L’homme, crâne rasé, torse velu,
musclé, tatoué, portant lunettes Ray Ban et mastiquant un chewing-gum, regarde
la belle figue qui le nargue du haut de la dernière branche de l’arbre du
désir.
Le souffle court, l’homme l’observe,
puis s’avance lentement, mesurant ses pas tout en évitant les pives qui
encombrent le sol. Il s’arrête. L’atmosphère lourde et étouffante assèche sa
bouche. La figue le nargue, se moque et expose sa rondeur juteuse à sa
convoitise. Il la veut, il sent déjà un goût sucré inonder ses papilles, il
salive d’avance.
Il secoue l’arbre, elle résiste.
Il secoue encore, elle se balance mais ne réagit pas. Il s’énerve, il a chaud.
Il jauge l’arbre, hésite puis d’un bond, se lance. D’un coup de rein puissant,
il se hisse sur la première branche, agrippe la suivante et grimpe dans
l’arbre. S’approchant sans trop de difficultés de l’objet de son envie, alors
que sa main s’apprête à cueillir ce fruit, une voix l’interpelle.
- Mon commandant, le colonel vous
appelle, c’est urgent !
L’homme jure entre ses dents.
D’un geste rageur il cueille le fruit, dégringole agilement de son arbre, salue
et se dirige vers son bureau. Il y dépose la figue.
- Ce n’est que partie remise ma
belle, attends seulement mon retour !