Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Presquevoix...
Archives
31 août 2017

L'accent

Un matin, elle se réveilla avec l’accent américain. Au début, elle ne le remarqua  pas, c’est son mari qui le lui signala.

-          Arrête de prendre cet accent !

-          Quel accent ? répondit-elle étonnée.

-          L’accent américain !

Elle alla voir  le médecin qui se déclara impuissant. Il avait même ajouté « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. » Elle avait pensé en son for intérieur qu’il se moquait certainement d’elle.

 Sur les conseils d’une amie, elle alla voir un psychanalyste renommé. Il l’écouta patiemment et, à la fin de son histoire, il lui dit posément.

-          Je ne peux rien pour vous, désolé.

Excédée par sa réponse, elle s’entendit lui riposter avec une aisance désarmante.

-          You’re a fucking ass hole* !

A partir de ce jour-là, elle ne s’exprima plus qu’en anglais et rien ne put la faire changer de langue. Son mari, qui ne comprenait ni ne parlait l’anglais, la quitta ; et son patron, dont l’entreprise exportait essentiellement vers l’Europe du Sud, la licencia. Ce départ et ce licenciement ne semblèrent pas l’affecter outre mesure, c’était comme si on la débarrassait de vêtements trop étroits.

Un mois plus tard, elle partait pour New York avec pour tout bagage, un minuscule sac à main…

 

* Vous êtes un foutu connard ( traduction approximative )

29 août 2017

Les guetteurs

20170811_132805Afin de réduire le nombre de vols, la municipalité avait mis en place des chiens guetteurs. Le maire avait su convaincre ses concitoyens avec des arguments de poids : les chiens travaillaient sans être rémunérés et, avantage non négligeable, ils dispensaient de l’affection.

Les volontaires avaient donc eu droit à un chien dont la pension était payée par la mairie.

Si le nombre de vols avait légèrement baissé, l’atmosphère dans la ville était beaucoup  plus conviviale et ce, pour une raison très simple : chaque habitant avait chez lui un bouc émissaire de choix et fichait ainsi une paix royal à son voisin !

 

PS : photo prise dans le Perche.

27 août 2017

Le dernier voyage

Lui voyageait léger, elle voyageait lourd. Il avait un petit sac à dos, elle une grosse valise à roulettes. Son sac à dos était marron, sa valise était rouge.

La dernière fois qu’ils sont partis ensemble, sa valise était si grosse qu’elle passait difficilement dans la travée centrale. Forcément, il devait l’aider. Forcément, il s’exécutait en maugréant.

L’apogée du voyage, ce fut lorsque l’une des roulettes du coffre rouge qu’elle appelait valise s’est cassée. Il a fait quatre wagons, suant, soufflant, vérifiant que l’infâme valise rouge n’accrochait personne au passage. Une fois devant leurs places, il lui a dit.

-          Ta valise me fait chier mais toi aussi tu me fais chier. Pars toute seule, moi je descends.

Et il est descendu rapidement du train, esquivant ainsi les reproches qui allaient fuser.

Dès qu’il a eu mis pied à terre, le chef de gare sifflait le départ. Il allait enfin pouvoir voyager tranquillement…

25 août 2017

Le libraire

Hier, j’ai acheté un livre. L’homme qui m’a servi était chauve, jusque-là rien que de très normal. Par contre, lorsqu’il s’est penché pour emballer mon livre, j’ai vu le sommet de son crâne et là, comme c’est étrange, j’ai été prise d’une irrépressible envie de passer ma main sur ce crâne si lisse et qui semblait si doux. Je sais combien cela pourra vous sembler incongru, mais je l’ai fait. Le libraire s’est laissé faire et m’a dit.

-          Continuez si ça vous fait du bien.

 

19 août 2017

Le départ

Il avait grandi trop vite.  Ce n'était plus cette  boule de poils qui les avaient séduits. En cinq mois l'animal avait fini par avoir tous les défauts du monde.

 Au début, lui et sa femme avaient  bien essayé " Couché ! Assis ! Debout ! La patte ! Pas sauter ! " ; et puis ils en avaient eu marre, le chien était trop bête. Sa femme avait même dit.

 - Il m'emmerde ce chien. Si c'est comme ça, il vaudrait mieux… et elle avait laissé sa phrase en suspens.

 Maintenant, dès que la bête arrivait dans la pièce les enfants hurlaient, c'était devenu intenable. La seule façon d'avoir la paix c'était de lui interdire la maison.

 Et puis un jour le père prit sa décision. Il emmena l'animal. Les enfants entendirent les aboiements du chien, puis plus rien, le père avait dû le mettre dans le coffre. La voiture démarra et chacun retourna à ses occupations.

Quand le père revint deux heures plus tard, seul, personne ne lui posa de questions, et la vie reprit son cours.

 

PS : prochain texte le 25 août.

17 août 2017

Curiosité

Voici un texte de  Gilda - une amie brésilienne de Belo Horizonte -  traduit en français par mes bons soins.

 

Une femme meurt. En arrivant au ciel, Elle est durement rappelée à l'ordre.

- Tu ne devrais pas être ici ! Tu es arrivée avant que ton heure ne soit venue.

- Ce n'est pas de ma faute, répond-elle.

- Ah bon, ce n'est pas de ta faute ? C'est de la faute  de ta curiosité peut-être ?

- Bon, c'est vrai, c'est de ma faute, j'ai traversé la rue alors que je lisais un message reçu sur mon portable.

- Mais pourquoi n'as-tu pas lu le premier message que tu as reçu ?

- Parce que le deuxième était beaucoup plus intéressant. Il annonçait : comment vous débarrasser rapidement de votre belle-mère.

- Peux-tu lire ton premier message ?

- Impossible, mon portable est resté sur terre.

- Voici ce qu'il disait : message d'utilité publique. Attention avant de traverser la rue, il faut regarder des deux côtés !

 

 

 PS :

 

 

15 août 2017

Conflit

Il faisait partie de ces hommes qui pensaient que si l’on ne parlait pas d’une chose, elle n’existait  pas.

Elle faisait partie de ces femmes qui pensaient que si l’on s’obstinait à ne pas parler d'une chose, c'était du déni.

Dès lors, pouvaient-ils s’entendre ?

 

 

10 août 2017

Le boucher

M. Mouton était établi depuis vingt-cinq ans comme boucher à St Jean Pied de Port et il travaillait la viande sous toutes les coutures. La bavette, le paleron, l’araignée,  le jarret, les jambonneaux, les filets, les plats de côte, les gigots et les côtelettes étaient toute sa vie mais, depuis quelques mois, l’enthousiasme n’était plus au rendez-vous ; la viande le rendait morose et il ne pouvait plus avaler un seul morceau de chair cuisinée.

Il avait même fini par devenir végétarien, au grand désespoir de sa femme qui tenait la caisse de la « Boucherie Moderne »  depuis dix-neuf ans. Madame Mouton faisait des pieds et des mains  pour que l’étrange goût de son mari pour les végétaux et les fruits soit gardé dans le plus grand secret. Car, qui peut imaginer qu’une clientèle – aussi fidèle soit-elle -  continue à se fournir en viande auprès d’un boucher végétarien ?

 

PS : prochain texte le 15 aout.

3 août 2017

Les lettres anonymes

Elle n’avait qu’une passion : les lettres anonymes. Elle suscitait les confidences des élèves,  brodait patiemment le canevas de chaque histoire,  puis elle envoyait une lettre aux collègues qu'elles détestait secrètement.

Cette année il n’y  avait eu que 3 lettres mais malgré leur petit nombre,  la méfiance avait été à son apogée dans l’établissement.

Elle se félicitait d'avoir fait disparaître  de son quotidien un vide sidéral,  mais elle devait constamment se surveiller car sa jouissance était telle qu'elle craignait de se trahir...

 

PS : prochain texte, le 10 aout.

 

1 août 2017

Le Vaccin

La veille, il s’était fait vacciner contre sa mère ; ce vaccin avait été mis au point l’année passée aux Etats-Unis par un chercheur qui - disait l’article qu’il avait lu dans le Guardian -  avait le mal de mère.

Le lendemain du vaccin, il subit une réaction violente, si violente qu’il se fit porter pâle au travail et passa la journée au lit. Le surlendemain, sa mère l’appela.

-          Tiens, tu ne m’as pas appelée hier.

-          Non, j’étais malade.

-          De quoi ?

-          Une réaction à un vaccin.

-          Un vaccin ? A ton âge ?

-          Il n’y a pas d’âge pour les vaccins.

-          Contre quoi tu t’es fait vacciner ?

Il éluda mais sa mère ne l’entendit pas de cette oreille et chercha à savoir. Le vaccin devait déjà commencer à faire effet car il lui cloua magistralement le bec et lui raccrocha au nez.

Presquevoix...
Newsletter
8 abonnés