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Presquevoix...
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6 octobre 2015

Le vélo

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Elle aurait voulu l’enfourcher et partir le plus loin possible ; jamais elle ne l’avait  fait.

Le vélo était là, chaque matin, comme une tentation, avec son panier fleuri promettant mille merveilles et son antivol rose qu’elle aurait pu accrocher a un nuage.

Elle aurait pu… chez elle, le conditionnel passé était une seconde nature, la nature de ceux qui ont peur de la vie, peur du monde insolent, peur d’être, tout simplement…

 

PS : photo prise à Lille, par mes bons soins.

8 septembre 2015

Le pied

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Elle prenait son pied partout – mais dans la  plus grande discrétion - quel mal y avait-il à ça ?

 

 

PS : photo prise par moi-même, à Orange.

 

4 septembre 2015

Le voyage

MOUETTESQuand elle monta sur la barque, personne ne soupçonnait qu’on ne la reverrait plus. De la rive son mari lui cria « Attention à toi, tu ne sais pas nager ! » Elle lui fit un petit signe de la main comme pour lui dire que bien sûr elle ferait attention. Comment pouvait-il imaginer le contraire ?

Dès qu’elle fut à quelques mètres de la rive les goélands suivirent le bateau. Elle se montra surprise mais cette escorte lui sembla de bon augure, après tout, n’était-il pas mieux d’être accompagnée pour se rendre là où elle allait ? Elle les salua et ils continuèrent leur course, conscients du mystère qu’ils partageaient avec elle. Son désir, sans doute le connaissaient-ils, eux qui savaient les murmures du vent et de la mer.

Depuis quelques temps Dieu et les mystères de l’âme l’obsédaient. Qui était-elle ? D’où venait-elle ?  Et où était Dieu ? Ces questions la surprenaient au cœur de la nuit et elle se réveillait en criant, sa chemise de nuit collée au corps. Et si Dieu n’était qu’une création machiavélique des hommes ?

La barque voguait gentiment et lorsqu’elle se penchait, elle pouvait se voir dans le miroir bleu qui reflétait une image qu’elle n’avait jamais reconnue comme sienne. Pourquoi n’avait-elle jamais su apprivoiser ce visage régulier qui avait pourtant su séduire ?

En regardant vers le rivage, elle vit encore son mari réduit à un point minuscule ; ce qu’il était sans doute devenu dans sa vie. Les enfants, les amis, sa maison tout cela semblait si loin, incapable de prendre la place du sentiment qui maintenant la gonflait d’un orgueil infini : elle partait à l’aventure et ne jetterait l’ancre que lorsqu’elle aurait trouvé un pays où les êtres étaient reconnus à leur juste valeur.

 

PS : Dessin de Patricia, qui nous a quittés récemment.

Je me suis aussi inspirée de Youkali - (Kurt Weill & Roger Fernay), écouté et ré-écouté dans cette version :

 

 

 

29 août 2015

Face à face

20150814_142314Elle observait la scène de loin et elle commençait à s’impatienter. Que lui disait-il ? Cela faisait dix minutes qu’ils étaient face à face. Lui était-il déjà arrivé, à elle, de mettre dix minutes pour prendre une photo ?

Elle s’imagina alors qu’il lui parlait. Mais que pouvait-il lui dire ? Les choses les plus folles lui traversèrent l’esprit. Non, pas ça, tout de même ! Mais pourquoi pas ? Il en était bien capable ! Mais à une statue ? Elle essayait de se raisonner mais maintenant elle en était sûre. Il faisait semblant de prendre la photo  tout en se faisant plaindre. Rien de telle qu’une femme muette pour développer le goût de la parole chez l’homme. Et le pire, c’est qu’elle semblait l’écouter. D’ailleurs ne hochait-elle pas la tête ?

Elle n’y tint plus et le héla du haut de l’escalier.

-          Alors, c’est pas bientôt fini ton manège ?

Il ne se hâta pas de répondre et, au bout d’un temps qu’elle jugea trop long il articula.

-          Tu n’es pas obligée de m’attendre. On se retrouve à la sortie.

La guerre était déclarée. Elle se détourna du couple, fit un tour du jardin à grands pas, n’admira pas les fleurs qu’elle aurait dû admirer, ne s’extasia pas sur le temple de l’amour, ne s’étonna pas de l’harmonie des couleurs.

La sortie fut atteinte en moins de cinq minutes. Elle pourrait ainsi lui dire qu’elle l’avait attendu une heure.

 

PS : photo prise à Gerberoy, dans l'Oise

21 août 2015

Le prêtre

20150803_175900La joie n’avait jamais empli sa vie et depuis que le Diocèse avait placardé ces affiches sur les portes des églises, il se sentait en porte-à-faux. Qu’est-ce que les paroissiens allaient attendre de lui maintenant ? Qu’il fasse le guignol en chaire ? Qu’il leur raconte des anecdotes sur la vie du Christ ? Qu’il les accueille après la messe pour leur remonter le moral avec des histoires drôles à vertu thérapeutique ? Il en voulait au nouvel évêque qui, avec l’enthousiasme de ses 45 ans, venait bouleverser le ronronnement de sa paroisse. Il lui venait même des idées de meurtre, que Dieu lui pardonne !

 

PS : photo prise  lors de mon périple à vélo dans le Lubéron

 

11 juillet 2015

L’oiseau

20150706_142930Jamais elle ne se déplaçait sans lui, le témoin ailé. Leur rencontre avait eu lieu dans l’autre vie, ce jour où il l’avait trouvée nue sur la pelouse. Elle ne se souvenait ni d’où elle venait, ni qui elle était et il lui avait tout réappris. Ses ailes larges se déployaient lorsqu’elle perdait confiance mais jamais il ne l’étouffait.

Aussi étrange que cela paraisse, elle ne lui posait pas de questions, non par manque de curiosité, mais il lui semblait que l’oiseau vivait au présent et que jamais il ne se projetait.

Depuis, sa mémoire était revenue. Elle avait tiré le fil d’une fine toile d’araignée tendue entre les branches et elle était arrivée au cœur d’elle-même, après un long voyage. Des steppes arides elle était passée à des contrées au climat plus clément pour finalement arriver dans un paysage où les verts s’harmonisaient et se reflétaient dans le ciel.

 

PS : photo prise par gballand dans le jardin botanique de Meise, près de Bruxelles.

 

4 juillet 2015

Le livre

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En se glissant juste derrière le grillage, elle s’aperçut qu’il lisait du Edgar Allen Poe. Le titre - « les contes macabres » - avait-il un rapport de près ou de loin avec sa vie ?

Elle essayait de se défendre de cette triste habitude d’entrer  dans la vie des gens, mais rien n’y faisait, la machine à inventions se mettait en route dès qu’elle trouvait le personnage rêvé. Aussi, quand il se leva, elle le suivit pour vérifier si la réalité allait se superposer à ce qu’elle écrivait déjà sur son carnet virtuel. Les chaussures du lecteur, bien trop grandes, lui donnaient une étrange démarche et  le foulard rose qui s’échappait de son sweat devait lui servir de ceinture.

Au sortir de la gare, il hésita puis descendit la rue de Lyon de son pas incertain. Il ralentit devant « chez Léon », regarda de droite et de gauche pour finalement s’arrêter devant ce qui ressemblait à un paquet posé sur le sol. Il hésita, donna un léger coup de pied sur la chose qui remua. Le lecteur l’apostropha vertement.

-          Encore saoule ! Tu ne pouvais pas t’en empêcher, hein ?

Contre toute attente il se tourna vers moi et me fit un signe.

Je ne pus que répondre à son appel. Une fois à sa hauteur il me dit : « Ceux qui rêvent éveillés ont conscience de mille choses qui échappent à ceux qui ne rêvent qu’endormis »*

Je rougis, se pouvait-il qu’il m’eût perçu à jour ? Je l’aidai à  adosser contre le mur ce qui ressemblait à une femme. Je me risquai à lui poser une question.

-          Poe, demandais-je, c’est important pour vous ?

-          L’important, le principal est de savoir ce qu’il faut observer *

-          Et qu’y trouvez-vous ?

-          Le démon du mal est l’un des instincts premiers du cœur humain.  *

-          Vous arriverez à vous occuper d’elle  tout seul ? m’inquiétais-je, en pensant à l’était larvaire de la femme.

-          Des années d’amour ont été effacées par la haine d’une seule minute.*

Je finis par comprendre que le lecteur ne parlait que par citations. Etait-il une réincarnation de l’auteur ?

 

*citations d’Edgar Allan Poe

 Photo de gballand prise à la gare de Lyon.

 

PS : Mon prochain texte sera en ligne  le Jeudi 9 juillet

30 juin 2015

L’arme

20150625_102210Il était allé à Lausanne pour se fournir chez Forney, maison fondée en 1808. L’arme achetée était parfaite : petite, élégante et légère. L’usage qu’il en ferait atteindrait aussi la perfection.

Il s’était réservé une chambre de 32 mètres carrés à l’hôtel Beau-Rivage, avec vue sur le lac. Le soir de son arrivée, il avait prévu un « dîner émotions »   dans le restaurant gastronomique de l’hôtel.

Quand il était entré dans le hall, le réceptionniste l’avait observé d’un œil méfiant : pas le genre de la maison, avait-il dû penser, sans doute à cause de son costume fripé par le voyage et de sa coupe de cheveux peu classique. Sa carte bleue fut débitée sans problème et le réceptionniste retrouva le sourire.

-  Deuxième étage, chambre numéro 10, fit-il en lui tendant la clef. Nous vous souhaitons un agréable séjour à l’hôtel Beau-Rivage, Monsieur, et nous ferons tout pour vous satisfaire.

Son installation fut rapide. Il ouvrit la fenêtre, la vue était à la hauteur du prix, grandiose.

Il visualisa la scène après le dîner : il s'enfermerait dans sa chanbre, il ne tirerait  qu'un seul  coup et il en finirait avec ce qu’il appelait : mon intranquillité.

Sylvia elle-même en serait étonnée. Comment aurait-elle pu supposer qu’il se donnerait la mort dans l’hôtel où ils avaient passé leur nuit de noces ?

 PS : photo prise par gballand, à Lausanne.

17 juin 2015

Le fantasme

20150613_191121Chaque jour, à 18 heures tapantes,  il montait sur la petite échelle. C’était devenu une addiction. Mais que regardait-il ? vous demanderez-vous. Elle : la femme idéale, l’impossible incarnée.

Se savait-elle observée ? Bien sûr, et pour rien au monde elle ne se serait privée du rituel de 18 heures. Elle passait une demi-heure à se préparer. Ceci pourra vous étonner, mais un fantasme ne peut se contenter de médiocrité.

L’un comme l’autre savaient  que jamais ils ne pourraient s’étreindre. Et quand, par un hasard extrême, ils se croisaient dans l’escalier, ils s’évitaient consciencieusement, de peur de faire disparaître pour l'un, l'objet de son désir, pour l'autre l'objet de son plaisir.

 

 

PS : photo prise par GB.

7 juin 2015

L’ange déçu

20150524_183012Il s’était décapité par déception. Vous me direz : est-ce possible ? Un ange n’a-t-il pas la formation divine suffisante pour tout supporter ?

En général oui, mais L’homme qu’il protégeait l’avait poussé à bout. Combien de fois, sur le fil de l’écoute, avait-il  hoché la tête, fatigué, entre compassion et pitié. Mais un jour, la corde avait cassé, et lui -  l’ange-funambule - s’était retrouvé au sol, déçu et désespéré.

C’était « un cas difficile », on l’avait prévenu au départ. L’homme ignorait son coeur et son corps. Il croyait tout connaître mais ne connaissait rien. Il se disait doué de raison, mais ses raisonnements n’étaient qu’un prêt à penser, un stock donné à la naissance qu’il n’avait jamais interrogé ni regardé à la lumière du jour.

Une fois l’ange décapité, l’homme avait tenté de continuer son chemin, mais plus personne n’avait voulu le suivre et il était mort, loin de tous et de lui-même.

 

PS : photo prise par gballand

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