Et si je tombais sur moi ?
Et si je tombais sur moi ? Je crois que je me dirais « Merde, pas moi ! Encore ! » Evidemment je ne suis pas tout à fait sûre de ce que je dirais, parce que je ne suis encore jamais tombée sur moi.
Il faut dire que je pars du présupposé que, si je tombais sur moi, je me reconnaîtrais ! Ça pourrait donner quelque chose comme :
- Ah, c’est moi !
- Oui c’est moi !
- Quoi de neuf !
- Ben… rien, tu le sais bien !
etc… etc… etc…
Le genre de dialogue qui donne surtout envie de se fuir ! Il y en a peut-être qui se surprennent, mais moi en 40 et quelques années - je ne mets pas l’unité dans le seul but de me ménager une surprise - je pense que, si je tombais sur moi, je me reconnaîtrais au premier coup d’œil, et pour cause, je suis de celles que personne ne remarque, sauf moi !
Je pourrais aussi tomber sur moi et commencer à m’écouter. C’est vrai qu’on réserve souvent l’écoute aux autres et rarement à soi-même. Pourquoi ? Sans doute parce qu’il est plus facile d’accorder aux autres ce que l’on ne s’accorde pas à soi-même ! Je pourrais donc tomber sur moi, me reconnaître, me saluer, et commencer une longue conversation avec moi. Ça pourrait donner le petit dialogue suivant :
- C’est moi, tu me reconnais ?
- Comment pourrais-je ne pas te reconnaître ! Et qu’est-ce qui t’amène ?
- Je suis venue te parler de moi !
- Je t’écoute…
- Je ne vais pas bien, je crois que j’ai un problème avec moi, mais je ne t’apprends rien.
- …
- Je suis persuadée que je me fais du tort à moi-même.
- Si je comprends bien, tu crois que tu es une ennemie pour toi. Qu’est-ce qui te fait croire ça ?
- Il y a des signes qui ne trompent pas… tu le sais bien !
etc… etc… etc… Un peu lassant à force, il faut bien l’avouer !
Je pourrais aussi tomber sur moi et ne pas me reconnaître du tout. Improbable, je sais, surtout au bout de quarante et quelques années…comme je le disais tout à l’heure, mais pourquoi pas ! Un peu comme si je rencontrais une étrangère au détour d’une rue, mais une étrangère qui dirait être moi, alors que moi je soutiendrais le contraire ! Un peu schizophrène, me direz-vous ? Peut être, mais l’Homme est capable d’actes de déni tellement extraordinaires pour avoir la paix avec lui-même ! On pourrait imaginer la rencontre suivante :
- Ça par exemple, hep attends, attends, mais attends je te dis, ne pars pas !
- Qu’est-ce que vous me voulez ?
- Tu ne vas pas me faire croire que tu ne me connais pas ?
- Cessez de m’importuner, je suis pressée !
- Tu te moques de moi ou de toi ?
- Madame, je vous dis que je ne vous connais pas, pourquoi vous mentirais-je ?
- Quel aplomb ! Ne me dis pas que tu m’ignores ?
- Je ne comprends rien à ce que vous me dites !
- Mais enfin, toi et moi, c’est la même chose !
- Qu’est-ce que vous me chantez là ? Vous devriez aller vous faire soigner !
- Tout de suite les grands mots, je te reconnais bien là ! Je peux te dire que si je me fais soigner, on sera deux !
- Vous m’emmerdez !
La chute est un peu définitive, mais probable. Ce moi ne veut assurément pas se reconnaître et va très vite tomber malade ; de la chair à antidépresseurs ou je ne m’y connais pas !
Et voilà… trois petits tours de manège du moi et puis s’en vont… Et si je tombais vraiment sur moi ?