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Presquevoix...

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21 décembre 2021

Le père Noël est-il une ordure ?

Penché sur le guidon de sa moto, à 170 kms heures, il se répétait « Non le père Noël n’est pas une ordure, non le père Noël n’est pas une ordure, l’ordure c’est elle. » Et ce soir-là, le père Noël, c’était lui car il avait mis ce merveilleux costume qui le faisait briller avec les étoiles de Noël : du rouge et du blanc, ses couleurs préférées. Rouge de la passion et blanc de l’innocence.

 Quand les flics l’avaient arrêté sur la RN14, il fut bien obligé de tout dire.

-          En costume de Noël fin novembre, c’est pas un peu tôt ? lui dit le gendarme qui pensait avoir le sens de l’humour.

-          Et en plus, à cette vitesse ? ajouta l’autre. Alcootest, tout de suite

Mais il n’avait pas bu.

-          Venez donc dans la voiture avec nous - lui dit le premier gendarme. - on va discuter et après, on vous suivra chez vous. Ce sera notre cadeau de Noël.

Comment allait-il commencer son histoire ? Une histoire stupide dont le fond de vérité était essentiel et le fond, n’est-ce pas ce qui importe, dans la vie ? D’ailleurs, enfant, on lui avait toujours dit qu’il avait bon fond.

-          Voilà ce que m’est arrivé, raconta-t-il le visage blême.

-          Elle m’a dit qu’elle me quittait et…

-          Et ? Dirent les deux gendarmes d’une seule voix.

-          Et comme j’étais dans mon costume de père Noël, je ne l’ai pas supporté.

-          Vous l’auriez supporté dans un autre costume ?

-          Je sais pas. Mais là, non. C’était trop dur. Vous faites plaisir à quelqu’un, vous arrivez en costume de père  Noël pour faire sourire, et on vous fout tout en l’air. C’est pas juste.

-          Qu’est-ce qui n’est pas juste ?

-          Qu’elle en aime un autre.

-          Elle est toujours vivante, j’espère, dit le premier gendarme.

-          Vivante, oui. L’autre aussi, mais je lui ai donné deux gros coups de poing et je lui ai enfoncé mon bonnet de Noël sur son crâne.

Les gendarmes se regardèrent et dire d’une seule voix – il faut dire qu’ils étaient jumeaux.

-          Donnez l’adresse. On vous suit pour voir son état.

Arrivée au domicile de l’ex, ils comprirent tout de suite. Elle était vivante, mais allongé sur le divan, ils aperçurent un type à la longue barbe, l’air de Jésus ou presque, avec un bonnet de Noël sur la tête et deux yeux au beurre noir. Le pauvre gars pleurait. Le premier gendarme prit la parole.

-          Parfait, vous êtes vivants. Juste les yeux pour le jeune homme, rien de grave.

-          Mais il est cinglé ce connard en père Noël. Je le connais même pas, dit la fille.

-          Il nous a dit que vous vouliez le quitter.

-          Ce type est un copain de mon frère et un obsédé, par-dessus le marché. Comment pouvait-il croire qu’en arrivant en père Noël, j’allais devenir sa copine ? Un cinglé.

L’affaire aurait pu s’arrêter là. Les policiers partaient avec le père Noël qui sanglotait en hurlant « Personne ne m’aime, personne ne m’aimera jamais. » quand le jeune barbu se leva du divan et dit d’un air sérieux.

-          Laisse-toi pousser la barbe pour de vrai, père Noël, et tu verras, nul ne résistera, même pas celles qui se disent saintes. Marie, ma mère, me l’a dit, et je te le transmets.

Les gendarmes se demandaient s’ils se trouvaient dans une annexe de l’hôpital psychiatrique. Ils préférèrent se taire et, bras dessus bras dessous avec le père Noël, ils l’accompagnèrent vers sa moto pour le conduire sur les sentiers de la gendarmerie…

PS : prochain texte, vendredi.

 

 

17 décembre 2021

Le troll

Il était devenu troll parce qu’il était en rogne contre tout : le boulot, la famille, son poids – il avait grossi de 5 kilos en un mois et ne se supportait plus nu -, ses amis, enfin le peu qu’il lui restait. Cette somme de rognes l’avait fait basculer dans la catégorie des Zemouriens, une nouvelle ethnie politique.

Oui, la haine s’était installée en lui. Quand il se regardait dans le miroir, il se disait : « Je suis devenu le parasite de la rue massacre. Cette rue m’a foutu la poisse. » Quand sa sœur entendait ses « litanies », elle souriait et ajoutait.

- Ouais. Ta xénophobie, c’est la haine de toi, mon vieux. Tiens, quand je te vois toi, Zemourien parmi les Zémouriens, je me dis qu’on devrait obliger chaque candidat à avoir une série de dix séances chez un ou une psychologue. Il y en aurait un ou une en présentiel et trois autres derrière une vitre teinte. A quatre, ils pourraient faire un bilan de la santé mentale du ou de la candidate. Et les psychopathes, les bipolaires, les narcissiques seraient éliminés d’avance ! Tu vois à qui je pense ? Tout ça pour la santé du peuple Français.

Il ne disait rien. Il savait qu’avec son obsession de la psychologie – sa soeur était elle-même thérapeute – elle lui mettrait une migraine du diable qui le plongerait dans un « trollisme » de première grandeur

 

14 décembre 2021

Les murs de la ville

Elle avait tagué tous les murs de la ville avec cette interrogation : « A quand la fin des couteaux en famille ? ».

Lors de son passage en comparution immédiate le juge lui avait dit.

-          Vous ne croyez pas que vous allez un peu loin ?

Et elle lui avait répondu froidement.

-          On voit bien que vous n’êtes pas une femme. Féminicide, ça vous dit quelque chose ?

Etrangement, le juge avait rougi. Avait-il, lui aussi, eu envie de tuer sa femme au couteau ?

 

PS : prochain texte, vendredi.

10 décembre 2021

Grève ?

Il n’arrêtait pas de la traiter de mouton. Pas de sens commun, pas d’individualité, pas de volonté, disait-il en permanence. Un jour elle lui a répondu.

-          Oui, mais si j’en avais, de la volonté, tu ne m’aimerais pas.

-          Essaie, on verra.

Et rapidement, elle a changé de rythme. Finies les courses, fini le repas du soir à 20 h, finie l’écoute des informations du soir sans réflexion aucune. Il s’est lassé.

-          Bon, c’est quoi cette histoire ?

-          Quelle histoire ?

-          Cette grève ?

-          Ce n’est pas une grève. C’est juste que je ne suis plus un mouton.

Il a préféré se taire et s’est assis devant son ordinateur, les écouteurs dans les oreilles, direction le pays de Netflix.

Depuis, chacun fait ses propres courses, prend son repas séparément, s’assied devant son ordinateur pour voir sa série préférée. Et ensuite, retour à la case lit pour un sommeil réparateur dans le monde des rêves…

 

7 décembre 2021

Les dix séances

Pour son cadeau d’anniversaire, elle lui avait offert dix séances chez le psy de son choix. Il l’avait très mal prix et lui avait demandé une explication.

-          Eh bien « une longue conservation ne se garde pas au congélateur"*, lui avait-elle répondu en souriant

-          En fait, pour mes cinquante ans tu te moques de moi !

-          Mais non, pas du tout, et puis ça m’a coûté fort cher. Il me semble qu’à 50 ans, il est temps de porter un regard sur soi au lieu de conserver tout dans son cerveau-congélateur. Et puis tu peux choisir sur le site la ou le psychologue de tes rêves et la thérapie que tu préfères.

Il n’avait rien ajouté car il savait qu’avec sa femme la conversation pouvait durer longtemps. Elle voulait toujours avoir réponse à tout. Il était persuadé qu’elle ajouterait ensuite qu’elle avait fait dix ans de psychanalyse, elle !

Ils passèrent une soirée déplaisante dans un bon restaurant où les plats, pourtant, leur semblèrent médiocres. De retour chez eux, ils se mirent immédiatement au lit et se tournèrent le dos pour dormir. « Un anniversaire de merde », pensa-t-il avant d’entamer sa nuit blanche. Elle, dormit immédiatement et respira fort – seuls les hommes ronflaient – et cette respiration régulière l’agaça tellement qu’il migra vers le salon où le canapé vert l’accueillit avec ses ressorts qui grinçaient.

*Cette phrase a été lue sur Diffractions

 

PS : prochain texte, vendredi.

 

3 décembre 2021

Souvenir

Il disait l'avoir aimée dix ans plus tôt, mais le souvenir qu'il lui avait laissé était celui d'un homme flou et mou. Non, elle n'irait pas à ce rendez-vous du "souvenir". A son âge- 45 ans - il lui fallait à tout prix éviter les hommes à tendance vague.

 « Ouvrir les yeux et résister » était sa nouvelle devise, car le variant d'Afrique du Sud et le variant électorale diminuaient son moral de moitié. S’il comptait sur elle pour se trouver un foyer d'accueil à Noël, non. D'ailleurs, elle avait toujours détesté Noël, et elle avait toujours détesté son prénom, Bernard ; le même prénom que ce philosophe suffisant, ami des médias…

PS : prochain texte, mardi.

30 novembre 2021

La baguette

Il s’appelait Testefort et avait une vie très rangée jusqu’au jour où il sortit du chemin habituel. Sa femme lui avait demandé d’acheter une baguette à la boulangerie. A la caisse, une jeune femme accorte.  Il n’avait l’habitude ni des jeunes femmes accortes – sa femme était un peu revêche – ni des boulangères.

Il fut donc troublé quand la jeune femme s’adressa à lui.

-          Que désirez-vous, lui dit-elle le sourire aux lèvres.

-          Une baguette s’il vous plaît.

Elle se retourna. Allez savoir pourquoi, c’est à ce moment là que Monsieur Testefort ouvrit sa braguette et... La jeune fille, en voyant la "chose", fit tomber la baguette de ses mains en hurlant. Quelle puissance vocale que la sienne. Monsieur Testefort revint à lui, rangea son matériel, ferma sa braguette et sortit immédiatement de la boulangerie.

En rentrant chez lui, sa femme lui dit.

-          Tu n’as pas oublié la baguette ?

Monsieur Testefort rougit et sa réponse surprit sa femme.

-          Excuse-moi. Une fois dans la boutique j’ai eu une envie terrible d’uriner et j’ai dû aller au café. Désolé. Vas-y toi-même, j’ai un dossier à terminer et des comptes à régler.

Bien sûr, il n’avait ni dossier, ni compte à consulter, mais il téléphona immédiatement à un psychiatre dont il trouva le numéro dans les pages jaunes. Quand celui-ci décrocha, il lui dit d’une voix basse.

-          Je vous téléphone car j’ai ouvert ma braguette dans une boulangerie…

Le psychiatre l’arrêta immédiatement et répondit.

-          Mardi prochain 17 h 30, ça vous va ? Vous tiendrez bien jusque-là. Votre nom ?

-          Testefort.

-          Très bien, c’est noté. Et ne vous inquiétez pas, avec un nom pareil, la force est avec vous. Et quand je dis la force, je veux dire la résistance, n’est-ce pas ?

Monsieur Testefort le remercia et se demanda si oui ou non il arriverait à résister. Peut-être pourrait-il demander à sa femme, le soir même si… mais avec elle, il y avait si longtemps que…

 

PS : prochain texte, vendredi.

 

26 novembre 2021

L’amitié

Juliette lui répétait en boucle qu’on n’était jamais mieux asservi que par soi-même et cette citation la faisait grincer des dents. Elle l’aurait acceptée si Juliette avait ouvert grand les yeux sur elle, mais non. Les soumises, c’était toujours les autres, celles qui se faisaient exploiter par leur compagnon.

Un jour, agacée, elle sortit un miroir et lui dit.

-          Excuse-moi de t’interrompre, Juliette, mais j’ai l’impression que tes yeux ne s’ouvrent que pour regarder les autres.

-          C’est-à-dire ?

-          Eh bien, voilà, je te sors un miroir, tu te regardes, et tu me dis ce que tu vois.

-          Je vois d’abord que je ne me fais pas chier à vivre avec un partenaire.

-          Certes, tu ne vis pas avec lui, mais il te téléphone en permanence pour savoir où tu es, donc ?

-          Donc, je ne suis pas exploitée.

-          Disons qu’il y a l’exploitation au domicile et l’exploitation hors domicile, alors !

Ce jour-là, Juliette la traita de conne. Une longue amitié de dix ans s’éteignit en 5 minutes. Elle se demanda, ce jour-là, si l’amitié entre femmes était si simple que ça…

 

PS : prochain texte, mardi.

 

23 novembre 2021

Scène ( lui/elle) – le pain

(lui)Tu  as pris mon pain. Attention à ce que tu fais !

(elle) Merde, désolée.

(lui) On peut être désolée après, mais il vaut mieux anticiper.

(elle) Merci pour ta leçon.

(lui) Ce n’est pas la première, ni la dernière.

(elle) Tu fais un peu père Fouettard, non ?

(lui) Peut-être, mais c’est épuisant de se retrouver le matin sans pain.

(elle) Tu as du quatre quart, regarde.

(lui) Je n’en mange jamais le matin. Ce n’est pas très dur d’être attentif aux autres.

(elle) Bon, j’ai compris, je m’en souviendrai. Tu peux arrêter la liste car là je vais partir au travail et ça me stresse.

(lui) Bon, si je comprends bien, quoi qu’il arrive tu as raison et j’ai tort ?

(elle) Ecoute, on dirait une scène de théâtre. Je n’ai pas dit que j’avais raison.

(lui) Oui, mais tu n’as pas dit que tu avais tort.

(elle) Bon, jusqu’à présent, cela me faisait sourire, mais plus maintenant. J’ai tort, OK. Ça te va ?

(lui) On va dire que ça va. Je te demande juste de faire attention à ce que tu fais. Dans la vie, cela pourrait te jouer des tours, tu sais ?

(elle) J’ai compris. Ne m’en parle plus s’il te plaît.

(lui) J’ai dit ce que j’avais à te dire.

(elle) Parfait. Alors je vais travailler et l’affaire est close. Au fait, ce soir, avant de rentrer, je vais acheter du pain, donc j’arriverai en retard.

 

PS : prochain texte, vendredi prochain.

 

19 novembre 2021

Le matelas de compétition

Christophe s’était acheté un matelas de compétition où il pouvait se mettre dans n’importe quelle position : en long, en large ou en travers. Pour dormir, la position qu’il préférait, c’était celle du Christ sur la croix ; parfois il la transformait légèrement, en écartant les jambes. Et chaque fois il se disait : qu’est-ce qu’il a dû souffrir le Christ ; s’il avait eu la même position que moi, sur ce merveilleux matelas, sa fin aurait été moins triste.

Le seul moment où il avait parlé de sa position sur  son matelas de compétition, c’était à une fille qui faisait des études de psychologie avec lui. Il ne ressentait rien de profond pour elle, juste une douce amitié, maintenant brisée, pensait-il, puisqu’il l’avait traitée d’idiote après qu’elle eut dit la phrase suivante.

-          Tu serais pas un peu maso, Christophe ? Tu me diras, il y en a qui aiment ça les masos. En tout cas,  compte pas sur moi pour essayer ton matelas de compétition !

Quand il était rentré chez lui, il avait fait une sieste de deux heures sur son matelas et Jésus Christ lui était apparu en rêve. Sa seule phrase avait été  "Celui qui cherche trouvera", et il lui avait souri. Oui, il fallait qu’il cherche pourquoi Jéus Christ l’obsédait…

PS : prochain texte, mardi.

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