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Presquevoix...

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25 janvier 2008

Le pouvoir des mots

( dialogue authentique, raconté par une amie)

- Allez maman, tu reprendras bien un petit apéritif ?
- Non, non je te dis, je  vais être saoule !
- Mais maman, je t'ai déjà dit que c’était un apéritif sans alcool !
- Peut-être, mais c’est quand même un apéritif !

Cette histoire ne serait-elle pas l’illustration parfaite de l’implacable pouvoir des mots : prendre un "apéritif", pourtant sans alcool, c’est déjà s’enivrer… !

24 janvier 2008

Un autre monde

Je suis fatigué, de toi, de nous, de tout. J’ai des envies d’évasion, de départ mais ce ne sont que des rêves. Je sais que je ne vais pas bouger, que je vais continuer à faire semblant d’être heureux, à te sourire tous les soirs en rentrant, à te parler de mon travail, de mes collègues, à dire que ça sent bon alors que tu cuisines mal, à me vautrer devant la télé pour finalement te faire l’amour de façon automatique.

Je suis lâche. Lâche car je n’ose pas tout envoyer balader. Mon père m’a toujours dit que j’avais des responsabilités, qu’un homme se devait de tout assumer, d’être le soutien de sa famille, le chef quoi. Foutaises ! Je sais moi, que c’est un leurre, que c’est toi qui décide de tout. Oh, tu le fais avec doigté, délicatesse, l’air de ne pas y toucher ! Nous faisons toujours ce que tu veux et quand tu l’a décidé. Tiens, comme dans la chanson de Brel ! Il a tout compris lui mais moi je n’ai pas son talent donc je ferme ma gueule et je continue à sourire et à travailler, à travailler et à sourire. A sourire à mon chef qui doit me prendre pour un débile et à peiner sur des tâches que j’abhorre. A sourire à ta mère qui se mêle de nos affaires, à ton frère qui fait l’étalage de sa réussite sociale et à toi qui me rabroue parce que je n’ai pas d’ambition comme tu dis.

Je suis si fatigué, j’aimerais dormir et me réveiller dans un monde où je serais autre. Un monde qui m’accepterait comme je suis, sans chercher à me changer, un monde où les gens comme moi deviendraient les rois pour une fois…

23 janvier 2008

Sans commentaire

23 janvier 2008

Pourquoi ?

echelle

Il avait consacré toute son énergie à se dépasser et maintenant il était usé, non  de l’extérieur - parce que de l’extérieur tout était lisse et net comme à l’habitude - mais de l’intérieur. Son âme errante frôlait le bord de l’abîme ; mais qui aurait pu l’imaginer ?
Il  gravissait les échelons, encore et toujours, mais chaque échelon gravi s’accompagnait d’une possible chute. Combien de fois n’avait-il pas fait ce cauchemar : il arrivait au sommet de l’échelle, le barreau cassait, il tombait dans le vide et il était  réveillé par le cri terrifiant qu’il poussait. 
Quarante ans à monter les barreaux d’une échelle qui n’en finissait plus de se dresser vers le ciel, 40 ans à ne pas pouvoir regarder en arrière ; la peur d’être aspiré par le vide. On l’avait  désigné pour cette ascension  et il ne pouvait plus s’arrêter,  plus rien ne pouvait le sauver, ou plutôt si, une seule chose : se débarrasser de lui le plus vite possible...

photo vue sur le blog : http://lestempsperdus.blogspot.com/2006/11/lchelle.html

22 janvier 2008

22-02-2022

« Aujourd’hui, je sais que je vais gagner !

Aujourd’hui, je sens que c’est mon jour de chance. Avec une date pareille, je serais folle de ne pas tenter ma chance. Je me souviens…j’ai eu mon diplôme un 2 juillet, j’ai acheté ma voiture un 20 octobre, j’ai commencé mon premier job un 2 janvier et j’ai rencontré l’homme de ma vie un 2 février…

J’ai mis ma tenue chic, celle que j’avais achetée pour le mariage de ma cousine, j’ai vidé mon compte et j’ai pris un aller simple pour Evian. Avec tout le fric que je vais gagner, je rentrerai en voiture avec chauffeur…

Maintenant je suis assise à la table du Casino, le croupier est en face de moi et des visages concentrés m’entourent. L’ambiance est sérieuse, je suis quand même un peu intimidée. J’observe autour de moi, je mise sur le 2 rouge et…le 2 rouge sort ! Le croupier pousse vers moi un petit tas de jetons de toutes les couleurs. Mon cœur se met à battre un peu plus vite. J’attends un tour puis je mise sur le 20 noir. La roue tourne, tourne et…bingo, je n’en crois pas mes yeux, le 20 noir sort à son tour !

Le tas de jetons devant moi est conséquent. Je réfléchis sur la suite à donner. Je suis de nature prudente mais aujourd’hui, c’est le jour de ma vie, ce n’est pas une journée ordinaire, donc…Je regarde à nouveau autour de moi, j’hésite un peu puis je me lance. Je pousse tout mon tas de jetons sur le 20 rouge. Le croupier me jette un regard, un léger frémissement parcourt la table, la roue est lancée, rien ne va plus… »

22 janvier 2008

le temps suspendu

Elle prend un café avec une amie au bar du cinéma et soudain son rire lumineux éclate.
- On t’a jamais dit que tu riais trop fort ! lui déclare le jeune homme, plutôt taciturne, de la table d’à côté.
Elle le regarde un instant, puis elle continue sa conversation en souriant aux propos que lui tient sa compagne sans plus s’occuper de lui.
- Je ne suis pas un objet qu’on balance quand on n’en a plus besoin ! la menace-t-il de sa voix tranchante ; et il se lève pour se placer juste devant elle, à quelques centimètres. Elle ne sait que répondre, hésite, puis  dit.
- C’est vous qui m’avez adressé la parole, je ne vous ai rien demandé !
- Les filles comme toi qui prennent les mecs de haut, ça me fait gerber !

Elle lui répondrait bien de gerber si ça lui chante, mais il la toise de toute sa hauteur ; il ne bougera pas d’un pouce, elle en est certaine, et si elle part, il la suivra, elle le sait.

- Je n’ai plus rien à vous dire.
- Tu te fous de moi ou quoi, avec ton vouvoiement de merde ! On a vécu un an ensemble et  tu fais semblant de pas me connaître ?
Elle le regarde à nouveau, l’air impassible, et conclut d’une voix glaciale.
- Je t’ai déjà dit que c’était fini tous les deux. C’était une erreur, voilà, et les erreurs on les efface et on passe à autre chose.

Le bar semble avoir retenu son souffle. Soudain, le corps du jeune homme perd de sa superbe, faiblit et il doit se tenir à la table, comme s’il avait reçu un uppercut au creux de l’estomac ; il murmure un bref « On se retrouvera, tu perds rien pour attendre ! », puis  sort chancelant, son long corps penché vers l’avant.

21 janvier 2008

Philosophie, anachronisme et « ignorance »

platon

Hier, une amie nous a raconté l’histoire suivante, drôle mais que certains trouveront peut-être triste. Elle cherchait pour son fils, le banquet de Platon. Ne le trouvant pas en librairie et passant à Carrefour, elle  décide à tout hasard  d’aller au rayon librairie de Carrefour. Afin d’éviter de chercher, elle demande à la vendeuse si par hasard, elle aurait en rayon le banquet de Platon. La vendeuse fait un effort surhumain pour chercher puis lui demande : « C’est une nouveauté ? ». Cette amie, gênée, n’ose rien répondre et  dit juste, en faisant mine de partir, que ce n’était pas grave, qu’elle chercherait elle-même, qu’elle trouverait bien… On peut penser que la vendeuse voulait peut-être, après tout, évoquer la « modernité » de l’œuvre de Platon ?
Une chose est sûre, Platon continuera à vivre dans l’esprit des uns malgré l’ignorance où le tiennent les autres… mais ce qui nous touche, dans cette anecdote, n’est-ce pas l’ignorance qu'elle révèle, même si, après tout, ne pas connaître Platon n'est pas un drame ? Nous savons que cette ignorance peut submerger les hommes et les faire se « vautrer », sans recul aucun, dans les divertissements dont on les gave en permanence ; car penser par soi-même peut-être dangereux à plus d’un titre…

20 janvier 2008

Le cadeau d’anniversaire

cadeau

Pour son anniversaire, il avait décidé de l'étrangler. C’était une idée qui lui trottait dans la tête depuis quelques temps. Il n’y avait attaché aucune importance jusqu’à ce jour précis où sa femme lui avait demandé ce qu’il voulait pour son anniversaire. Il ne savait plus quoi demander… des livres et des disques remplissaient sagement ses étagères, son armoire était pleine de pantalons, de pulls et de chemises ; il avait un ordinateur, une imprimante, une télévision grand écran, un lecteur enregistreur de DVD, une caméra numérique, un appareil photo… non, il avait tous les biens matériels qu’un homme appartenant à la bourgeoisie moyenne peut désirer. Il ne lui manquait qu’une chose : le bonheur ! Mais que peut attendre un homme de soixante cinq ans, ni beau ni laid à l’âge où il dévale la pente de la vie ? C’était la question qu’il s’était posée jusqu’à ce qu’il la rencontre. Elle, sa « fleur de jouissance », son « bonbon sucré » – comme il l’appelait lorsqu’elle le retrouvait lors de moments volés  – ou « ma petite mienne » – comme il lui chuchotait au creux de l’oreille lorsqu’il voulait faire l’amour avec elle.
Il en était arrivé à la conclusion qu’étrangler sa femme était le cadeau d’anniversaire qui lui ferait le plus plaisir, mais a-t-on jamais imaginé un homme demander pareil sacrifice à sa femme ? Même lui n’en serait pas capable ! Si elle avait connu ses pensées les plus profondes, elle ne le regarderait certainement pas avec ces yeux-là ; mais dans un couple, n’est-on pas souvent le dernier à savoir ce qui nous attend ? Lorsqu’il l’observait , c’était la médiocrité de sa propre vie qu’il voyait en miroir. Elle acceptait presque avec bonheur l’âge qui s’installait doucement et la détachait des rives du désir. Tout son plaisir consistait à s’occuper de ses petits enfants qui, pour lui, étaient non seulement un fardeau – il les avait toujours trouvés laids et bruyants - mais l’annonce qu’il allait devoir leur céder sa place  pour disparaître à jamais.
A partir du jour où Léa avait accepté de devenir sa maîtresse, sa femme lui était devenue insupportable, non par ses exigences, mais bien parce qu’elle n’en avait aucune. Il en avait maintenant presque la certitude :  ce qu’il voulait étrangler, ce n’était pas sa femme, mais l’acceptation tranquille de la mort qu’il croyait lire dans ses yeux.

19 janvier 2008

Flâner

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Flâner: se promener sans hâte, au hasard, en s'abandonnant à l'impression et au spectacle du moment.*

J'veux rien savoir, circulez, y'a rien à voir!

*Petit Robert

19 janvier 2008

Le dentiste

dentiste

J’aime bien aller chez le dentiste. Je sais, ça peut surprendre, mais mon dentiste me fait rire. Vous me direz, pas commode quand on a la bouche ouverte ; certes ! Heureusement, d’ailleurs, que j’aime bien aller chez le dentiste car j’ai l’impression d’y passer ma vie…
Une fois que je suis allongée sur le siège, la tête en arrière et que « l’élévation » a eu lieu, j’aurais presque envie de lui faire des confidences, mais ce n’est plus possible, ses mains ont déjà saisi les instruments qui occupent mon terrain buccal en un rien de temps.
Parfois, avant de commencer son « œuvre » – oui, mon dentiste est un artiste ; mon mari dit même qu’il a des « doigts de fée » -  il converse agréablement et je lui réponds. La dernière fois, il m’a parlé de sa femme et des journées entières qu’elle consacre à ses activités de loisir pendant que lui travaille d’arrache-pied sur les dents de ses patients…  Je me demande si, à ce moment-là, je n’ai pas envié sa femme ! Mais j’avoue que je ne me souviens plus très bien car il a commencé à faire un trou dans ma molaire. Mes mains se sont alors crispées sur les bras du fauteuil et les résonances internes de l’instrument qu’il manœuvrait ont suffi à me faire perdre le sens de notre conversation...

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