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18 février 2011

Si la soubrette était un homme ?

Il était au chômage depuis 6 mois et commençait à douter d’une embauche. C’est alors qu’il vit cette annonce dans un journal gratuit donné dans le métro : «  demande femme de ménage en tenue de soubrette pour 75 à 150 euros de l’heure ».
Il téléphona et on lui demanda s’il était une femme. Non, mais  un homme ferait-il l’affaire ? répondit-il. On lui demanda à quoi il ressemblait et il fut bien en peine de se décrire. Il finit par dire :
- 30 ans, 1 m 80, assez mince, peu poilu, blond.
Il lui fut répondu : je dois juger sur pièce !
L’agence – mais pouvait-on appeler ça une agence ? – se trouvait dans le dix-huitième arrondissement, un local qui ne payait pas de mine, sans doute une ancienne loge de concierge. La femme qui le reçut était outrageusement maquillée, dans les cinquante ans, et son sourire ressemblait plus à un rictus. Elle le jaugea sur le pas de la porte et lui dit immédiatement.
- C’est vous ?
- Pardon ?
- C’est vous le 1 m 80 peu poilu ?
Il sourit bêtement et lui dit que oui.
- Vous tombez bien. J’ai justement une demande un peu particulière, celle d’une dame d’une soixantaine d’année.
Elle fit un sourire entendu et ajouta :
- Et vous serez payé 150  euros de l’heure. Tous les samedis, de 20 h à 23 h, rue de la pompe, pour des cocktails mondains, me dit-on sur l’annonce. Cela vous va ?
Il fit signe qui oui. Après tout, que risquait-il ?

PS : texte écrit après avoir lu cet article dans libération.

17 février 2011

L’attente

Plus d’un quart d’heure qu’elle l’attendait. Il se faisait toujours attendre, qu’il pleuve, qu’il vente ou qu’il fasse beau. A l’endroit où elle s’était placée, non loin de l’arrêt de bus, elle voyait tout. Elle se tenait immobile, stoïque, droite comme un i. Soudain elle sentit quelque chose de mouillé couler le long de sa jambe de pantalon. Quand elle se rendit compte que c’était un chien qui lui pissait dessus, elle hurla comme une malade :
- Connard ! Tire-toi connard !
C’est à ce moment-là qu’il arriva…

15 février 2011

Les pleurs

Hier soir, vers 18 heures, j’ai entendu un enfant pleurer, puis les pleurs sont devenus d’épouvantables cris qui m’ont affolée. Je suis sortie illico par acquis de conscience. Ça venait du jardin de la maison d’en face. L’enfant beuglait en hoquetant :
- Maman, laisse-moi entrer, maman je veux rentrer, maman ouvre la porte ! OUVRE MOI ! MAMAN !!!!!!
J’ai fermé ma porte à moitié et j’ai tendu l’oreille ; au bout de cinq minutes les cris se sont arrêtés.
C’était le fils de la psychothérapeute qui habite de l’autre côté de la rue…

11 février 2011

L’expert psychiatre

Elle m’avait dit qu’elle avait exercé pendant cinq ans auprès des tribunaux. Maintenant elle était à l’hôpital psychiatrique, comme patiente.
- Pourquoi vous n’avez pas continué vos expertises ? lui ai-je demandé
« Parce que je ne suis pas psychiatre ! », voilà la réponse qu’elle m’a donnée. Elle a ajouté que dans la vie, c’était simple, il suffisait de vouloir les choses. Pas la peine d’avoir  des diplômes, juste l’envie, ça suffisait, la preuve ! Elle, elle n’avait jamais fait d’études de médecine, mais juste quelques séjours en hôpital et c’était bien suffisant. Elle avait conclu : «  J’en ai fait enfermer plus d’un avec les rapports que je leur ai concoctés ! »
- Et vous n’avez jamais eu aucun regret ?
Elle a jugé ma question déplacée et elle m’a annoncé que je devrais peut-être rentrer chez moi, que j’étais devenue trop « normale » pour être placée à l’hôpital et que je filais un mauvais coton. Ensuite elle a tourné les talons et elle est partie parler avec quelqu’un d’autre.

10 février 2011

La plante

Depuis que je me suis achetée une plante verte je passe mon temps à la regarder pousser. Je crois que je la regarde trop. Peut-être que je la stresse à force de la surveiller. A chaque fois que je l’arrose, je me demande si elle a trop d’eau ou pas assez. La moindre feuille qui jaunit me met dans un état second. D’ailleurs, ce matin, je ne suis même pas allée travailler à cause de deux feuilles qui sont tombées dans la nuit : j’ai eu peur qu’elle ne les perde toutes pendant mon absence, et ça,  je ne l’aurais pas supporté…

8 février 2011

Décérébration

Il avait décidé de se décérébrer, marre des pensées paranoïaques et marre des pensées tout court. Mais avec quoi se décérébrer ? Toutes sortes d’idées lui avaient traversé le cerveau qui était encore en état de marche. Après une réflexion qui dura l’après-midi entière, il opta pour le taille-haie. Mais pourrait-il se décérébrer seul ? Sinon, pourrait-il faire appel à une association ? Mais laquelle ? Et au cas où aucune association ne pourrait intervenir, son ex-femme accepterait-elle de le décérébrer en souvenir du « bon vieux temps » ? Et sinon, y aurait-il un parti politique qui pourrait lui porter secours ?
Afin de fuir toutes ces questions qui se bousculaient impitoyablement, il se prit un double whisky et se coucha à 20 h 30 précisément. La nuit lui porterait conseil…

PS : merci à qui de droit pour l’idée de la « décérébration ».

4 février 2011

Les boutons

Toute de noire vêtue, elle avançait dans la rue tête baissée comme si elle venait de recevoir l’hostie… Intriguée, je l’ai suivie. Parfois je suis des gens, pour voir ; sans doute une vocation ratée de détective privée. Elle est entrée dans une  mercerie de la rue des Oiseaux, moi aussi. Elle y a acheté des boutons, moi aussi, mais pas les mêmes. Les siens étaient nacrés et en les payant elle a dit à la vendeuse :
- Vous ne trouvez pas qu’on dirait des hosties ?
La vendeuse a hoché la tête en lui rendant la monnaie. La dame en noir a pris la monnaie, son petit paquet, elle a fait une rapide génuflexion et elle est sortie.
- Vous la connaissez ? ai-je demandé à la vendeuse.
- La connaître,  c’est un bien grand mot. Elle collectionne les boutons, c’est tout ce que je sais d’elle. On la voit une fois par semaine, et elle achète toujours les mêmes. Des nacrés qui ressemblent à des hosties.

3 février 2011

Invisibilité

Elle avait acheté deux petites pilules pour devenir invisible. Le lundi soir, elle avala la première et se rendit incognito chez ses parents, juste pour le plaisir d’entendre tout le mal qu’ils disaient d’elle ;  elle ne regretta pas son voyage. Le mardi soir, elle avala la deuxième et s’invita chez Nicolas S. et Carla B., couple très en vue de la jet-set parisienne. Elle en revint terriblement déçue… sans doute l’ennui que suscitent les êtres quand le masque tombe.
De cette soirée, elle ne retint qu’une chose : dans  « l’intimité », Nicolas n’appelait jamais sa femme Carlita.

2 février 2011

Chirurgie

Elle avait commencé par se faire refaire les seins, puis les fesses. Ensuite, elle s’était attaquée à son visage :  les pommettes avait été rehaussées, les joues avaient pris du volume, le double menton avait disparu, sans parler des lèvres, pulpeuses à souhait. Elle se trouvait plutôt mieux, mais le chantier n’était pas achevé : le cou, les cuisses, les bras demandaient à être travaillés en profondeur…
Un ami lui avait conseillé de faire de la gymnastique volontaire et elle lui avait ri au nez :
- De la gymnastique volontaire, tu plaisantes ? Je préfère le bistouri.
Un an plus tard, il apprit qu’elle était morte sur la table d’opération d’un chirurgien parisien. Dieu avait peut-être besoin de se faire la main ?

31 janvier 2011

Le chat

Elle l’avait fait entrer un sourire aux lèvres et lui avait dit de s’asseoir. Il avait rapidement regardé autour de lui et avait choisi le fauteuil à larges fleurs, à droite de la cheminée. Une fois assis, il avait remarqué que son visage  avait perdu sa bienveillance première ; elle ne souriait plus et il crut lire une pointe de colère dans ses yeux. Peu après, un gros chat roux fit son entrée dans la pièce et le regard de la jeune femme passa de l’animal au jeune homme assis sur le fauteuil.  Elle lui dit sèchement :
- Vous vous êtes assis sur le fauteuil de Lucien, et il n’aime pas ça !
Le jeune homme jeta un coup d’œil au chat et  comprit soudain qu’il était de trop.

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