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Presquevoix...

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14 décembre 2006

La folie d'Odette. 2

- Ca va Madame, je vous ai fait mal ? demande la jeune fille

- Ca va, ça va, mais j’ai eu si peur de tomber, vous savez à mon âge, une chute cela ne pardonne pas.

Elle lève les yeux et rencontre deux billes noires qui la scrutent de façon intense.

- Vous vous sentez bien, vous voulez que je vous raccompagne, vous habitez loin ?

Alors qu’elle songe à refuser cette aide, elle se met à regarder d’un peu plus près cette jeune personne qui lui fait face. Seize ans, dix-huit, difficile à dire, grande, les cheveux frisés de couleur châtain, tirés en arrière et arrangés à la va-vite avec une grosse pince, un visage rond avec des tâches de rousseur, habillée d’un gros pull, d’un pantalon qui traîne sur le macadam, de baskets qui ont dû être blanches une fois et d’un gros sac en crochet qui lui barre la poitrine.

- Dites Madame, vous allez bien, vous êtes toute pâle ?

Odette s’apprête à la rassurer mais quelque chose l’arrête. Cette jeune dégage un étrange sentiment en elle, elle semble si triste qu’instinctivement la vieille dame sent ses capteurs émotionnels l’avertir de quelque chose. Elle ne sait pas quoi mais il y a quelque chose. Elle décide d’en avoir le cœur net, d’y mettre son nez, après tout elle a tout son temps.

- Vous vous appelez comment ?

Un peu surprise, la jeune fille répond.

- Kalinka

- C’est un prénom original, je ne l’ai jamais entendu.

- Il est d’origine slave, je l’ai hérité de mon arrière grand-mère.

- Cela veut-il dire que vous êtes d’ailleurs, d’un autre pays ?

La jeune fille ne répond pas. Elle se contente de regarder cette dame qui lui pose des questions personnelles au milieu d’un trottoir. Elle aimerait continuer son chemin mais elle hésite à la laisser sans s’être assurée que tout va bien. Odette sent la retenue que ses questions ont provoquée, change de tactique et demande :

- Ce serait gentil à vous de me raccompagner chez moi, je me sens encore un peu chancelante, cela ne vous dérange pas, je n’habite pas très loin ?

Kalinka n’hésite pas longtemps, ramasse le sac de courses toujours à terre, prend Odette par le bras et questionne.

- C’est où chez vous ?

- Au numéro 28, le petit immeuble là-bas jaune aux volets gris. J’habite au deuxième, sans ascenseur.

- Cela ne vous dérange pas les escaliers, à votre âge…

La jeune fille se mord la langue. Ce n’est pas poli de rappeler son âge à une personne adulte, sa mère le lui a déjà dit plus d’une fois mais elle est de nature spontanée et cela lui a échappé. Odette émet un petit gloussement et répond.

- Monter les escaliers entretient ma forme j’adore marcher et je fais une heure de promenade par jour. C’est bon pour la santé. De plus je rencontre des gens sympas et parfois même adorables comme vous, dit-elle d’un air malicieux.

Kalinka ne répond rien. Elles continuent leur chemin et arrivent assez vite devant l’immeuble d’Odette. Celle-ci sent que la jeune fille aimerait maintenant s’en aller, sa bonne action terminée mais elle n’a pas envie de la laisser partir.

- Montez avec moi, je vais vous donner une plaque de chocolat pour vous remercier.

- Oh ! mais cela n’est pas nécessaire, Madame.

- Si,si, j’insiste, allez, venez et comme cela vous déposerez mon sac qui est un peu lourd pour moi, argumente Odette qui ne se gêne pas de raconter un petit mensonge !

Refuser quelque chose à une vieille dame quand on est une jeune fille un peu timide n’est pas aisé et Kalinka n’ose pas décliner l’invitation. Elle suit un peu à contrecoeur son interlocutrice. Arrivée sur le palier, elle tente à nouveau de quitter la vieille dame en argumentant que c’est dangereux d’introduire des personnes qu’on ne connaît pas, qu’il y a plein d’histoires sur des personnes âgées qui ont été détroussées, etc. Odette se retourne, la regarde intensément et lui dit.

- Je suis entièrement d’accord avec vous, ma petite mais si j’insiste c’est que j’ai eu le sentiment bizarre et inexpliqué que vous alliez faire une bêtise et que je devais vous aider.

13 décembre 2006

Sommes-nous égaux ?

En tant que professeur, lorsque je participe à des formations loin de chez moi, mes frais d’hôtel me sont remboursés sur la base de 38 euros par nuit. Pour quoi ne pas adopter la même rigueur  - signe fort qui illustrerait le mot « Egalité » de notre belle devise républicaine -  pour nos ministres ?

Ainsi, Monsieur Douste Blazy et son aréopage de 30 personnes, en visite à New Dehli, au lieu de dépenser  - aux frais du contribuable français – 350 euros* par chambre au Taj Mahal, aurait pu être avantageusement logé (l’Inde est un pays bon marché) dans un petit hôtel de bonne tenue et sympathique, pour la modique somme de 38 euros par chambre.

Si je fais le calcul, 350 euros auxquels je retire 38 euros, j’obtiens l’économie de 312 euros par chambre. Imaginons qu’il y avait 30 chambres, la somme totale est donc de 9360 euros. Voilà quel aurait pu être le montant de l’économie réalisé par l’Etat français, sans parler des 275 000 euros* de  location de l’avion privé…

Pour conclure, je dirai simplement que je croirai – et je ne dois pas être la seule – en notre Président, en nos ministres et secrétaires d’état, en nos députés et sénateurs, lorsqu’ils leur sera réservé le même traitement, ou presque, que le fonctionnaire lambda. Je pense que c’est un service qui leur sera rendu et qui évitera de les encourager à confondre leur fonction et les avantages qu’elle leur procure !

* sources : Canard enchaîné, 13 décembre 2006

10 décembre 2006

Et si je tombais sur moi ?

Et si je tombais sur moi ? Je crois que je me dirais « Merde, pas moi ! Encore ! » Evidemment je ne suis pas tout à fait sûre de ce que je dirais, parce que je ne suis encore jamais tombée sur moi.

Il faut dire que je pars du présupposé que, si je tombais sur moi, je me reconnaîtrais ! Ça pourrait donner quelque chose comme :

- Ah, c’est moi !

- Oui c’est moi ! 

- Quoi de neuf !

- Ben… rien, tu le sais bien !

etc… etc… etc…

Le genre de dialogue qui donne surtout envie de se fuir ! Il y en a peut-être qui se surprennent, mais moi en 40 et quelques années - je ne mets pas l’unité dans le seul but de me ménager une surprise -  je pense que, si je tombais sur moi, je me reconnaîtrais au premier coup d’œil, et pour cause, je suis de celles que personne ne remarque, sauf moi !

Je pourrais aussi tomber sur moi et commencer à m’écouter. C’est vrai qu’on réserve souvent l’écoute aux autres et rarement à soi-même. Pourquoi ? Sans doute parce qu’il est plus facile d’accorder aux autres ce que l’on ne s’accorde pas à soi-même ! Je pourrais donc tomber sur moi, me reconnaître, me saluer, et commencer une longue conversation avec moi. Ça pourrait donner le petit dialogue suivant :

- C’est moi, tu me reconnais ?

- Comment pourrais-je ne pas te reconnaître ! Et qu’est-ce qui t’amène ?

- Je suis venue te parler de moi !

- Je t’écoute…

- Je ne vais pas bien, je crois que j’ai un problème avec moi, mais je ne t’apprends rien.

- …

- Je suis persuadée que je me fais du tort à moi-même.

- Si je comprends bien, tu crois que tu es une ennemie pour toi. Qu’est-ce qui te fait  croire ça ?

- Il y a des signes qui ne trompent pas… tu le sais bien !

etc… etc… etc… Un peu lassant à force, il faut bien l’avouer !

Je pourrais aussi tomber sur moi et ne pas me reconnaître du tout. Improbable, je sais, surtout au bout de quarante et quelques années…comme je le disais tout à l’heure, mais pourquoi pas ! Un peu comme si je rencontrais une étrangère au détour d’une rue, mais une étrangère qui dirait être moi, alors que moi je soutiendrais le contraire ! Un peu schizophrène, me direz-vous ? Peut être, mais l’Homme  est capable d’actes de déni tellement extraordinaires pour avoir la paix avec lui-même ! On pourrait imaginer la rencontre suivante :

- Ça par exemple, hep attends, attends, mais attends je te dis, ne pars pas !

- Qu’est-ce que vous me voulez ?

- Tu ne vas pas me faire croire que tu ne me connais pas ?

- Cessez de m’importuner, je suis pressée !

- Tu te moques de moi ou de toi ?

- Madame, je vous dis que je ne vous connais pas, pourquoi vous mentirais-je ?

- Quel aplomb ! Ne me dis pas que tu m’ignores ?

- Je ne comprends rien à ce que vous me dites !

- Mais enfin, toi et moi, c’est la même chose !

- Qu’est-ce que vous me chantez là ? Vous devriez aller vous faire soigner !

- Tout de suite les grands mots, je te reconnais bien là ! Je peux te dire que si je me fais soigner, on sera deux !

- Vous m’emmerdez !

La chute est un peu définitive, mais probable. Ce moi ne veut assurément pas se reconnaître et va très vite tomber malade ; de la chair à antidépresseurs ou je ne m’y connais pas !

Et voilà… trois petits tours de manège du moi et puis s’en vont… Et si je tombais vraiment sur moi ?

10 décembre 2006

méditation pour la nuit

"J’écris non pour dire ce que je pense , mais pour le savoir."

(Emmanuel Berl)

9 décembre 2006

Tu fais quoi pour les fêtes ?

« Et toi, qu’est-ce que tu fais pour les fêtes ? » Question banale, mais dangereuse, surtout quand on ne fait rien ! Alors, on s’invente des fêtes qui nourrissent  notre désespoir…

8 décembre 2006

Ma seule réponse fut le claquement dont j'accompagnai mon départ

« Ma seule réponse fut le claquement de porte dont j'accompagnai mon départ… » Elle se dit que cette petite phrase était intéressante, mais que le passé simple ligotait désespérément son inspiration. Et il n’y avait  pas moyen de le contourner... un temps qui faisait tout pour vous empêcher de vous exprimer… mais pourquoi le professeur leur avait-elle donné cette phrase ? Prise d’une soudaine fièvre revendicative, elle décida de se libérer de la contrainte ! Ce qu’elle voulait, elle, c’était se raconter, mais avec ce passé simple, c’était impossible, il faisait tout pour qu’elle ne puisse pas se dire. « Je  vais quand même pas commencer à me mettre des barrières moi-même » se défendit-elle ! Elle dut convenir, pourtant, que ce n’était pas exactement d’elle qu’elle voulait parler, mais de sa mère… « Elle peut crever, elle peut crever, mais elle  m’obligera plus à faire ce qu’elle veut ! ».

Elle se demandait pourquoi sa mère lui défendait de voir ce garçon, était-elle jalouse ? Le départ de son père, deux ans plus tôt, remplacé in extremis par un « frustré »,  qui venait  voir sa mère   deux fois par semaine, les jours où sa femme était de service de nuit à l’hôpital, la laissait pensive...

Et si elle allait vivre chez son père ?  D’ailleurs, si sa mère continuait à la harceler, elle lui claquerait la porte au nez, Vlan ! Comme ça elle comprendrait ! Avec sa bonne conscience dégoulinante, elle pensait avoir fait le maximum,  mais c’était quoi le maximum ? Si sa mère avait su ce qu’elle se moquait de ce garçon, elle aurait certainement laissé tomber l’affaire… Elle en arrivait même à se demander si elle ne continuait pas à sortir avec lui pour l’ennuyer ! « Elle m’étouffe et c’est encore moi qui devrais céder ? » Rugit-elle au désespoir. Elle pensa soudain à son père, comme à un sauveur, mais le visage de sa belle-mère, une  jeune femme pimpante qui jouait à sa mère, l’obligeant à ramasser les affaires qui traînaient dans sa chambre sous prétexte qu’elle couchait avec son père, se superposa immédiatement au sien. Mais quel droit ça lui donnait sur elle de coucher avec son père ! Et lui, le pauvre imbécile, qui se pavanait en chemise rose, pour lui faire plaisir, parce qu’elle lui disait que ça faisait jeune ! Mais est-ce qu’il se regardait dans la glace ? Croyait-il donc vraiment qu’il paraissait quarante ans alors que son visage accusait la fatigue des 50 qu’il avait d’ailleurs dépassés ?

En tout cas, ce qui était sûr, c’est qu’elle n’avait pas avancé d’un iota avec son  passé simple  ! Il n’a pas sa place ici, s’obstina-t-elle, je ne peux pas me raconter à cause de lui, il me barre mon passé ! Et si elle changeait la phrase  de début, en expliquant au professeur qu’elle n’avait pas pu, tout simplement ! Elle pourrait commencer par… « Ma seule réponse a été de claquer la porte » … ou, dernière possibilité, Elle mettrait la phrase intégrale, mais alors, elle ne serait plus du tout, mais alors plus du tout, dans l’émotion, mais dans un récit dix neuvième siècle et  l’authenticité en pâtirait, ce ne serait plus elle, mais un narrateur qui se ferait passer pour elle et qui n’aurait rien à voir avec elle.

Après tout, c’était peut-être mieux comme ça, parce que pour les récits autobiographiques, elle sentait bien qu’elle n’avait pas encore la distance suffisante ! En tout cas, autobiographie ou pas, sa mère, dès demain, saurait ce qu’elle pensait d’elle. Et s’il fallait lui claquer la porte au nez pour qu’elle le comprenne, eh bien, elle la  claquerait !

8 décembre 2006

Intervalle

Excusez-moi,

je vais prendre soin

de la virgule des rêves

derrière le courant d’air de la vie.

7 décembre 2006

Le sel...

La vie manque de sel

Quand on la regarde  par le trou de la serrure…

L’œil du témoin reste toujours à la porte du désir !

7 décembre 2006

Une vie réussie

L’autre jour, sur mon vélo, je me demandais quel était le secret d’une vie réussie ; c’est le genre de réflexion thématique qui m’occupe quand je pédale. Il faut dire que je pédale tous les jours pour aller travailler. Parfois, je pédale même au travail, souvent à contre-courant… Donc, à chaque trajet, une nouvelle thématique, et à chaque tour de pédale, un remue-neurones. J’en suis arrivée, après vingt minutes de pédalage - temps habituel du parcours - à la conclusion qu’il n’y avait aucun secret, sinon pédaler, toujours et encore, souvent seule, parfois avec des vents de face, et les mains toujours sur les freins, question de survie !

6 décembre 2006

Se connait-on un jour ?

« Je commence à me connaître. Je n’existe pas. Je suis l’intervalle entre ce que je veux être et ce que les autres ont fait de moi… »

Ces vers de Fernando Pessoa, poète portugais (1888 – 1935), suivent le long cheminement de l’homme qui avance sur des fils de « soie » tendus et perd ses regards entre son désir et le désir des autres…

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