Le voilier fantôme
C’est un bateau qu’elle voyait souvent sur l’océan de ses rêves. Quand la brume était épaisse, sa corne puissante effrayait les goélands qui hantaient son inconscient. Le capitaine du voilier avait une barbe d’un siècle et s’appelait John Thompson. Il aimait le rhum et les femmes, une dans chaque port, bien sûr ; son inconscient n’avait pas peur des clichés.
Le peuple de ses rêves l’appelait le voilier-fantôme parce qu’il apparaissait et disparaissait sans que l'on sût pourquoi. Quant à John Thompson, il avait bien existé ; c’était un journaliste dont la barbe avait eu sur elle un effet aphrodisiaque. Elle l'avait rencontré au Guardian, où elle avait fait un stage, juste après son Master d’anglais qui ne lui avait pas donné grand-chose, à part faire des remplacements de professeurs - malades d'enseigner - auprès d'élèves qui anonnaient l'anglais en s'accrochant désespérément à leur accent français.
Elle avait un peu couché avec John Thompson, mais d’orgasme point car, malgré sa barbe et ses aventures dignes d’un loup des mers, John ne connaissait ni l’art ni la manière et son "sextant" avait quelques ratés. Dans son rêve, il lui hurlait souvent « Vire de bord, love, vire de bord, et cap sur la liberté ! ».
Oui, il était temps d’écouter John Thompson, elle allait virer de bord et larguer les amarres…
PS : photo gentiment prêtée par Ksenia