Toi
Tu souris mais je ne sais plus pourquoi. C’était il y a longtemps. Trente ans peut-être ? Tu souriais souvent mais tu étais inacessible, tel un coffre dont on aurait perdu la clef. Ce qu’il contenait, tu l’ignorais. Peut-on être soi quand la conscience cache ce qu'elle devrait offrir ?
Certains écrivent sur les pages d’un carnet, toi non, tu n’écrivais jamais ; inutile de tracer des mots qui n'auraient pas d'échos. Ta langue maternelle ne t'inspirait pas, tu as préféré adopter une langue étrangère ; il est si agréable de revêtir les mots des autres pour oublier d’être soi.
Puis un jour, fatiguée de te draper d’étoffes qui ne te couvraient plus, tu as décidé d’habiter ta propre langue, comme on habite une maison longtemps abandonnée…