La Madonna de Gérard
« Accrochez-vous les gars… », quand Gérard commençait ses phrases comme ça, ça voulait dire qu’il nous raconterait un gros craque et là, franchement, il n’y était pas allé de main morte. Les langues allaient bon train au bar PMU :
- Allez, arrête de déconner Gérard ! S’énervait Jean Luc.
Mais Gérard était intarissable :
- Je te dis que Madonna, quand elle m’a vu, elle m’a dit « Baise-moi Gérard ! »
- Mais comment elle savait que tu t’appelais Gérard ? Risqua Marcel.
- Et puis elle parle pas français Madonna, répliqua Momo.
Gérard n’avait pas particulièrement un physique de jeune premier. L’âge, la couperose, une bedaine comme un ballon de foot, un crâne dégarni et une femme qui était partie avec l’avant-centre de l’équipe réserve du Paris St Germain l’avaient vieilli prématurément. Mais Madonna lui redonnait du poil de la bête :
- Putain les mecs, si je vous dis que j’ai baisé Madonna, c’est que j’ai baisé Madonna, merde ! Elle a un tatouage sur la fesse gauche les gars, et quelles fesses ! Rien à voir avec celles de ta femme, Marcel !
Marcel ne dit rien, il y a longtemps que les fesses de sa femme ne l’inspiraient plus. Jean luc revint à l’attaque :
- Putain Gérard, t’as pas dû lui faire grand chose à Madonna avec la forme que tu tiens !
Gérard sortit de ses gonds :
- Madonna je l’ai baisée comme t’as jamais baisé ta femme, connard ! Et ils l’ont entendue crier jusqu’à New York ; elle disait « Vas-y Gérard, vas-y, encore Gérard, encore… »
- Et tout ça en Français ? Coupa Momo.
- Momo tu fais chier, c’est la jalousie qui te fait parler. D’ailleurs, la preuve !
Et Gérard exhuma de la poche de devant de sa salopette bleue une vieille photo de Madonna où il avait tracé d’une écriture maladroite :
« A Gérard, en souvenire d’une nuit d’amour, ta Madonna »
La photo circula de main en main. Soudain on entendit la voix de Momo :
- Souvenir sans E à la fin Gérard ! Tu le diras à Madonna.
Tout le comptoir éclata de rire.
PS : texte écrit dans le cadre des ateliers des « impromptus littéraires »