La rencontre
Elle était entrée dans l’église à cause de lui : ils s’étaient disputés. Les jours suivaient aux jours, les disputes aux disputes, et son cœur se gonflait de tant d’incompréhension. Quand elle vit les apôtres grandeur nature, attachés au pied des piliers, son émotion fut si violente qu’elle put à peine respirer. Elle déambula dans la nef latérale et s’arrêta pour les saluer ; ils avaient l’air tellement humains dans la solitude profonde des lieux. Etaient-ils retenus prisonniers dans cette église ? Ils lui garantirent que non. C’est devant saint Luc qu’elle s’arrêta le plus longtemps. Elle entama même une conversation avec lui. Au début, il ne répondit pas mais il l’écouta avec attention, la tête légèrement penchée, attentif à sa plainte : elle n’en pouvait plus, chaque jour il la harcelait, ses récriminations s’ajoutaient aux récriminations, la liste gagnait en longueur au fil des semaines et elle sentait bien qu’elle devenait folle.
Quand elle demanda à Saint Luc si elle devait partir, il n’hésita pas un instant et lui dit clairement que les choses mortes devaient se détacher de l’être tout comme les feuilles mortes se détachaient de l’arbre.
Le lendemain elle partait, sans bagages. Elle ne voulait aucun objet, aucun vêtement qui eut appartenu à son ancienne vie. Luc l’avait sauvée.
PS : photo écrite à partir de cette photo de Pierrick, prise dans l’église de Louviers ( département de l’Eure).