Le sens de la mémoire
Comme elle perdait le fil de sa mémoire, son fils lui avait acheté un cadran où étaient notés le jour, la date et les activités de la journée. Le problème c’est que maintenant elle oubliait de regarder son cadran et elle s’en désolait.
- Un si joli cadran, disait-elle, c’est mon ami, mais je le néglige.
Et elle ajoutait ensuite.
- Quand je pense que j’ai même perdu le sens du calendrier !
Et là, il n’y avait plus rien à dire sinon l’aider à retrouver les fils disparus, ceux de l’heure et ceux du temps. Parfois elle s’attristait et répétait, comme s’il s’agissait d’un monologue intérieur.
- Tout ça est bien étrange car normalement, le temps est toujours à l’heure, toujours, et il ne déroge pas à cette loi antérieure à Jésus Christ.
Quand elle voyait la vie en rose et que le soleil brillait, elle disait en souriant, aux personnes qui venaient lui rendre visite.
- C’est gentil de venir me voir. Et si vous me donniez des mots pour combler mes trous ?
Certains s’attelaient à la tâche avec plaisir et le drap brodé de l’écriture s’étalait sur la table, entouré de rires et sourires. Les mots n’étaient pas avares. Elle non plus. L’écheveau de son humour donnait à la vie de nouvelles couleurs - celles de l’espoir et de la joie - et, temporairement, la mémoire restait en coulisse et ne commettait aucun crime…
PS : prochain texte, mardi.