Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Presquevoix...
Archives
26 septembre 2019

Confiance

Souvent, Solange allait sur les plages blanches de ce qu’elle appelait « sa confiance » et elle attendait. Quand ses amies s’étonnaient, elle disait qu’elle voyageait au pays de la confiance.

-          Oui, mais pourquoi voyages-tu là ? s’obstinaient-elles.

-          Pour réfléchir.

Solange   refusait d’avouer qu’elle n’avait aucune confiance en elle - sans doute de vieux démons de l’enfance l’en empêchaient – jusqu’au jour où elle rencontra Jean, un musicien qui adoraient les voix qui venaient d’ailleurs. Un jour il lui dit.

-          Pourquoi tu ne chantes pas ? Tu as une merveilleuse voix grave. J’adore quand tu fredonnes « Dream a little dream of me »

-          Manque de confiance, osa-t-elle lui dire.

-          Je ne suis pas un apôtre et je ne fais pas de miracles, mais essayons, moi à la guitare, toi à la voix, et on verra.

Il suffit d’une seule chanson pour que leur duo démarre. Son titre : « les plages blanches de ma confiance ».  Elle en écrivit les paroles, lui la musique...

 

24 septembre 2019

Madame la Mort

Le visage triste, dans la nef de l’église, il lui avait dit.

-           Tu vois, moi, je n’ai pas vraiment peur de la mort mais franchement, je préfére ne pas être là le jour où elle viendra me rendre visite.

Elle n’avait rien répondu et avait attendu la suite qui arriva instantanément.

-          Et toi, tu en penses quoi de la mort ?

Le problème c’est qu’elle n’en pensait rien. Pourquoi en penser quelque chose si tôt ? Evidemment, il avait l'âge de son père, et entre 67 ans et 40 ans, l’écart se creusait durement.

Elle se contenta de lui dire.

-          Bon, Madame la Mort est une femme de haute culture, et je suis sûre qu’elle pourra trouver un moyen fort délicat pour nous faire passer de vie à trépas

Il sourit et continua sa visite de l’église. Quant à elle, elle s’assit dans le choeur et respira calmement.

20 septembre 2019

Une nouvelle force

Hier, le visage lumineux – peut-être trop d’ailleurs – Hélène lui avait dit que la force de l’Eïnothérapie était de pouvoir travailler sur une tension corporelle sans avoir besoin de connaître l’origine de la tension.

Véronique l’avait regardée l’air étonné et s’était contentée de répondre, le plus banalement du monde, qu’elle préférait savoir d’où venait ses tensions.

-          Toi oui, mais les autres non.

-          Tu crois ?

-          Oui.

Hélène continua.

-          Au fait, tes problèmes de dos, tu pourrais les résoudre grâce à l’Eïnothérapie.

-          Peut-être, mais comme j’en ai plein le dos de mon boulot, je ne pense pas que l’Eïnothérapie puisse m'en libérer.

-          Alors essaie la méditation de pleine conscience.

-          Je te remercie de tes conseils Hélène, conclut-elle quelque peu agressive, mais, quand je t’observe, je n’ai pas vraiment l’impression que tu vas mieux qu’avant. Par exemple, tes problèmes avec tes enfants semblent toujours provoquer quelques tensions en toi.

Puis elle  quitta le café sans lui dire aurevoir.

Deux jours plus tard, elle envoya un SMS à Hélène pour s'excuser de son attitude. Hélène, elle, se contenta de lui envoyer le titre d'un livre  : " Comment bien vivre avec soi-même". Livre, bien sûr, que jamais Véronique ne lut.

 

 

16 septembre 2019

Demande

- Excusez-moi de vous dire ça tout de suite, mais j’ai l’habitude d’aller  à l’essentiel, profession oblige : alors, on couche ou pas ?

Sa question eut sur lui l'effet d'une douche glacée. Toute l'excitation qu'il avait senti monter  retomba d'un coup, d’un seul. Il sentit son sexe se recroqueviller, misérable, et il eut l’impression de se vider de son sang. Non, il ne pouvait plus rien imaginer avec elle, l'affaire était classée.

- Alors ? Insista-t-elle.
- Oui, enfin non ! On ne couche pas !
- La franchise ne paie décidément pas avec les hommes, constata-t-elle un peu amère.

Puis elle prit son manteau et claqua la porte.

 

 

29 juin 2019

Questions

-          Je suppose qu’il n’y a pas de fruits ? Lui dit-il d’une voix qu’elle jugea impatiente.

Toujours ces interrogations négatives ! Il l’accusait d’être paranoïaque, mais il y avait de quoi : « Je suppose qu’il n’y a pas de fruits » ce n’était tout de même pas la même chose que  « Est-ce qu’il y a des fruits » !

Ce matin, il  avait commencé la journée par « je suppose que tu n’as pas acheté de dentifrice », suivi par « je suppose que tu n’as pas sorti la poubelle » et conclu par  « Je suppose que tu n’as pas appelé le plombier ».

Comment ne voyait-il pas que s’il lui posait des questions simples, elle n’aurait pas l’impression d’être remise en cause en permanence.

Soudain elle comprit :  Et s’il cherchait à la rendre folle, tout simplement, pour se débarrasser d'elle  ?

7 juin 2019

La thérapie

Ça faisait quatre mois que Manon allait mal. Elle n’arrêtait pas de me dire qu’elle avait envie de se foutre en l’air. Je n’en pouvais plus. Avec elle mes nuits étaient plus belles que mes jours, au moins elle dormait. Agacé, j’ai fini par prendre une décision : et si tu faisais une psychothérapie de soutien ; La femme de Jean en a fait une et au bout de 10 séances elle allait mieux. Je te l’offre, ce sera mon cadeau d’anniversaire.

Manon n’a pas dit non, elle n’est pas contrariante. Enfin, elle n’était pas contrariante, jusqu’à ce fameux jour qui sonna la fin de sa dixième séance.

- On dirait que ça va mieux - ai-je remarqué - tu vois, 10 séances c’est ce qu’il te fallait.

Elle m’a répondu l’air embarrassée : Oui mais…enfin… j’ai quelque chose à te dire.

J’étais un peu étonné de tant de mystères, surtout qu’entre elle et moi il n’y a jamais eu de secrets. Soudain elle s’est jetée à l’eau.

- Il faut que je te quitte. Toi et moi ça ne peut plus marcher, tu n'as pas fait de thérapie.

Je n’ai pas su quoi répondre. D’ailleurs je n’en ai pas eu le temps, elle est montée préparer sa valise puis elle est partie sur-le-champ.

Depuis deux semaines je suis seul avec la chatte - oui, elle m’a quand même laissé Louise – mais moi, je n’ai qu’une envie : me foutre en l’air.

19 mai 2019

La femme en noire

Toute de noire vêtue, elle avançait dans la rue tête baissée comme si elle venait de recevoir l’hostie. Intriguée, je l’ai suivie, parfois je suis des gens ; une vocation ratée de détective privée. Elle est entrée dans une mercerie de la rue des Oiseaux, moi aussi. Elle y a acheté des boutons, moi aussi, mais pas les mêmes. Les siens étaient nacrés et en les payant elle a dit à la vendeuse.

-          Vous ne trouvez pas qu’on dirait des hosties ?

La vendeuse a hoché la tête en lui rendant la monnaie. La dame en noir a pris la monnaie, son petit paquet, elle a fait une rapide génuflexion et elle est sortie.

-          Vous la connaissez ? ai-je demandé à la vendeuse.

-          La connaître, c’est un bien grand mot, elle collectionne les boutons, c’est tout ce que je sais d’elle. On la voit une fois par semaine, et elle achète toujours les mêmes. Des nacrés qui ressemblent à des hosties.

Je l'ai vue une seconde fois, une semaine plus tard,  près de l’église St Maclou où elle a pénétré sans hésitation. Moi aussi. Ensuite, elle  est tout de suite entrée dans le confessionnal où un prêtre, beaucoup plus âgée qu’elle, est entré à son tour. C’est à ce moment que j’ai entendu des cris rauques. Les siens ? Je me suis tout de suite demandée si elle n’avait pas avalé son bouton en forme d'hostie, mais était-ce bien ça ?

5 mai 2019

Vivre ?

J’épie, tu épies, il épie…Ça pourrait être une comptine, mais c’est ce que je fais à longueur de journée ; une règle de vie. J’épie sans montrer que j’épie, bien sûr. Je passe mon temps à épier mes semblables. J’épie pour le plaisir, pour mon plaisir. J’épie des vies qui pourraient être la mienne, pour vivre plusieurs fois, sans risque, comme au cinéma, mais avec l’émotion du voyeur actif en plus. Personne ne me connaît, mais je VOUS connais. J’ai l’air normal, une normalité de façade. Personne ne sait quel monde m’habite. Je mets un soin particulier à cacher ma véritable nature. Souriant, serviable, insaisissable, s’ils savaient. J’attends la faille, l’embûche, le piège et je regarde la chute, parfois. Je mène une existence parallèle à mon existence d’épieur, bien sûr. A vrai dire, je ne sais plus qui je suis et parfois, je me regarde et je ne me reconnais plus. Ça me fait peur, mais je dois continuer ou consulter.

Seulement, peut-on consulter si épier immunise de la vie ?

3 mai 2019

Question

Elle était restée dans la salle des professeurs pour travailler. Lui, était entré 10 minutes après elle et lui avait à peine dit bonjour, le regard noir. Elle l’avait observé, mi-figue mi-raisin, et avait fini par lui demander.

-          Tu connais la baie du naufrage, en Grèce ?

-          Non, pourquoi ?

-          Figure-toi, qu’en te regardant, j’ai cru que tu y étais échoué, mais je me suis peut-être trompée, excuse-moi.

Il l’a regardé, troublé, puis lui a demandé, presqu’en souriant.

-          Tu connais quelqu’un d’autre qui y vit ?

-          Euh, non, mais tu peux mettre une annonce sur internet.

Et tous deux ont recommencé à travailler comme si rien n’était, pourtant…

11 avril 2019

La boutique aux soutiens-gorges

Tous les jours il restait en arrêt devant la boutique aux soutiens-gorges. Il ne faisait de mal à personne, et surtout pas à elles, puisqu’il leur épargnait sa présence en chair et en os.

Elle aussi restait en arrêt devant la boutique aux soutiens-gorges. Elle le faisait pour se choisir l’objet qu’un jour elle aurait le courage d’acheter. Elle se trouvait grosse et moche, et ces "joyaux" n’étaient pas pour elle.

Ils se regardèrent l’un l’autre un mardi en début d’après-midi, et ils se sourirent, allez savoir pourquoi. Sans doute parce qu’ils cherchaient tous deux la perle rare. Il n’osa rien lui dire, comme il se doit, mais elle fit un pas vers lui. C’était le premier homme qui la regardait vraiment.

Elle lui demanda spontanément – et elle en fut elle-même surprise - s’il voulait de l’aide. Il rougit. Elle aussi.

-          Je m'occupe de ce qui ne me regarde pas, excusez-moi, dit-elle.

-          Mais non, au contraire, c’est gentil de votre part. Je me demandais ce qui pouvait lui plaire.

Elle n’hésita pas un instant et répondit.

-          Je ne la connais pas, mais je pense que cette couleur crème et ces dentelles lui iraient comme un gant.

Il l’observa un instant et ajouta.

-          Vous avez raison, mais j’attendrai un peu car j’ai toujours besoin de réfléchir deux fois lorsque j’achète quelque chose.

-          Vous n’êtes pas le seul. Voyez, moi, c’est la dixième fois que je passe devant cette boutique et je n’ai toujours rien acheté par peur de mal choisir.

-          Le soutien-gorge que vous me conseilliez d’acheter pour elle vous irait très bien, ajouta-t-il le visage cramoisi. Bonne journée et merci de vos conseils.

Elle le regarda partir les épaules voutées, sans doute troublé de ce qu’il avait osé lui dire. Une minute plus tard elle le suivit. Arrivée non loin de lui, elle cria.

-          Attendez, attendez !

Et il l’attendit.

<< < 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 20 30 40 50 60 70 80 > >>
Presquevoix...
Newsletter
8 abonnés