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21 janvier 2023

Le ministre

Le nouveau ministre de l’Education Nationale avait eu une idée étonnante, mais combien intéressante, disaient certains parents d’élèves : faire entrer dans les classes dites difficiles des chiens d’accompagnement scolaire pour les élèves en décrochage.

Ces chiens – spécialement dressés – étaient censés, par leur présence, apaiser les élèves et contribuer à leurs apprentissages. Car, disait le ministre, si les élèves sont agités les chiens vont l’être aussi, donc cela obligera les élèves à ne pas l’être.

Il faut dire que le ministre, avant d’être ministre, avait élevé dans sa propriété – en dehors de son activité professionnelle qui l’avait mené dans les hautes sphères de l’administration - une meute de chiens.

Le corps enseignant avait réagi immédiatement par nombre de remarques acerbes. Sur twitter, des professeurs étaient intervenus en disant :

« Et pourquoi pas un Rottweiler derrière chaque élève en décrochage ? » -  « A quand un ministre de race canine ? » - « Oui aux profs bouledogues qui favorisent les apprentissages » - « Aboyer plutôt que parler améliore la compréhension des élèves » « Aboyer ou l’écoute active en cours » - « Je m’épanouie en aboyant en cours » etc. etc.

Suite aux réactions des enseignants, le ministre avait rapidement abandonné cette « saine » innovation tout en disant à son fidèle collaborateur : « les enseignants se plaignent, les parents se plaignent, les inspecteurs font grise mine ; franchement, quand je travaillais avec ma meute de chiens, les choses étaient beaucoup plus simples ! »

 

PS : prochain texte, jeudi.

 

 

11 juin 2022

Le Perroquet du professeur

Depuis un an, John avait dans son appartement un perroquet qu’il avait appelé Bob. C’était un perroquet amazone à nuque jaune. Il avait été intelligemment entraîné chaque jour – sa patience avec l’oiseau était remarquable - à s’exprimer en anglais. Il faut dire que John était professeur d’anglais dans un lycée de la banlieue parisienne. Mots, sifflements, vocalisation, le monde des perroquets n’avait plus aucune surprise pour lui ; en ce qui concernait celui des élèves, c’était autre chose. La plupart, disait John, était NAC – Nul à Chier ne pouvait se dire dans le langage des professeurs.

 John avait enseigné à Bob quelques mots indispensables - « Your attention please ! », « articulate ! », « Are you ready ? » - afin que le perroquet puisse participer activement au cours et fasse avancer ses élèves dans le monde de la langue anglaise.

Lorsque ces jeunes gens « studieux » avaient vu le perroquet dans la salle de classe pour la première fois, il y avait eu un silence de mort. Il faut dire que Bob en imposait, non seulement par ses couleurs, mais aussi par ses yeux de charbon, les sons qu’il roucoulait étrangement, et ce corps qui parfois s’agitait.

Bob est resté très calme lors de sa présentation par John, mais quand celui-ci a demandé à l’un de ses élèves – et non le plus mauvais – de répéter une partie de ce qu’il avait dit, Bob le perroquet a certes écouté le jeune garçon avec patience, mais ensuite il a roucoulé trois fois en gloussant : « Articulate ! ». L’élève s’est arrêté immédiatement et Bob a répété de sa voix nasale « Articulate ! ». Le jeune garçon n’a rien dit et Bob a ajouté « your attention please ! ». L’élève pétrifié était muet. Et Bob a ajouté un « Fuck ! » que John ne lui avait nullement enseigné. D’où ce « Fuck » lui venait-il ?

John a regardé Bob en souriant, puis l’élève et, au bout de dix secondes, le professeur a dit au jeune garçon.

-          Tu as compris ?

-          Yes, a répondu l’élève.

-          Perfect, a ajouté John. Et vous, les autres, vous avez compris ?

-          Yes, a dit la classe d’une même voix.

-          Perfect a répété le professeur.

Puis il a ainsi conclu.

-          Vous avez remarqué que Bob ne plaisante pas avec l’écoute et la prononciation. Si vous ne l’écoutez pas, je peux vous assurer qu’il risque de vous voler dans les plumes.

Vous, lectrices et lecteurs, serez peut-être surpris, mais depuis que Bob était à côté de John dans la salle de classe, les élèves étaient beaucoup plus attentifs au professeur et leur niveau d’anglais s’était fortement amélioré.

Conclusion : un perroquet dans chaque classe, tel est le secret de la réussite, quelle que soit la discipline !

 

PS : prochain texte, mercredi.

18 novembre 2014

Le week-end

Constatant que les trois quarts  de ses élèves de seconde n’avaient pas fait le petit travail demandé pendant le week-end, travail qu’ils auraient d’ailleurs dû faire le cours précédent mais qu’ils n’avaient pas achevé en raison du degré zéro de réflexion – la flemme ! -  dont ils avaient fait preuve, elle s’exalta. L’une des élèves lui répondit spontanément.

-          Mais madame, le week-end ça sert à se reposer. J’ai jamais travaillé le week-end quand j’étais au collège.

Elle déglutit difficilement devant ce qu’elle considéra – peut-être à tort – comme une provocation, puis elle répondit.

-          Ah bon, vous n’avez jamais travaillé le week-end ? C’est contraire à vos principes certainement. Mais maintenant, il va falloir changer de principes, hein,  sinon vous risquez d’aller droit dans le mur, et ça va faire très très mal !

Elle se demanda si elle ne devrait pas convier les parents à assister au cours quand ils le souhaitaient, juste pour qu’ils voient leurs chers petits en action… ou plutôt, à l'état larvaire.

 

14 mars 2013

L’affiche

 

Qui-veut-apprendre-a-apprendre_236642Quand elle avait vu l’affiche, elle s’était sentie pousser des ailes pédagogiques et avait immédiatement eu le désir de s’engager. Oui, elle ! Elle se sentait de taille à renverser les murs de l’atonie. Telle une bergère, elle les guiderait sur les sentiers de l’apprentissage et rien ne manquerait dans les verts pâturages de sa discipline. Si par hasard l’un d’entre eux s’égarait, elle réussirait, de sa baguette de fée-didactique, à le ramener vers le pays des apprenants heureux.

 

Cinq ans plus tard, après un parcours difficile en tant que TZR, elle remuait les pensées les plus noires dans la salle des professeurs d’un obscur lycée de province. Et chaque jour, dans un gospel poignant, sa voix s’unissait à celle de ses collègues pour décliner la longue liste des insatisfactions quotidiennes en attendant la rémission des vacances…

 

PS : Ci-dessous, un détournement de l’affiche ci-dessus, vu sur le site « nous vous ils ».

 

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8 mars 2013

L’ordre croissant

Ce professeur était un adepte de la secte de l’ordre croissant. Pour les copies, le rituel était toujours le même. A chaque  remise de devoir, le cœur de Lucas s’affolait, sa nullité dans cette matière y était pour beaucoup. Cette fois-ci le professeur commença à 2, puis 4, 5, 7, 8, 10… il arriva très vite à  16 et sa copie n’avait toujours pas été rendue. Se pouvait-il que cette fois… ? A la copie suivante, le visage du professeur accusa un léger sourire et il dit.
- J’ai ici un 3 qui s’est égaré. Lucas Bourré, c’est votre copie, désolé mon vieux,  mais bon, vous ne croyiez tout de même pas que vous aviez 17 ?
Lucas fit la grimace et rangea immédiatement la copie dans son sac, sans la regarder. L’ordre croissant faisait toujours des victimes, le problème c’est qu’elles n’étaient jamais indemnisées…

22 septembre 2012

Prof à domicile

Désenchantée du système scolaire, elle était devenue professeur à domicile. Elle avait pensé naïvement : je ne vois pas pourquoi je laisserais le plaisir d’enseigner à mes enfants à d’autres. Elle avait rapidement déchanté. Passer 24 h sur 24 avec ses enfants de 5 et 7 ans l’épuisait plus qu’un travail rémunéré. Envieuse, elle voyait son mari – cadre dans une PME -  revenir du travail presque frais et dispos.

Au bout de deux ans, elle changea son fusil d’épaule : non seulement elle retravailla, mais, en plus, elle laissa ses enfants à l’étude jusqu’à 18 heures.

9 juillet 2012

le taiseur

Enervé par les bavardages intempestifs de ses élèves, il avait conçu un pistolet taiseur muni d’un dispositif directionnel permettant de pointer de loin le bavard impénitent. Pour plus de sûreté, il avait essayé l’instrument sur sa femme et le résultat avait été instantané : elle avait été arrêtée en pleine tirade récriminatoire. Et oh surprise, lorsqu’elle s’était remise à parler, elle ne se souvenait de rien.

Le lendemain il décida de l’essayer en cours. Au bout de 15 minutes, il eut un silence total qui lui donna presque envie de dormir…

PS : texte écrit après avoir lu cet article du courrier international.

 

18 avril 2012

Les pastilles

Avant chaque cours, non seulement il se faisait une petite pulvérisation de spray buccal fluocaril, mais il la complétait par des pastilles Alibi, censées neutraliser les substances malodorantes. Ceci, pour la simple et bonne raison que des bruits avaient...
9 avril 2012

L’écoute audio

La semaine dernière, un élève s’est endormi les écouteurs sur les oreilles, devant l’ordinateur où il était censé écouter l’interview d’une chanteuse portugaise. Que faire ? Le réveiller ? Non, le laisser dormir. Il ne faut jamais déranger un « apprenant...
5 avril 2012

Le spray

Avant chaque cours, il se faisait une petite pulvérisation de spray buccal fluocaril, juste au cas où… les élèves étaient si médisants. PS : Les deux clics du jeudi 5 avril : l'un pour la "leçon de vie", sur le site du Lorgnon Mélancolique, et l'autre...
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