La clef
Elle ne trouvait plus la clef du paradis. Pourtant, afin de ne pas la perdre, elle avait demandé une grande taille chez le serrurier.
Peut-être avait-elle été volée, mais par qui ? Son mari ? Non, il ne croyait pas au Paradis ; ses enfants ? Non, ils avaient disparu il y a longtemps déjà ; ses amis ? Non, ils étaient morts et enterrés en elle ; ses parents ? Non, son père n’avait jamais existé et sa mère vivait si loin qu'elle ne la voyait plus.
Alors, où était-elle cette clef ? Elle se souvint soudain que son dernier rêve l’avait transportée dans un étrange paysage où deux goélands l'avaient accusée de posséder une clef que seul Dieu pouvait garder. Elle avait voulu leur dire qu'elle n'était pas coupable mais elle était restée muette. Juste après leur départ une femme, dont la voix évoquait le bruit de la mer, avait murmuré à son oreille : « N’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne. »* .
Lorsqu'elle s'était réveillée, son corps tremblait et son coeur battait la chamade. Ce rêve signifiait-il qu'il était temps pour elle de préparer son dernier voyage ?
*phrase extraite de Devotions upon Emergent Occasions, 1624, de John Dole
PS : prochain texte en ligne : vendredi 15 février