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Presquevoix...
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29 décembre 2011

L'uniforme

Quand elle lui avait demandé de se déguiser en officier de la wehrmarcht, il avait hésité, mais devant son insistance, il avait fini par acquiescer. Et tous les samedi soirs,  il paradait en uniforme dans leur chambre en baragouinant quelques bribes d'allemand qu'il perfectionnait au fil des mois  grâce à une méthode  achetée pour son anniversaire.
Après trois petits tours de chambre au son d'une marche militaire, elle le déshabillait lentement et chaque bouton enlevé était un nouvel échelon gravi sur l'échelle du désir. Seul bémol, ce Heili heilo qu'elle mettait en boucle pour arriver au septième ciel…

28 décembre 2011

Les rideaux

En voyant   la façon dont les rideaux étaient tirés, elle se doutait qu'il se passait quelque chose de louche chez les Plumeau. Elle ne fut donc pas étonnée d’apprendre que M. Plumeau organisait chez lui, en l’absence de sa femme,  des parties de poker qui se terminaient toujours de la plus étrange façon ! Elle le savait grâce à la femme du docteur, c’est elle qui lui avait dit qu’Aurélie, la petite vendeuse de la boulangerie, avait été vue sortant de chez Plumeau le 27 au soir alors que sa femme était à l’hôpital.
Pauvre Mme Plumeau, elle l’aurait presque plainte, mais il lui fallait reconnaître que c’était une garce et qu'elle n'avait que ce qu'elle méritait…

23 décembre 2011

La messagère de la vierge

Elle se prenait pour la messagère de la vierge. Au début les gens en riaient, mais depuis qu’elle avait fait construire sa croix lumineuse de quatre mètres de haut au fond de son jardin, les visages se fermaient un peu. De mini-pèlerinages s’improvisaient chaque mois. Elle les menait, habillée d’une longue robe bleue et coiffée d’un voile blanc, en  entonnant des cantiques repris par ses enfants,  rebaptisés Marie et Joseph, qui l’entouraient de gauche et de droite. Tout aurait pu continuer ainsi, mais un jour, il y eut un miracle : une auréole, une vraie, était apparue et lui avait ceint la tête pour ne plus la quitter. 

Depuis ce jour-là, le village vivait à l’heure de la Vierge. Même Gérard, le plus athée des athées du village, suivait ses prêches. La parole de la messagère de la Vierge était devenue parole d’évangile…

PS : texte écrit à partir de cet article

22 décembre 2011

La photo de trop

Quand il l’avait vue photographier sa devanture -  et ce n’était pas la première fois ! - il était sorti pour lui demander ce qu’elle voulait. La jeune femme avait répondu d’un ton léger.

-    Je photographie les couvertures des livres qui m’intéressent pour les commander sur internet*

Il avait sorti son arme, avait tiré sur elle sans sommation, et elle s'était écroulée devant la librairie. Au policier qui l’avait interrogé en soulignant la barbarie d’un tel acte, Le libraire avait répondu.

- Et elle ? Quand je pense qu'elle me fait mourir à petit feu depuis des années ! Elle n'a eu que ce qu’elle méritait.

Et le libraire a ajouté, sans que le moindre signe ne montre qu’il s’agissait d’une plaisanterie.

- Et le prochain sur la liste, c’est le Président, il paiera pour tous les autres. Une TVA à 7 % c’est la mort des libraires. Je le tuerai avant qu’il ne nous tue ! De toute façon, peut-on laisser vivre un Président qui malmène à ce point la langue française  ?

 


*phrase lue dans l’article « Ne tirez plus sur le libraire », dont je vous conseille la lecture ; de même que l’article «  Les livres, ma passion, ma perte ».

Si les libraires disparaissent des villes, comme aux Etats-Unis, nous en serons responsables. Apprenons à différer nos achats et  commandons à nos libraires plutôt que sur internet.

20 décembre 2011

La cycliste

Le radar l’avait flashée à 70 km/heure ! Elle n’en croyait pas ses yeux en lisant le PV. Jamais elle n’aurait imaginé qu’elle pédalait aussi vite en allant au travail, surtout le matin, à 7 heures 15. Mais le radar était formel. Et aucun de ses courriers ne réussit à fléchir l’administration. On lui demandait de payer 90 euros : soit elle payait l’amende, soit ils doublaient la dose. Ils étaient inflexibles. Cette histoire était ridicule, comme le pays dans lequel elle vivait. On flashait des cyclistes à 70 km/heure mais on oubliait de flasher les fortunes qui s’installaient dans les paradis fiscaux…

PS :Texte inspiré par cet article. 

17 décembre 2011

Le syndrome

Atteint du syndrome de la Grossièreté*, il fut obligé, malgré lui, d’arrêter sa carrière d’enseignant. Les parents multipliaient les plaintes auprès du proviseur. Leurs enfants  ne supportaient plus d’être traités de putains de fainéants, de triples connards à poil dans la main, d’enculés de primates même pas capable d’ouvrir un livre de maths. Sans compter les bordées d’injures – innombrables celles-ci – que le professeur adressait, à tout propos, au proviseur et au ministre lui-même ! Il fut rapidement réorienté au CNED, dans un placard à balais pourvu d'une table et d'un ordinateur, situé juste à côté des toilettes. Et il y éructait à mi-temps, du lundi au vendredi, sur fond de chasses d'eau...

 * syndrome non encore répertorié par la communauté scientifique

16 décembre 2011

Les potiches

C’étaient deux potiches ; deux potiches délicieuses, certes, mais deux potiches tout de même. Il s’en voulait un peu de penser à elles de cette façon, mais elles avaient l’intelligence d’une larve, ne posaient aucune question et leur passivité semblait presque contre nature. Par contre, elles étaient décoratives au possible. C’est sans doute pour cette raison qu’il en avait placé une à l’accueil de son stand de voitures, comme hôtesse, et l’autre dans son lit. Et elles changeaient de poste toutes les semaines, dans une parfaite entente qui ne cessait de l’étonner. Il faut dire qu’elles étaient gonflables…

14 décembre 2011

Le monument aux morts

Tous les jours, en nocturne, et ce depuis trois mois, il urinait sur le monument aux morts. Quand les gendarmes l’arrêtèrent le mardi 12 décembre et lui en demandèrent la raison, il se justifia en disant que son grand-père était mort pour la France.

- Et alors ? répondit l’un des gendarmes.
- Alors rien ; certains mettent des fleurs, moi je pisse. Pourquoi on ferait tous la même chose ?

Le temps que le gendarme trouve une réplique, il était déjà parti…

13 décembre 2011

Être vu

Son chien était ses yeux et quand elle marchait dans la rue, elle le tenait toujours en laisse. Soudain, elle eut la sensation que quelqu’un la regardait et elle crut que c’était un homme ; sans doute l’odeur forte et âcre qui flottait dans l’air. Elle lui dit : " Bonjour monsieur ", juste pour le plaisir de saluer ceux qu’elle ne pouvait voir et qui, peut-être, lui adressaient un sourire. Le SDF répondit. « Merci de m’avoir vu, bonne journée à vous madame ! » Elle lui fit un signe de la main alors que le chien l’entraînait déjà vers le passage piéton.

12 décembre 2011

Les trous de mémoire

Quand elle avait des trous de mémoire, elle inventait, et à l’atelier théâtre, plus personne ne voulait l’avoir comme partenaire. Elle s’en était étonnée.

-    Mais enfin, lui  a expliqué son dernier partenaire, tu dis jamais le texte comme il est écrit, t’inventes tout le temps, comment tu veux qu’on s’y retrouve ?

-    Et qu’est-ce que tu crois que je fais, moi, quand je joue avec toi ? Lui répondit-elle furieuse. Je m’adapte monsieur ! T’as qu’à faire pareil. Tu crois que c’est facile de jouer avec un type qui a tellement  de tics qu’on peut même pas se concentrer sur sa réplique.

-    Moi ? Des tics ? cria son ex-partenaire. Personne ne m’a jamais dit que j’avais des tics !

-    Ben t’as qu’à te regarder une minute dans la glace, et tu verras !

Après cette réplique, elle partit  la tête haute, en déclarant que Michel était un pauvre type plein de tics, et  misogyne, de surcroît.

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