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Presquevoix...

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18 décembre 2007

Une histoire

Le front appuyé contre la vitre, elle regarde le monticule de neige qui s’est accumulé sur son balcon. Elle l’estime à plus d’un mètre, elle ne pourra y accéder avant un certain temps mais aime ce sentiment de cocon que cette masse blanche lui procure. Le froid de la vitre lui fait du bien, comme une compresse sur son front brûlant, une compresse pour apaiser les idées et les préoccupations qui se bousculent dans sa tête.

Le vent provoque une soufflerie qui balaye la neige si légère par ces températures glaciales. Avec le soleil qui a pris la place des nuages en ce jour d’après-tempête, les flocons traversant les rayons sont comme de la poussière d’or qui vole dans le ciel. Elle regarde ces petites pépites et aimerait faire comme elles, s’envoler, saluer d’une pirouette et disparaître, en laissant une impression de magie derrière elle.

Un skieur de fond glisse sur le trottoir, frayant sa trace dans la neige poudreuse non déblayée. Un chien noir apparaît derrière lui, la queue panachée bien haute, trottant d’un pas joyeux. A un moment donné, il se roule à terre, gigote, les quatre pattes en l’air, visiblement heureux. Son maître suit, encapuchonné, les épaules voûtées, la tête basse face au vent.

Elle serre son châle sur ses épaules et retourne au salon. Son regard est attiré par cette enveloppe qui git sur la table basse. Elle tourne autour, dans un tourbillon lent et calculé, son regard toujours accroché à ce carré bleu qui l’attire et l’effraye à la fois. Elle ne l’a pas encore ouverte cette lettre, elle en connaît l’écriture et l’expéditeur mais elle hésite. Elle attend elle ne sait quoi se demandant si le doute et les suppositions sont préférables à la connaissance. Elle l’effleure de sa main, la saisit et la porte à son nez dans l’espoir de sentir les mots sans les lire. L’enveloppe ne transmet qu’une odeur de poussière et, déçue, elle la repose sur la table et s’en éloigne. Elle a le temps, elle a tout son temps. Elle retourne à la fenêtre et écoute le silence que le manteau neigeux à favorisé.

La sonnette de la porte d’entrée retentit, elle se retourne d’un mouvement sec mais reste clouée sur place.

18 décembre 2007

Le manège désenchanté

Pourquoi la vie finit–elle par désenchanter tout ce qu’elle enchante dans un premier temps ? C’était la réflexion qu’il se faisait en la regardant. Il l’avait trouvé belle, très belle, puis moins belle, nettement moins belle et maintenant, il se faisait violence pour ne pas la trouver quelconque. Il s’en voulait mais c’était ainsi, la vie avait flétri le doux velours de l’amour et il ne lui restait plus que les plis du souvenir dont les morsures béantes abîmaient la chair du présent. Tout ce qui l’avait attiré chez elle, l’éloignait maintenant, tout ce qui l’avait ému chez elle, l’agaçait aujourd’hui ! Il était temps pour lui de virer de cap afin de trouver des ports plus amènes !

17 décembre 2007

Les secrets...

Marie6Les secrets que le temps a enfermés dans les livres

respirent la mélancolie des souvenirs

que la mémoire a longtemps oubliés.

* photo gentiment prêtée par Mariesondêtre

16 décembre 2007

Tempête et Guignolée

Une autre tempête de neige s’abat sur Montréal en ce 16 décembre. Je regarde à travers la fenêtre et je vois les flocons tourbillonner et passer à l’horizontal, poussés et chassées par le vent violent. Parfois, ils remontent vers le ciel, tombent vers le sol, parfois ils s’écrasent contre la vitre avec un petit bruit de gravier. La neige s’accumule à une vitesse folle.

Je suis bien à l’abri, l’appartement est surchauffé comme le sont semble-t-il la majorité des habitations dans ce pays mais je ne peux m’empêcher de penser à ceux qui n’ont pas cette chance…

Hier, j’ai croisé des personnes qui récoltaient de l’argent pour les pauvres et cette recherche de fonds a pour nom « la Grande Guignolée ». Cela a commencé par la « Guignolée des médias » le 6 décembre. Ce jour-là des journalistes de tous bords étaient descendus dans la rue durant toute une journée pour récolter nourriture et argent. Depuis, des bénévoles poursuivent cette recherche de fonds qui se terminera le 24 décembre. J’ai pensé aux « Enfoirés » et « aux restos du cœur » je me dis que les bonnes idées émergent de partout pour combler des lacunes qui ne devraient plus être d’actualité dans des pays aussi riches que les nôtres.
J’ai aussi pensé aux petits écureuils croisés dans les parcs durant la belle saison et par ricochet à tous les autres animaux qui vont devoir survivre à cet hiver qui s’annonce plus rigoureux que celui de l’année précédente.

En ces temps de Noël, il est plus facile d’avoir des pensées pour les autres, l’abondance de cadeaux et de biens favorisant le remord des nantis dont je fais partie. Je me dis qu’il y a tant à faire que je pourrais être tentée de ne rien faire vu l’ampleur de la tâche mais ce serait trop facile. C’est ce que je me dis quand il m’arrive d’être fatiguée et découragée et cela m’aide à persévérer.

Il neige sur Montréal, et mon cœur est comme ces flocons, il est chahuté.

16 décembre 2007

Je joue à être morte...

Etendue dans mon lit, je joue à être morte* Non, ce n’est pas que je veuille mourir, mais je me demande à quoi ça ressemble la mort, je voudrais saisir le basculement, le moment où tout deviendra noir et le restera.
La dernière fois que j’ai joué à la morte, c’était il y a une semaine, et depuis ce jour-là, j’ai des angoisses. Il était 9 heures, il n’y avait personne dans la maison, juste moi. Je me suis allongée en laissant reposer mes mains sur mon ventre, comme d’habitude, j’ai fermé les yeux, j’ai respiré calmement pour attendre le moment où je pourrais me mettre en apnée et c’est là que le téléphone a sonné. J’étais décidée à attendre que ça s’arrête, mais ça ne s’arrêtait pas, alors je me suis levée rageusement et j’ai décroché en grognant un «  Allô ! » méchant. Personne n’a répondu. La deuxième fois j’ai presque hurlé « Allô ! » et là, j’ai entendu comme une voix d’outre-tombe qui m’a dit « Calmez-vous, maintenant vous avez tout votre temps, vous êtes morte. » J’ai balbutié un « Quoi, qu’est-ce que vous dites ? ». Et la voix a continué imperturbable « Vous avez l’éternité devant vous ! ». J’ai raccroché immédiatement. Je tremblais, j’avais la gorge nouée et je n’arrivais même plus à penser.
J’ai failli m’allonger à nouveau mais j’ai aussitôt changé d’avis. Il fallait que je parle à quelqu’un de toute urgence pour vérifier que j’étais bien  vivante. Comme un automate j’ai sorti de l’armoire un vêtement que j’ai passé sur ma chemise de nuit, j’ai descendu les escaliers, j’ai mis les premières chaussures qui se trouvaient dans l’entrée, j’ai ouvert la porte et je suis sortie dans la rue comme une folle, même pas peignée, mon manteau enfilé à la va-vite, et j’ai marché dans la rue. Tout me semblait normal, mais figé. Il n’y avait ni voitures, ni piétons, et puis j’ai vu un homme, au loin. J’ai marché plus vite, mais à l’instant où j’allais le rattraper, il a disparu : où ? Je ne savais pas ! J’ai poursuivi ma marche dans les rues jusqu’à la préfecture. Je savais que là, il y avait toujours du monde. J’avais raison, un gardien se tenait devant l’entrée. En arrivant à sa hauteur, je lui ai demandé l’heure. J’ai dû lui répéter ma question – il semblait ne pas entendre - alors il m’a regardée fixement et m’a répondu d’une voix neutre, comme l’aurait fait un automate.

- 9 h 30, madame, la préfecture est ouverte pour vos démarches.
J’ai failli l’embrasser, mais je ne l’ai pas fait, il n’aurait sans doute pas compris cet excès d’émotion. Je me suis contentée de le remercier chaleureusement et il m’a aussitôt regardée avec méfiance, mais peu m’importait, j’étais vivante, ou tout au moins, je le pensais.
Seulement, depuis ce jour-là, je regarde ma vie comme un animal apeuré…

* Cette phrase a été lue sur le blog de Coumarine

15 décembre 2007

Tempête sous un crâne...

Hier, j’ai acheté un livre. L’homme qui m’a servi était chauve, jusque là rien que de très normal… par contre, lorsqu’il s’est penché pour emballer mon livre, j’ai vu le sommet de son crâne et là, comme c’est étrange, j’ai été prise d’une irrépressible envie de passer ma main sur ce crâne si lisse, si « lustré » et qui semblait si doux. Je sais combien cela aurait été incongru, aussi ne l’ai-je pas fait, je me suis juste contentée d’imaginer la texture de son crâne et l’émotion que j’aurais pu ressentir si par hasard… puis, je suis partie en lui disant merci et au revoir, tout simplement.

14 décembre 2007

La lessive

marie7

Je me souviens, c’était une saison sans queue ni tête… j’avais étendu le fil à linge entre deux pommiers parce qu’il commençait à faire beau, et elle, elle était agenouillée dans l’herbe et pleurait tout son saoul. Je me suis toujours demandée pourquoi elle pleurait tout le temps, pour rien, elle m’a toujours énervée à pleurer comme une madeleine ! Mais là, ce n’était pas pareil, elle pleurait agenouillée, comme si elle implorait le ciel et je n’ai pas pu le supporter. J’ai arraché la corde à linge d’un geste sec et je me suis approchée d’elle en hurlant, la corde tendue entre mes mains rougies par l’eau «  Lève-toi ou je t’étrangle ! »
Elle a compris et elle s’est levée. Je jure que je l’aurais fait si elle ne s’était pas levée !
A ce moment-là, je me tenais non loin d’elle, nous nous faisions face, et tout le paysage s’était figé, même les moineaux s’étaient tus.
Et puis après, je ne sais pas ce qui m’a pris, je suis retournée vers la corbeille à linge et je lui ai tout  balancé  à la tête : les slips, les chaussettes, les gants, les serviettes… et j’ai gueulé

- Moi je voulais pas ça, tu m’entends je voulais pas ça, ! Pourquoi tu m’as fait ça, pourquoi ?

C’est là qu’elle s’est mise à chanter  à tue-tête, comme si elle était prise de démence

- Nous n’irons plus au bois, les lauriers sont coupés, la belle que voilà ira les ramasser, entrez-dans la danse, voyez comme on danse, sautez, dansez….

Je ne pouvais plus l’arrêter. Et puis elle dansait, elle dansait sur l’herbe… Elle avait dénoué ses cheveux blancs qui faisaient une ronde autour d’elle et elle avait enlevé ses chaussures et elle commençait même à enlever ses vêtements... elle… elle devenait folle !
Voilà, c’est comme ça que c’est arrivé. Peut-être que si je l’avais laissée agenouillée sur l’herbe, rien ne se serait passé…

* photo gentiment prêtée par Marisondêtre

13 décembre 2007

Ralentir

rues_de_Montr_al_sous_la_neige_004

Je te regarde et je me dis que tu dois avoir raison à rester planté là, sans même prendre la peine de donner l’illusion que tu ne veux pas y rester…Je n’ai pas le courage de te forcer à émerger pour retrouver le macadam.

Mon regard est attiré au loin, vers ces nuages porteurs de blancheur ouatée et qui vont à nouveau déposer sur toi un autre cocon de neige. Serais-tu plus sage que moi en me faisant comprendre qu’il est des temps propices à ralentir ?

Ralentir comme cette nature qui ne s’en prive pas ?

Ralentir et se mettre en veilleuse le temps d’une saison ?

Je reprends ma pelle. Je te laisse à ton sommeil, je reviendrai au dégel en espérant que ta carcasse ne sera pas trop rouillée à ton réveil.

13 décembre 2007

J'aurai juste quinze ans...

2006_02_24_005J’aurai juste 15 ans quand je te verrai pour la première fois de ma vie*. Oui, il y a presque 15 ans que je vis dans l’antre noir de ton ventre sans pouvoir en sortir, presque 15 ans que tu me retiens en me disant que je suis encore trop jeune, que je ne peux pas voir la lumière, que le soleil brûlerait mes yeux, et moi, obéissante, j’attends que tu veuilles bien m’ouvrir la porte. Tu me l’as promis, à 15 ans tu me libèreras ; à 15 ans, je pourrai voir ce monde dont les bruits me parviennent assourdis à l’intérieur de ton corps  ! Je ne sais pas ce qu’est un « autre » pourtant, même si l’autre risque d’être mon tourment - comme tu me le dis souvent - je veux me frotter à lui ! Je n'entends que toi, ma voix résonne contre tes murs et me revient comme un boomerang sans ne jamais croiser personne. Je n’ai que toi, toi et toi comme écho et mes cris ne traversent jamais ton cœur, mais lacèrent le mien… J’attends le jour où je déchirerai ton ventre et où, débarrassée de tes viscères,  je serai enfin moi.

* Phrase extraite du livre de Marc Agapit – La bête immonde
* Photo de R. B.

12 décembre 2007

Une si belle journée…

Ce matin, vers les 7h (heure Montréal) donc les 13h (heure suisse), ma fille me presse de me lever pour me dire que je vais avoir une belle surprise.
Quand je sors de ma chambre, elle me demande de m’asseoir devant l’écran de l’ordinateur pour me faire lire la grande nouvelle du jour : le fossoyeur de la tolérance et de la politique sociale, le dogue zurichois, le « fouteur » de trouble, le ténor du racisme, celui que j’appelle la honte du gouvernement de mon pays ne s’est pas fait réélire ce matin par le parlement suisse ! Que cette journée soit bénie des Dieux. Cet homme politique d’extrême-droite s’est fait infliger une baffe mémorable, du même acabit que lui-même l’avait infligée à la femme à qui il avait pris la place, il y a 4 ans de cela. Juste retour de…baffes Monsieur Blocher !

Bon, j’attends encore demain pour sabler le champagne car la femme élue à sa place n’a pas encore accepté ce mandat et donnera sa réponse demain matin . Suspense!

Etait-ce cette nouvelle qui m’avait rendue radieuse ? Je ne sais pas mais en sortant du métro un peu plus tard dans la matinée, j’ai tenu la porte à un homme qui m’a remerciée, je me suis retournée et lui ai souri puis j’ai continué mon chemin. J’ai alors entendu une voix crier : « Excuse me ? » Je me suis retournée en direction de la voix et l’homme à qui j’avais tenu la porte m’a lancé : « you are beautiful ! »

 Ouah ! Des journées comme ça, j’adore !

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