Préméditation
« Donc je me lève et je pars et nous ne nous verrons ni ne nous parlerons pendant deux ans et demi… » C’est comme ça qu’il m’a quittée, et je n’ai plus jamais entendu parler de lui jusqu’à aujourd’hui. Sa voix est la même, j’ai failli raccrocher dès que je l’ai reconnue, mais à quoi bon, je sais qu’il m’aurait rappelée le lendemain ou le surlendemain, je connais sa ténacité. Il dit que son éloignement l’a fait réfléchir et que maintenant il sait qu’il doit m’éliminer ; « je te ferai la peau », ce sont les deniers mots qu’il a prononcés hier.
Ça pourra paraître absurde à n’importe qui : pourquoi me tuer aujourd'hui alors qu’il aurait pu le faire durant ces deux ans et demi ? Je suis persuadée qu’il m’a quittée pour mieux me tuer maintenant. Il lui a fallu tout ce temps pour mettre en scène mon meurtre et se faire à cette idée, c’est tout. Je sais ce que vous pensez docteur, que je suis folle, que j’affabule, que je veux le faire enfermer. Mais non, c’est vrai tout ça, je vous le jure sur la tête de mes enfants. D’ailleurs, encore plus révoltant que le crime qu’il prépare, il y a le mobile que son esprit délirant a fabriqué : il dit que je suis coupable de l’avoir abandonné !