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Presquevoix...
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4 juillet 2012

Duo

Nouveau duo avec caro-carito, du blog les heures de coton. Le texte que vous allez lire est de caro-carito, quant à mon texte, il  est sur son blog. Cette fois-ci, Caro a suggéré de nous laisser porter par ce clip vidéo, cette citation d’Anne Hébert, tirée des fous de Bassan - « Dans toute cette histoire il faudrait tenir compte du vent, de la présence du vent, de sa voix lancinante dans nos oreilles, de son haleine salée sur nos lèvres. » - et cette liste de terrains de camping

 

Camping

Vacances, huit heures de route dans la 4L blanche. Je ne regardais pas le bord des champs, attentive à la première mouette. Avec elle, la mer et les vacances.

Je ne vais plus dans les campings. Rien à voir avec nos éternelles transhumances de la deuxième quinzaine d’août, mon psy en a finalement convenu. Je ne loue pas non plus du samedi au samedi, départ dix heures, ni ne fréquente les clubs Med ou les Centerparks. Tu sais que ce n’est pas une question d’argent, puisque je regarde juste mes comptes au cas où un quelconque escroc ne profiterait de mon inconséquence. Je préfère l’hôtel, les draps impeccables le soir après une ballade sur une jetée, le mini-frigo et ses mignonnettes, puissant remède à la solitude profonde. Surtout l’odeur des savonnettes qui ne rappelle aucune peau. Ou alors un sombre et bel inconnu de passage que le petit matin efface.

De nos vacances à Saubion, tu ramenais des films où l’on voyait papa, Hugo et le sable gris, un morceau de ciel, parfois cette ado plate qui les observait ; sans la bande-son, cela ressemblait presque à un trop-plein de bonheur, avec la petite touche d’ennui que les années estompent.

10 août. Si je laisse douze ans de villégiature familiale reprendre ses habitudes, je tourne au rond-point à droite, deux kilomètres et j’y suis. Le camping de la pomme de pin - pancarte flambant neuve annonçant la fin des toilettes miteuses et d’une pelouse inégale. Va pour les jacuzzis, la piscine chauffée et les gentils animateurs. Une bande sonore colorée qui embaume l’huile solaire, l’été convivial, le rosé.

Je préfère le silence d’un couloir moquetté, parfois un martini pomme dans le piano-bar d’un cinq étoiles. Un numéro, une clef. J’y suis même allée avec Paul et les jumelles qui savaient manger avec couteau fourchette et sans laisser la moindre miette sur les nappes impeccables. Je pars aussi seule.

Car vois-tu maman, pas de cris, pas de bande-son hurlante où papa et toi vous vomissiez dessus votre rancœur. Et tout ça jusqu’à ce que Hugo ne disparaisse et meure, seul, dans le squat de la rue des Carmes à Marseille. Pour moi qui restais, ce fut l’enfer et pour vous aussi avec après… la désertion. Oui, toi et papa. Mais surtout toi, ma mère, parce qu’après tout, à part au camping de la pomme de pin, papa n’était qu’une apparition temporaire. Violente certes, mais Hugo comme moi pouvions encore faire avec.

Je m’en suis sortie, à coup de gorgées d’alcool, de descentes et de bouffées d’espoir. En errant de chambre en chambre d’hôtel en lisière de mer, attentive à la présence des mouettes et au murmure du vent. Le goût sans fin du sel qui gomme encore tous vos cris, tous vos coups à l’âme.

Et quand, devant mes yeux fatigués, repasse le film des vacances sur une plage déserte ou parce qu’un camping est là, à deux pas, j’entends la beuglante de cette chanteuse. Je me dis que ce n’était qu’un mauvais vidéoclip, mauvais acteurs, mauvais scénario et tournage. Allez petite tire ton épingle de ce sale jeu. Concentre-toi, efface le son, joue du mieux que tu peux. Oui, joue puisque ne restera, après les coupes, que le souffle salé du vent et une histoire.

 

 



Commentaires
G
Merci de votre double lecture et de vos commentaires.
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B
On ne revient pas vers le passé directement, mais comme par étapes, des allers et retours en permanence jusqu'au tournis....<br /> <br /> J'ai lu l'autre texte sur l'autre blog, mais je n'ai pu y laisser de commentaires.<br /> <br /> Les deux textes sont beaux et m'ont donné un réel plaisir de lecture.<br /> <br /> Merci.
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C
D H la 4L une histoire rien qu'à évoquer son nom...<br /> <br /> <br /> <br /> Merci Monique.
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M
Je reviens de chez Caro-carito... Très belle association d'écritures pourtant différentes sur ce texte.ET... Je vais voir ce film "quant je serai petit" sûr que cela doit être émouvant je le pressent. Bise de Nice.
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D
Oui, embarqués (d'abord la 4 L) puis le déroulé des souvenirs.
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