L’Assemblée Nationale
En sortant du bureau du député pour lequel elle travaillait à l’Assemblée Nationale, elle avait rencontré l’attaché parlementaire de la République en marche. Humour suffisant et fausse-bienveillance étaient ses deux « armes ». Elle disait « arme », car depuis la fin février le mot était à la mode dans les couloirs de l’Assemblée.
Leur relation était cordiale, sans plus. Elle était attachée parlementaire d’un député du parti communiste et, son éthique personnelle lui interdisait de tomber sous le charme d’un attaché d’un parti de droite. Dès qu’il l’a vue, il s’est précipité vers elle, quitte à glisser sur le lumineux carrelage du couloir qui la séparait de lui.
- Bonjour Nadia, très jolies couleurs que les tiennes. Cela te va à merveille. Alors, en forme malgré cette « guerre » aux portes de l’Europe ?
- Ah, encore le mot guerre, comme en 2020.
- En 2020 ?
- Mais oui, la guerre contre le COVID, bien sûr. Votre parti aime beaucoup le mot guerre. Un mot qui avait été répété dans le premier discours du président devant les français le 16 mars 2020. Tu te souviens ?
- Ah, perfide Nadia. Mais bon, là, il s’agit d’une autre guerre, non ?
- Exact, mais Monsieur Lemaire, votre merveilleux ministre de l’économie, pourrait éviter de parler de guerre économique et de guerre financière à tout bout de champs, non ?
- Que devrait-il dire alors ?
- Qu’il réfléchisse, s’il y arrive.
Et elle a disparu immédiatement. Ce type l’agaçait. D’abord ses yeux qui plongeaient dans son chemisier quand il s’approchait d’elle, et ensuite son ton fat. Avec 15 députés à l’Assemblée Nationale, ils ne représentaient rien, semblait-il lui dire. L’imbécile lui avait même parlé du « dogmatisme du parti communiste ». Et chez eux, pas de dogmatisme ? Vérité et protection étaient-elles les deux « mamelles » de leur parti ? Elle a souri, a fait marche arrière et s’est mis dans les pas de l’attaché de LaRem pendant une minute, jusqu’au moment où celui-ci s’est retourné.
- Ah, je suis sûre que tu as tout de suite senti le dogmatisme communiste derrière toi, s’est-elle amusée.
- Tu veux m’inviter quelque part Nadia ?
- A vrai dire non, à moins que tu ne passes à gauche ! Je reviens juste pour te dire que tu devrais signaler à ton député que le discours du président, avant-hier, a dû démoraliser les français. Que cherchait-il en disant : « La guerre en Europe n’appartient plus à nos livres d’histoire. » ? Allez, bientôt tout le monde aux abris. Au fait, j’espère que tu en as un abri dans ton petit immeuble parisien ? J’espère aussi que ton salaire a augmenté car ton président a dit que les prix seraient à la hausse. Il est vrai qu’il a aussi ajouté « Je n’aurai qu’une boussole, vous protéger. ». On voit que les élections approchent ! Cinq pour cents de plus dans les sondages pour Macron ?
- Tu es d’une drôlerie, Nadia.
- N’est-ce pas. C’est pour ça que tu m’apprécies, non ?
Et elle est partie dans l’escalier qui la menait au rez-de-chaussée. Objectif : aller au café Préludes lire rapidement le journal le Monde de l’après-midi et téléphoner à celui qui, peut-être, pourrait l’apaiser en cette journée lourde, si lourde que toute respiration semblait impossible…
PS : prochain texte, vendredi 11 mars.