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Presquevoix...
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11 juillet 2008

Angoisse

Thomasboivin« Putain, j’aurais jamais dû donner un coup de poing dans cette vitre », se dit-il soudain perdu, en regardant sa main ensanglantée et les petits  bouts de verre plantés dans sa chair comme autant de stigmates de sa vie de merde, comme il avait coutume de l’appeler. Il voulut les enlever mais il ne savait pas par où commencer.
Elle était partie. Et alors ?  Mais c’était la seule qui comptait, les autres, il avait tout juste sucé leur chair un soir d’angoisse, pas elle ! Avec elle c’était autre chose. Mais elle, elle ne voulait pas de lui. Elle lui avait même dit, la veille.

- Tu me fais chier à me coller. C’est pas parce qu’on a baisé trois fois ensemble qu’on va baiser ensemble toute notre vie ! Je suis pas une capote à angoisses !

C’est pour ça qu’il était parti comme un fou sur sa moto, jusqu’à ce nulle part où il se réfugiait quand il voulait en finir. Parce que c’était une idée qui l’assaillait de plus en plus fréquemment : en finir ! En finir avec cette souffrance qui lui serrait les entrailles entre deux tenailles jusqu’à ne plus pouvoir  respirer. Elle aurait sa peau !
Il ouvrit la porte et longea le couloir. Ce long passage lui faisait du bien. Presque un baume. Ici le vent se glissait par les fissures et les peintures s’écaillaient, comme le vernis de sa vie. Cette fois-ci il irait peut-être jusqu’au bout. La solitude ne lui faisait plus peur, la délivrance l’attendait. Il ouvrit son sac à dos pour vérifier que la corde était bien là. Il la toucha du bout des doigts, examina le nœud, il était rassuré. Il continua à suivre le couloir, les yeux perdus vers cette lumière brillante qu’il voyait au loin. Parfois il écrasait des mottes de terre qui crissaient sous ses pieds. C’est au moment où il essaya de savoir ce qui avait fait ce bruit bizarre sous la semelle de ses chaussures qu’il le vit, le petit chat gris et noir qui voulut s’enfuir puis  s’arrêta au loin pour l’observer. Il l’appela plusieurs fois, d’une voix douce, et le propre son de sa voix le réconforta

-  Minou, minou, viens me voir le chat, n’aie pas peur, moi aussi je suis une âme errante. Allez, viens le chat, maintenant tu n’es plus seul, je suis là.

Et, à pas précautionneux, la petite bête avança vers ce sphinx figé dans sa position accroupi. Au bout de dix minutes d’approche patiente, il arriva même à lui passer la main sur le dos sans que le chat n’en soit effarouché. Il était heureux : il l’avait apprivoisé.

- Tu vois, je suis ton ami, murmura-t-il. Maintenant plus rien ne peut nous arriver, ni à toi, ni à moi.

PS : photo gentiment prêtée par Thomas Boivin

Commentaires
P
Le monde est devenu si pauvre! Tourne-t-il trop vite qu'il nous déboussole? Et rien pour nous en consoler. Apprendre (mais qui pourrait nous le dire?) à voir, trier le grain de l'ivraie? Aller au delà de l'animal, en nous, tapi.
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G
La seule chose que je reccueille pour l'instant, c'est des phrases pour des nouvelles. Il est dur d'envoyer des manuscrits et de les voir refusés.
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G
Lidia : oui, parfois on peut continuer à vivre grâce à de petites choses, mais ces petites choses-là peuvent casser très vite.<br /> <br /> Trûn : alors, je suis voyante ?
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C
virage à 180° pour un fin où frise la lumière<br /> très réussi !<br /> à quand le recueil de nouvelles ?
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T
Comme d'habitude - moments vécus...
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