Quand Marie a téléphoné à Séverine pour lui demander si elle pouvait passer pour bavarder, celle-ci lui a répondu.
- Oui bien sûr, il est allé voir son plan cul.
Elles habitaient toutes deux dans la même rue, celle des hirondelles.
Marie lui a demandé.
- Quand tu dis plan cul Séverine, tu veux dire que Mathieu a une maîtresse ?
- Non, pas une, plusieurs.
- Et toi ? Rien ?
- Moi, je me repose. Tu comprends je préfère qu’il ait plusieurs plans cul plutôt que de le supporter tous les soirs. Il est fatigant, sexuellement parlant, et pas que.
Marie s’est étonnée de la réponse de son amie. Jamais elle n’aurait imaginé que Mathieu avait des plans cul. Lui toujours si classe dans son costume bleu avec sa chemise blanche. Mais oui, même les chefs du personnel pouvaient avoir de fréquents plans cul. Mathieu ne lui avait jamais rien proposé, à elle, et heureusement, car il n’est pas simple d’avoir pour amant de mari de sa meilleure amie. Et puis elle, les plans cul, elle les fuyait. Quand elle rentrait du travail – elle était professeur de management et s’occupait de formation pour adultes – elle s’affalait dans son canapé avec une bière et elle allumait la télé.
Une fin d’après-midi, alors qu’elles buvaient ensemble une petite bière, elle avait fini par dire à Séverine.
- Tu as raison de te reposer. Mieux vaut une bonne bière qu’un plan cul.
- N’est-ce pas ! avait répondu Séverine en prenant une deuxième bière.
Sauf, qu’un jour, Mathieu a sonné chez elle. Il l’a saluée, aimable comme à son habitude, et lui a demandé.
- Excuse-moi de sonner chez toi Marie, mais Séverine m’inquiète.
- Ah bon, pourquoi ?
- Elle boit beaucoup de bières et…
Marie a souri et a conclu.
- Tu préfères qu’elle boive de la bière ou qu’elle ait des plans cul ?
Mathieu l’a regardée, interloqué et a fini par dire.
- Je ne comprends pas.
- Eh bien parles-en à ta femme et elle t’expliquera. Moi, je ne peux pas, je suis célibataire et les couples, je n’y comprends rien.
- Justement.
- Justement quoi ?
- Je peux rentrer ?
- Euh, pour quoi faire ?
- Pour qu’on parle de ce petit problème, lui a-t-il dit en lançant un regard qui lui a presque semblé lubrique.
Mathieu n’a pas insisté. Il l’a tout de même longuement regardé Séverine, puis a dit.
- Bon, je ne veux pas t’embêter, mais quand même, ce cul qui revient en permanence, ça m’inquiète ; vous cultivez l’absurde toutes les deux, c’est ça ?
- On cultive le jardin qu’on peut Mathieu. Certains préfèrent les cucurbitacées, d’autres le curcuma ou le curry ; je crois qu’il vaut mieux ne pas être trop curieux du goût des autres, si tu veux mon avis.
Mathieu lui a souhaité une bonne soirée et est reparti, dépité. Le lendemain, Séverine lui a téléphoné pour la remercier.
- Bravo. Après être allé chez toi, Mathieu s’est couché et n’a même pas mangé. J’ai même pu suivre ma série « En thérapie » en silence. Je ne sais pas ce que tu lui as dit, mais bravo, vraiment. Après le management tu devrais te reconvertir dans le coaching, je t’assure, tu as un don. A demain, si tu veux, car il aura son plan cul.
Séverine lui a souhaité une bonne journée et s’est dit que oui, le coaching, pourquoi pas, parce que le management, elle n’en pouvait plus, vraiment plus ; mais elle s’est aussi dit que Séverine devait filer un mauvais coton et que ces histoires de cul lui montaient à la tête…
PS : pochain texte, dimanche.