Le plaisir du rien
A leur troisième rendez-vous, elle lui avait dit, étonnée qu’il soit au RSA depuis cinq ans.
- Tu fais rien, mais tu le fais bien.
- Merci.
Après un silence qui n’en finissait pas de durer, il finit par ajouter.
- Toi aussi tu as un certain don, parce que c’est pas simple de ne rien dire.
Elle se demanda quoi lui répondre, d’ailleurs devait-elle lui répondre ? Pensait-il qu’elle avait l’air de rien ? Le doute entra en elle, comme dans ces moments de l’enfance où sa mère – son père lui était un taiseux – lui posait question sur question afin de sonder l’intérieur de cette petite fille si introvertie. Elle regarda l’homme assis en face d’elle en souriant puis, gentiment, elle lui répondit.
- Merci, c’est gentil. Ne rien dire et parfois parler de rien, ça m’apaise. Le regard en dit bien plus long que les mots.
- Tu as raison. Continuons de ne rien dire, alors. Parce que je préfère ne rien dire que de parler de rien.
Pendant les multiples rendez-vous qui se succédèrent, le rien occupa une place importante ; et, même si parfois le rien ne rime à rien, ce chemin du rien ne leur coûtait rien, ce qui ne gâtait rien…
PS : prochain texte, vendredi prochain.