Duo de juillet
Nouveau duo avec Caro du blog lesheuresdecoton. Nous utiliserons dans ce texte, à l'endroit de notre choix, une phrase de Mado :
"Au plus tendre du poignet, à la plume, elle avait signé son envol d'un trait d'encre".
Aujourd'hui, voici mon texte :
Le Mont Fuji
Comment un tel corps pouvait-il exister ? Lourd, lourd, si lourd, que le monde n’avait plus de place pour lui. Elle ouvrit la fenêtre et regarda - tout comme son frère jumeau avait l'habitude de le faire - le ciel où les nuages traçaient des paysages imaginaires.
Au plus tendre du poignet, à la plume, elle avait signé son envol d'un trait d'encre. Puis, le sang avait semé d’infimes gouttes sur le papier blanc qu’elle avait placé à ses pieds et le Mont Fuji était apparu. Elle commencerait l’ascension entre chien et loup et, au sommet, elle contemplerait le ciel étoilé avant de s’endormir.
« Marion, Marion », entendit-elle. Comme souvent, il avait poussé la porte de sa chambre. Ce soir-là, elle n’osa pas le regarder mais elle lui dit.
- Tu sais que tu ne peux pas rester ici, personne ne doit te voir.
Il ne répondit rien.
- Ce soir je fais l’ascension du Mont Fuji. Tu viens ?
Il rit. La même fraîcheur que celle des jours heureux.
- Je n’aime plus les montagnes.
- Tu as peur ? demanda-t-elle.
- Je n’ai plus peur, mais toi tu trembles.
Elle toucha sa peau moite où la peur dessinait un long chemin. Elle n’ignorait pas que pour monter au Mont Fuji elle serait seule ; seule dans la musique blanche de son corps déserté mais lourd, si lourd, qu’elle mettrait longtemps à arriver au sommet…