dose son lait selon son envie, puis elle finit par le crème. Quand ses lèvres trempent dans ce nectar, elle ferme les yeux et soupire d’aise. De fines moustaches de crème se dessinent au-dessus de sa lèvre, elle les balaie d’un coup de langue et se dit qu’elle a de la chance d’avoir trouvé cet endroit. En effet, combien de chocolats chauds a-t-elle déjà commandé dans sa vie et combien de fois a-t-elle été dépitée par la tasse de lait et son paquet de poudre chocolatée qu’invariablement on lui servait…

13 janvier 2009

Ranger ( gballand )

Je lui avais demandé de ranger sa chambre, une hérésie ! Demande-t-on à un adolescent de mettre de l’ordre dans sa chambre et de changer les draps de son lit ? Le  rangement dura une semaine. Le premier jour, il mit ses cinq paires de chaussettes au sale, le deuxième jour il changea la housse de couette, le troisième jour le drap du dessous, le quatrième jour il ramassa ses livres de classe et les fourra dans son bureau, le cinquième jour il s’attaqua aux feuilles qui traînaient par terre et il les jeta en vrac dans un tiroir, le sixième jour il mit ses caleçons dans le sac de linge sale et le septième jour… il se reposa.

11 janvier 2009

Le dressage (gballand )

laisseIl y a une semaine, je suis allée faire dresser mon mari. Je sais, ça peut paraître bizarre. La propriétaire du centre m’a dit que j’étais la première femme à le faire. Je suis arrivée avec mon mari en laisse. Pour l’occasion, je lui avais acheté une jolie laisse noire, de collection haute couture, avec médaille chromée. Au départ, les propriétaires des chiens ont semblé étonné, mais ils ne m’ont posé aucune question. Mon mari, lui, n’a pas aboyé. Pourtant il aurait pu ! Pour l’occasion, je lui avais tricoté un pantalon noir, un manteau en laine bleu marine, et des chaussette noires, assorties au manteau. Je ne voulais pas qu’il attrape froid, la température atteignait – 2°, lui qui est frileux !

C’était la première fois que je le tenais en laisse et je dois dire que je n’étais guère à l’aise. Lui non plus ne semblait pas en forme, mais j’ai appris par la suite que sa tenue en laine le démangeait.

Nous avions un cours particulier avec l’éducatrice à 10 heures. La leçon a débuté par la marche en laisse sur un circuit complexe. J’étais heureuse, tout se passait à merveille ; par contre pour le “rappel au galop” et le “couché pas bougé”, là, il a fallu faire preuve d’une patience infinie. L’éducatrice m’a dit qu’au début, il y avait toujours des difficultés, quelle que race que ce soit, que je ne devais pas m’inquiéter, que tout rentrerait très vite dans l’ordre. Je lui ai fait confiance. En quittant le centre, mon mari était un peu nerveux, mais il s’est vite calmé lorsque je lui ai flatté l’encolure.

Une fois à la maison, je lui ai retiré sa laisse et, après quelques étirements douloureux, il s’est remis en position verticale. Quand je lui ai demandé ce qu’il avait pensé du stage, il a d’abord aboyé, ça m’a un peu inquiétée. Quand je lui ai reposé la question, il a commencé à grogner. J’ai bien essayé de le calmer, mais rien à faire. Et puis sans que je n’aie pu anticiper quoi que ce soit, il s’est rué sur moi et a mordue ma main droite. J’ai hurlé de douleur, il est parti en courant.

Aujourd’hui, il n’est toujours pas rentré. Je m’inquiète un peu, mais je n’ose pas aller au commissariat. Comment pourrait-on comprendre ?

PS : photo vue sur le site : www.accessoires-chiens.com

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