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Presquevoix...

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22 mai 2007

Combien ai-je encore de dents à vivre ?

- Merde, il y a un truc qui est parti !
- Parti d’où ?
Elle ne lui répond pas et continue à mâcher lentement, attentive aux aliments broyés par ses dents. Tout son être se concentre sur l’infiniment petit.
Elle sent sous sa langue un  noyau dur, le voilà ! – « Putain, mon plombage ! »-
Ses doigts extirpent prestement l’objet inattendu de sa bouche et le ramène discrètement sous la table pendant que sa langue cherche le trou béant que l’absence de plombage a creusé. Son mari l’interroge machinalement.
- Alors ?
- Quoi alors, qu’est-ce que tu veux que je te dise de plus, c’est mon plombage !
- Ben c’est pas grave !
- Forcément, c’est pas le tien ! Si c’était le tien, tu dirais pas la même chose.
- Qu’est-ce que tu en sais ?
- Je te connais.
- N’en fais pas tout un plat !

Elle le regarde méchamment. Comment peut-il lui dire que ce n’est pas grave alors qu’un autre morceau de plombage vient de céder et que maintenant elle sent distinctement sa gencive déserte là où, quelques minutes plus tôt, il y avait encore une illusion de dent. Un nouveau goût commence à envahir sa bouche, lentement, celui du sang. La gencive irritée laisse éclater sa douleur. Il faut absolument que sa bouche soit rincée. Elle se lève précipitamment.
- Tu vas où ?
Elle ne lui répond même pas. S’il la comprenait il saurait où elle va : dans la salle de bain pour soigner sa béance ! Elle entend une dernière fois la voix de son mari qui scande – Tu pourrais me répondre quand même ! – mais après avoir fermé la porte à clef, elle n’entend plus que le bruit de sa propre respiration.
Son visage décomposé se dessine tristement dans la glace. Une fois le robinet ouvert, elle engloutit une gorgée d’eau, la fait rouler dans sa gorge puis la recrache : le liquide rouge tournoie dans le fond du lavabo. Elle ferme l’écoulement de l’eau, recommence l’opération, crache à nouveau, mais  toujours le même liquide rougeâtre où elle voit se concentrer des débris de plombage qui stagnent à la superficie. Atterrée, elle se passe à nouveau la langue à l’endroit où autrefois une dent faisait semblant de vivre, et toujours cette gencive presque lisse où survivent quelques aspérités de la défunte ; une gencive d’octogénaire !
- Merde !
La voix de son mari résonne à travers la porte.
- Ca va ?
- J’ai plus de dent ! Tout est parti, gémit-elle.
- Eh bien tu iras chez le dentiste !
- J’ai tout perdu, tout je te dis, tout le plombage !
- C’est pas une dent de devant ?
- Non.
- Ben alors ça va !

Il lui demande si elle a l’intention de rester toute l’après midi enfermée dans la salle de bain, mais elle ne répond pas. Pourquoi elle ? Tout fout le camp, une dent pour commencer, puis une autre demain, chaque trou laissant apparaître la nudité de sa gencive, sans que rien ne puisse l’habiller à nouveau, la tragédie d’une bouche où rien ne pourra plus jamais renaître, une bouche habitée par la mort.

- C’est pas juste ! hurle-t-elle.

Rien n’est juste ! C’est pourtant le discours qu’elle tient à sa fille, et elle en fait les frais aujourd’hui. La vie est injuste ! Elle fixe à nouveau son visage devant la glace et ses traits lui semblent difformes. Maintenant, quand elle ouvrira la bouche pour parler, tout le monde verra  la dent manquante, on ne verra que ça, tout le monde sera dégoûté, on ne la regardera plus, on l’appellera   l’édentée en catimini, et on chuchotera derrière son dos qu’elle a pris un sacré coup de vieux, un coup terrible,  d’ailleurs, t’as vu,  elle perd même ses dents ! Rajoutera-t-on en douce. Et si la mort l’avait choisie, elle, pour construire son œuvre funèbre, tout de suite ? Cette mort qui lui dit que bientôt, elle ne sera plus une femme ;  elle sera vieille,  neutre, c’est tout !
Elle s’aperçoit soudain qu’elle est recroquevillée contre la baignoire, le visage en appui sur le rebord. Effrayée, elle se redresse immédiatement et se replace devant la glace, bouche ouverte, son index fébrile tâtant le trou du fond.
- Il faut que je téléphone au dentiste, voilà ce que je dois faire, c’est quand même pas sorcier ! Voilà ce que je dois faire et je vais le faire maintenant !
La porte de la salle de bain s’ouvre en grand et elle en sort en hâte, le visage livide. Son mari la regarde interloqué sur le seuil de la chambre.
- Ca va ?
- Tu as d’autres questions aussi connes que ça encore ? Non ça ne va pas et ça n’ira  plus jamais comme avant, tout ça à cause de cette foutue dent à la con ! Peut-être que le dentiste, lui, pourra quelque chose pour moi. J’aurais dû épouser un dentiste, tiens  !

21 mai 2007

Qui domestique qui ?

Je ne voue aucune amitié particulière aux animaux domestiques.  J’ai même envie de mordre  lorsque je vois  des propriétaires laisser leurs chiens se vider sur les trottoirs et pelouses de mon quartier. La bête déclenche… la bête en moi ! Si mes dents n’étaient pas ce qu’elles sont – hélas ! - j’aurais déjà attaqué les mollets des propriétaires de chien, et notre journal local,  Paris Normandie, m’aurait certainement déjà consacré sa Une avec ce titre  :  « Expédition punitive d’une croqueuse de mollets…».
Et les chats, me direz-vous ? Ils sont plus discrets les chats, on dirait même qu’ils pratiquent l’invisibilité – mis à part dans les jardins où leurs passages ne manquent pas de se faire sentir…
J’ai lu dans le Nouvel Observateur cet article de Frédéric Vitoux qui va certainement ravir les propriétaires de chats… « Il est l’animal domestique par excellence, c’est-à-dire le seul qui ait réussi à domestiquer l’homme et non le contraire, et d’un autre côté, il incarne la vie sauvage à l’état pur. Ce qu’a si joliment souligné Alexandre Vialatte, disant de lui : « Dieu l’a fait dans Sa grande bonté pour que l’homme puisse caresser le tigre. »… »

20 mai 2007

C’est pour ton bien !

"C'est pour ton bien",  de Alice Miller, devrait sans nul doute être lu et relu par tous les parents et  éducateurs, et même par notre Président de la République, lui qui se targue d’éduquer tous les élèves avec la lettre d’adieu de Guy Môquet*… L’extrait de ce livre que je vous propose ci-dessous, pose le problème de l’éducation et de ce qui la sous-tend. Sommes-nous conscients que nos conseils pour l’éducation des enfants trahissent souvent nos besoins d’adultes ?
« Parmi ces besoins, il faut compter : premièrement, le besoin inconscient de reporter sur un autre les humiliations que l’on a soi-même subies dans le passé ; deuxièmement, le besoin de trouver un exutoire aux affects refoulés ; et troisièmement, celui de posséder un objet vivant disponible et manipulable ; quatrièmement, celui de conserver sa propre défense, c’est à dire de préserver l’idéalisation de sa propre enfance et de ses propres parents, dans la mesure où la valeur de ses propres principes d’éducation doit confirmer celle des principes parentaux ; cinquièmement la peur de la liberté ; sixièmement, la peur de la réémergence du refoulé que l’on retrouve chez son propre enfant et qu’il faut à nouveau combattre chez lui, après l’avoir tué en soi, septièmement et pour finir, la vengeance pour les souffrances endurées… »

* http://abonnes.lemonde.fr/web/article/0,1-0@2-823448,36-911007,0.html

19 mai 2007

La culpabilité

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17 mai 2007

L’Humanité comme un baume…

M. Jacques Chaline, paléontologue  s’est penché sur l’évolution probable de l’homme et nous dit que celui-ci devient de plus en plus grand, que son petit orteil risque de disparaître avec le temps  et que ses mâchoires rétrécissent de plus en plus. Ces évolutions, l’air de rien, m’obligent à repenser la place de mes contemporains, et la mienne a fortiori, dans le contexte de notre Humanité (entendue à partir de l’apparition de l’homme sur terre) qui existe depuis quelques deux millions et demi d’années !
Finalement, tout bien considéré – et cela m’apaise - l’accès de M. Sarkozy à la Présidence de la République n’est qu’un tout petit accident de « rien du tout », un ongle incarné que l’Humanité oubliera rapidement …même si M. Sarkozy se plaît à faire la roue dans  le parc de l’Elysée…! Vanité, tout est vanité…

16 mai 2007

Le fanatisme serait-il le symptôme d'une quête de la virilité qui ne peut aboutir ?

Dans un article publié il y a assez longtemps dans le Nouvel Observateur, Catherine David analysait le problème du fanatisme sous l’angle de la psychanalyse et paraphrasait la citation de Simone de Beauvoir en disant : « On ne naît pas homme on le devient ». Selon elle, la virilité, comme la féminité, n’est pas donné mais c’est une conquête et « l’homme maudit le désir que les femmes lui inspirent. Pourquoi ? Parce qu’il ne le contrôle pas. »
Elle rappelle que le fanatique n’a pas besoin de Dieu, mais d’un héros, d’un chef de meute. Quelle obscure servitude l’homme porte-t-il en lui pour  remettre ainsi sa liberté – de façon aveugle - entre les mains d’un chef qui le guidera jusqu’à la mort, parfois ?
C. David souligne que la méfiance à l’égard des femmes est la chose au monde la mieux partagée. Elle nous en donne un exemple – parmi les multiples exemples qui auraient pu être choisis - avec la prière du matin que se répètent les juifs orthodoxes : « Je te remercie, mon Dieu, de ne pas m’avoir fait naître femme. » et remarque que, de Freud à Lacan, la psychanalyse n’a fait que participer au renforcement de la prééminence masculine ( ce fameux désir de phallus qu’auraient les femmes…).
Le monde serait donc, entre autres, malade de l’homme (avec un petit h), obsédé par son déni de la femme.

Quant à moi, une chose me semble presque certaine : la foi ne guérira  l’homme ni de son impuissance, ni de ses frustrations sexuelles mais elle pourra, par contre, les conforter, voire les attiser.

14 mai 2007

Un homme libre, qu’est-ce que c’est ?

Dans un  texte sobre, publié sur le site http://www.inventaire-invention.com/textes/kaplan_hommelibre.htm,                Leslie Kaplan énumère les actes d’hommes et de femmes qui ont su faire vivre le mot liberté. Dans leurs cas, la liberté ne s’est pas payée de mots, mais s’est traduite en actes. En voici quelques extraits :

«C'est Fritz Lang qui part pour Paris le 20 juillet 1933 en sortant du bureau de Goebbels qui vient de lui offrir la direction du cinéma allemand (…)

C'est un paysan du Chambon-sur-Lignon, il y en a eu beaucoup, qui a caché un enfant juif pendant la guerre sans même se poser la question ;

  C’est un ouvrier préposé à la chaufferie à qui son chef demande d’augmenter le rythme et qui refuse, s’en va, et ne remet plus jamais les pieds dans une usine (…)

C’est Charles Cahplin qui dans chacun de ses gags va à l’encontre de la réalité opprimante, l’usine, la prison, la misère, et par dessus-tout, la bêtise, la bêtise, la bêtise (…)

C’est Hannah Arendt qui écrit Eichmann à Jérusalem et qui montre que la banalité du mal ce n’est pas que le mal est banal mais qu’il peut-être le fait de personnes complètement banales (…) »

12 mai 2007

Faut-il créer une bibliothèque vivante ?

J’ai lu un article à ce sujet il y a assez longtemps, dans libération, cela se passait à Malmö, en Suède, mais pourquoi ne pas reprendre le concept en France ? L’idée étant de créer une bibliothèque vivante afin de combattre les nombreux préjugés qui nous empêchent de vivre ensemble. On pourrait imaginer que cette bibliothèque tiendrait à la disposition de chacun une liste de personnes appartenant à  des catégories sociales « stigmatisées » dans notre société. Le livre deviendrait ainsi une « matière » vivante que nous pourrions interroger.
Il faut bien reconnaître que notre société est tellement cloisonnée que nous rencontrons souvent des gens qui font le même métier que nous et nous ressemblent étrangement… On pourrait imaginer que dans cette bibliothèque vivante, il y aurait un cheminot, un syndicaliste, un ouvrier, un cadre, un enseignant,   un grand patron, un petite patron, un chômeur, un RMISTE, un catholique, un musulman, un protestant, un athée, un aveugle, un paralysé, un sourd, un muet, une lesbienne, un homosexuel, des travailleurs immigrés originaires de pays différents… cette liste n’est bien sûr pas exhaustive.
Ces rencontres permettraient peut-être de mieux nous comprendre et d’éviter ainsi de nous laisser porter par les représentations réductrices que les principaux médias – au service du pouvoir en place - véhiculent.
Il est de notre devoir de lutter contre des représentations qui ne servent qu’à nous élever les uns contre les autres.

11 mai 2007

Travailler plus pour mourir plus vite ?

Je viens de comprendre comment cette formule magique « travailler plus pour gagner plus » règlera le problème de la dette publique ! Si les gens travaillent plus, ils vont être plus fatigués, donc ils tomberont plus souvent malades et forcément,  ils mourront beaucoup plus tôt – on sait que l’espérance de vie des ouvriers est environ de 6 ans inférieure à l’espérance de vie des cadres -, sans jamais pouvoir profiter de leur retraite, alors toutes ces retraites, eh bien, elles ne seront plus à distribuer, à part quelques pensions de reversions ici et là…
Voilà, le tour est joué ! C’est tout bénéfice pour l’Etat, mais aussi pour les chefs d’entreprise* parce que quand les gens travaillent plus en faisant des heures supplémentaires, les employeurs sont eux exonérés de charges patronales. Ce sont les mesures promises par M. Sarkozy, et finalement, les 35 heures non supprimées - mais tant décriées par M. Sarkozy - sont tout bénefice pour les entreprises !
Je vous l’accorde, cette explication est un peu cynique, mais les hommes politiques ne le sont-ils pas ? Monsieur Pasqua disait, paraît-il (c’est ce que j’ai appris dans l’excellent documentaire de Serge Moati sur la campagne électorale 2007) : « Les promesses des hommes politiques rendent les couillons heureux. »

* Il faut savoir que M. Sarkozy a comme réseau d’amis, la moitié des patrons du CAC 40. Citons ceux qui ont eu le plaisir de le congratuler et ont participé à sa petite fête au Fouquet’s : Bouygues ( TFI, telecom, travaux publics), Vincent Bolloré ( Havas, Direct TV, institut de sondages CSA, le même qui a prêté son petit youyou de 60 mètres à Nicolas Sarkozy ), Alain Minc, François Pinault, milliardaire ( Printemps, Redoute, Fnac, le Point…), Dominique Desseigne ( Président du Groupe Lucien Barrière qui compte 39 casinos en France et en Europe, 16 hôtels de luxe et plus de 80 restaurants, dont le célèbre Fouquet's à Paris ), Arnaud Lagardère (EADS, PDG de Lagardère Média : Hachette, Elle, Paris Match, télé 7 jours, Les Nouvelles Messageries de la Presse Parisienne, Europe I, Europe 2, RFM, Canal J…  ). La présidente du MEDEF l’a également chaleureusement félicité de sa victoire en lui adressant le message suivant : « Nous nous engageons à contribuer avec responsabilité et enthousiasme à l’écriture de la nouvelle page qui s’ouvre pour la France. »

10 mai 2007

Bientôt, vous aussi vous serez peut-être fiché génétiquement !

Le 19 mars 2003, à la demande de notre ancien ministre de l’intérieur M. Sarkozy,  la loi de sécurité intérieure a étendu le champ d’application du « FNAEG »( Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiquques : http://wwww.interieur.gouv.fr/sections/a_votre_service/aide_aux_victimes/fiche-fnaeg) à la quasi-totalité des crimes et délits d’atteintes aux personnes et aux biens…
Un merveilleux sentiment de sécurité va s’installer en France à partir du 16 mai, car on ne peut douter que le nouveau Président de la République ne mette maintenant, pleinement en œuvre, ces outils efficaces au service de la   « société de l’ordre », qu’il révère.
Il y a quelques jours, en France, deux enfants de 8 ans et 11 ans ont échappé de justesse à ce fichage génétique*, après le vol de deux tamagoshi et de deux balles rebondissantes – payés ensuite par leur mère – dans un supermarché.
Le journal Libération du 8 mai rapporte les propos du Vice-président du Tribunal de Grande instance de Bordeaux à propos des effets du fichage sur les enfants : « Un enfant fiché risque de le traîner pendant 40 ans, soit la durée autorisée pour la conservation des ADN. Il risque aussi de ne pas pouvoir accéder à la fonction publique ou à certains autres métiers ». L’existence de cet arsenal de mesures répressives paraît digne du « Meilleur des mondes » !
Contrairement à ce qu’il a souligné lors du débat qui l’opposait à Mme Royal, M. Sarkozy sera certainement dans l’obligation de remplacer tous les fonctionnaires qui partent à la retraite car, pour gérer ce fichier qui, en cinq ans, risque de prendre des proportions inquiétantes… il faudra bien du personnel !

* Il est regrettable, cependant, de constater, qu’un certain haut "irresponsable" de l’Etat, deviendra bientôt un vénérable retraité, sans être jamais jugé pour ses malversations… et donc bien sûr, jamais fiché… Deux poids, deux mesures dans notre institution judiciaire soit disant indépendante du pouvoir exécutif !

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