Duo d'août
Voici mon texte pour ce duo :
Le magicien
On lui avait parlé du magasin de mots dans le rêve qu'elle avait fait la veille : elle discutait avec un ami sur un canapé « toi et moi » rose et, quand minuit avait sonné, il lui avait dit.
- C’est un endroit pour toi. tu verras. Je t’assure que dans ce magasin, ils ont des trucs incroyables : des boîtes à transformer les chagrins, des sacs à soucis, des mots pour avoir la foi, pour rêver… Cours-y vite
Elle se souvint d’avoir souri à la naïveté de ses propos ; comme si les mots pouvaient transformer la grisaille de la dépression en prairies noyées de soleil !
Au réveil, elle avait tout de même cherché sur internet et elle l’avait trouvé. Le magasin existait bel et bien, à Nancy, non loin de la rue « mon désert », là où elle habitait. Comment pouvait-elle ne l’avoir jamais vu ? Sans doute regardait-elle les choses et les êtres aussi distraitement que les objets qu’elle époussetait une fois par mois.
Quand elle poussa la porte du magasin, un son joyeux se fit entendre. Personne à l’intérieur. Elle observa la décoration : des tiroirs aux minuscules inscriptions, des sachets dorés et argentés, des lumières tendres, et des cartes postales aux dessins naïfs. Elle inspecta tous les tiroirs, les uns après les autres et c’est à ce moment que le « Magicien des mots » apparut dans son habit rouge et or. A la main, il tenait un miroir ovale qu’il plaça devant elle.
- Miroir mon beau miroir à mots… lui dit-il en guise d’introduction.
- Je n’aime pas les miroirs.
- Vous avez bien tort, gentille madame, les miroirs à mots reflètent notre âme.
- Mon âme est noire comme le charbon.
- Détrompez-vous, et en matière d’âmes, je m’y connais. Vous avez juste l'âme un peu grise, comme tous ceux que l’on a abandonnés. Voulez-vous une pépite de rêve directement importée de votre enfance ou un mot magique qui vous fera obtenir tout ce que vous voulez ?
- Un mot magique.
Il lui tendit la boîte et lui demanda de prendre un mot au hasard.
- Alors ?
- « Les beaux mots cœur »
- Soufflez sur le mot et donnez-le-moi.
Il prit le mot que son souffle avait bercé, il le plaça sur son cœur puis sur celui de la jeune femme. Elle sentit une onde de chaleur sur sa peau glacée. Ensuite, il mit le miroir à mots devant elle mais cette fois, elle ne protesta pas.
- Alors ?
- Je ne me reconnais pas.
- C’est bien ce que je pensais. Qui croit se connaître ne se connait pas. Saviez-vous que les mots tissent des étoffes pour guérir nos blessures ?
Elle resta silencieuse.
Avant son départ, il lui donna une petite boîte entourée d'un ruban bleu.
- Un cadeau à n’ouvrir qu’en arrivant chez vous. Au revoir petite madame.
Une fois chez elle, la précieuse boîte fut ouverte et ce qu’elle lut au cœur du tissu de soie rouge la fit pleurer : « graine d’estime de toi : pour te permettre de faire grandir ce qu’il y a de beau en toi. »