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19 avril 2020

La mercerie

 

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Il tenait la mercerie "idées à coudre". Mercerie tenue d’abord par son père, puis par sa mère – elle était couturière à domicile  - à la mort de son mari ; puis par lui qui, à la mort de sa mère, laissa tomber la maçonnerie pour tenir la boutique.

Il ne l’avait jamais regretté. Il préférait, de loin, les boutons au ciment, et la présence des femmes à celle des hommes.  Il  conseillait ses clientes, les écoutait, leur proposait toutes sortes de fils et d’aiguilles, sans parler des boutons, dés et rubans.

C’est d’ailleurs grâce à un bouton rose qu’il avait vraiment rencontré Marie. Chère Marie, elle représentait à elle seule toutes les femmes mais le savait-elle ? Quand elle passait à la caisse, il ne manquait pas de lui rendre ses achats en lui disant « Et souviens toi que tu es la bienvenue ». Elle souriait, le remerciait, et sortait de la boutique de son pas léger. Il l’avait attendue 3 ans avant de lui proposer un bouton rose.

-          Tu vois ce bouton rose, il te ressemble.

Elle avait rougi mais il avait continué ; il faut dire que le petit porto qu’il avait pris avant l’ouverture de la mercerie l’avait aidé.

-          Oui, si tu veux, je te le donne, mais il faut que tu saches que ces boutons vont par deux, et le deuxième, je sais que c’est toi qui l’as. Ce bouton est si doux, si tendre, que je me suis dis que le tien serait sa sœur jumelle.

Marie, le visage écarlate, s’était contentée de lui répondre.

-          Je serai derrière l’église à 14 h, je t’attendrai.

Et, depuis ce jour, c’est exactement là, dans le petit jardin derrière la vieille église qu’ils se rencontrent. Et c’est un peu plus loin, dans le pré aux brebis, qu’ils débutent ce doux voyage où un bouton de rose rencontre une aiguille argentée…

 

PS : photo prise à Saumurs en septembre 2019

Commentaires
D
Joli texte (et jolie dénomination de la boutique)...<br /> <br /> Maintenant, cette mercerie fabrique des masques à tour de bras et la femme au bouton est rouge de plaisir toute la journée... :-)
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I
Pour les jeux de mots, les enseignes des merceries ne vaudront jamais les enseignes des salons de coiffure ; c'est sans doute mieux ainsi.<br /> <br /> <br /> <br /> Quant au mot “bouton“, il a le même suffixe que “téton”, suffixe que l'on retrouve aussi chez les couples amoureux quand ils disent “change-de-ton”.
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K
Il était sans doute impatient d'en découdre sur le pré !
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C
Et voilà une rose qui ne se saurait défleurir. Il se dégage un charme désuet de cette nouvelle.
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W
C'était couru, y avait pas une histoire d'entrée au paradis par le chas d'une aiguille ?
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