La femme en noire
Toute de noire vêtue, elle avançait dans la rue tête baissée comme si elle venait de recevoir l’hostie. Intriguée, je l’ai suivie, parfois je suis des gens ; une vocation ratée de détective privée. Elle est entrée dans une mercerie de la rue des Oiseaux, moi aussi. Elle y a acheté des boutons, moi aussi, mais pas les mêmes. Les siens étaient nacrés et en les payant elle a dit à la vendeuse.
- Vous ne trouvez pas qu’on dirait des hosties ?
La vendeuse a hoché la tête en lui rendant la monnaie. La dame en noir a pris la monnaie, son petit paquet, elle a fait une rapide génuflexion et elle est sortie.
- Vous la connaissez ? ai-je demandé à la vendeuse.
- La connaître, c’est un bien grand mot, elle collectionne les boutons, c’est tout ce que je sais d’elle. On la voit une fois par semaine, et elle achète toujours les mêmes. Des nacrés qui ressemblent à des hosties.
Je l'ai vue une seconde fois, une semaine plus tard, près de l’église St Maclou où elle a pénétré sans hésitation. Moi aussi. Ensuite, elle est tout de suite entrée dans le confessionnal où un prêtre, beaucoup plus âgée qu’elle, est entré à son tour. C’est à ce moment que j’ai entendu des cris rauques. Les siens ? Je me suis tout de suite demandée si elle n’avait pas avalé son bouton en forme d'hostie, mais était-ce bien ça ?