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15 octobre 2023

Voyage au pays des EHPAD

Puisque les EHPAD - Établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes -  sont « au goût du jour » depuis le COVID, je mets en ligne sur mon blog cette lettre écrite par mon père à la Directrice de l’EHPAD privé - excessivement cherdans lequel il se trouve avec ma mère depuis décembre 2022.

J’ajoute que, contrairement à près de 85 % des  résidents de cet EHPAD, mon père n’a pas de troubles cognitifs, vous pourrez en juger par le contenu de sa lettre. Heureusement pour lui, il possède encore l’ humour et l’énergie psychique  qui lui permettent de faire face à ce qu’on peut nommer : l’inadmissible.

J’ajoute que, si vous souhaitez « ouvrir vos yeux » sur le fonctionnement des EHPAD privés, côtés en bourse, la lecture du livre « les fossoyeurs » de Victor Castanet, vous donnera toutes les informations nécessaires.

 

 Madame la Directrice,

 

En recevant le programme des activités de la 2ème semaine de septembre, je m’étais réjouit de constater que le jeudi 14 serait consacré à la Provence et aux peintres ayant sublimé cette belle région. Autrement dit, pour moi et sans doute beaucoup de résidents que ce serait « jour de fête », en pensant cela j’avais en mémoire le célèbre film de 1949 de Jacques Tati et, pour paraître un peu plus jeune, je me remémorais les paroles de la célèbre chanson « c’est la fête » de Michel Fugain, datant de 1973, dont je cite le premier couplet :

Un bon dîner çà vaut mieux qu’un coup de trompette

Prenez donc le menu et quand vous l’aurez lu

On fera la fête, ce sera chouette ma minette …….

Je dois vous avouer que j’ai été plus que déçu, ce 14 septembre ayant été pour moi, un cauchemar.

Pour commencer la journée, comme d’ailleurs la veille, je n’ai pas eu droit à mon quotidien complément alimentaire au petit déjeuner qui m’est indispensable étant donné ce que je suis en mesure de manger par ailleurs. Il m’a été précisé que l’on en disposait plus en stock, alors que c’est un aliment médicalement prescrit à un nombre appréciable de résidents. Qui est censé gérer les stocks de cet aliment ?

J’escomptais me remettre de cette mauvaise entame de journée en me rendant à la salle à manger du 2ème étage en pensant à l’aïoli que j’allais déguster. Qu’ai-je eu dans mon assiette, certes bien remplie, un morceau de morue et différents légumes, avec sauce aïoli à peine visible. Comme tout le monde, j’ai demandé un peu plus de sauce et il nous a été répondu qu’il n’y en avait plus en cuisine. Un aïoli sans aïoli, il faut le faire ! Bravo pour le cuisinier qui ne sait sans doute pas faire le moindre effort pour améliorer la qualité de ses plats.

Je croyais en avoir fini de mon mécontentement en attendant le dessert. Eh bien non. Figurez-vous que pour 10 résidents à la salle à manger du 2ème étage, il n’y avait que 2 parts du gâteau à l’intitulé pour le moins ronflant « brioche aux figues rôties et crème anglaise à la fleur d’oranger (appellation digne d’un 3 étoiles du guide Michelin, pour une qualité ici de bas étage !). Renseignement pris en cuisine par la femme de service, il lui a été répondu que le nombre de parts de gâteau avait été mal calculé. Faut-il envoyer les cuisiniers faire un stage en cours préparatoire pour leur apprendre à compter jusqu’à 100, voire 200 ? Avec de tels arguments pour justifier des insuffisances notoires, on se dit que l’on se fiche de la tête des clients, c’est-à-dire des résidents. Mais combien sont-ils vraiment, comme moi, à être en mesure de faire la part des choses et donc de se plaindre lorsqu’ils ne sont pas satisfaits ? Cela dit, je dois reconnaître que j’ai cependant été gâté par rapport à mes voisins de table, puisque j’ai eu droit à une part de ce fameux gâteau (plus sur le papier que dans l’assiette), ce qui m’a évité de faire un vrai gueuleton ce midi avec essentiellement 2 pots de yaourt.

Puisque j’en suis au stade des mécontentements, j’en profite pour vous dire qu’ayant fait l’objet d’une prise de sang lundi matin, je ne connais toujours pas les résultats du laboratoire. Comme j’ai déjà eu l’occasion de vous le dire avec force à plusieurs reprises, je suis le premier concerné lorsqu’il s’agit des résultats d’’examens médicaux quels qu’ils soient. Je vous demande donc, avec la plus vive insistance, de me communiquer tous les résultats au fur et à mesure de leur arrivée.

Une fois lecture faite de la présente lettre – au moment où je vous écris, je ne sais pas encore ce que vont me réserver la soirée et le dîner - je pense que vous serez en mesure de comprendre combien ce 14 septembre fut un jour de fête pour moi et pour un certain nombre de résidents.

Croyez, Madame la Directrice, en mes sentiments les meilleurs, malgré toutes ces récriminations, en vous souhaitant pleine réussite dans votre délicate mission pour apporter des améliorations notables dans le fonctionnement de cet EHPAD et plus particulièrement sur le plan de la qualité de la restauration.

 

PS : prochain texte, jeudi.

 

 

 

 

 

12 octobre 2023

L’armée !

Il s’appelait Kevin, il venait de Saint Denis, il avait 20 ans et il voulait entrer dans l’armée. 1 m80, 90 kilos, bac moins 5. Problèmes : il boitait un peu de la jambe gauche, il était myope et il avait une plaque de fer dans le bras droit – une rixe de son enfance.

Ces petits maux là lui avaient été fatales et il avait échoué à l’examen d’entrée dans l’armée de terre. « On ne recrute pas de handicapés » lui avait on fait comprendre. Dommage pour lui. Il était reparti la rage au cœur en pensant aux 1400 euros nourris et logés qu’il n’aurait jamais. Il n’y avait plus qu’une seule solution pour lui : reprendre son travail chez Uber ou dealer et monter dans la hiérarchie s’il se révélait un as du FCK ( fuir les connards de keufs*).

 *= policiers

PS : prochain texte, dimanche.

8 octobre 2023

Le lavoir

 

Vénasque le Lavoir pour Ghislaine

« La vie des femmes est un chemin de peines mais aussi d’espoirs », ça, c’est ce que j’essaie de dire, d’en haut, à Yvonne, en l’observant laver son linge au lavoir, mais elle ne m’entend pas. Il faut dire qu’il y a si longtemps que je suis partie, mais je reviens au lavoir tous les lundis pour écouter les femmes. 50 ans que je suis dans le monde d'en haut, mais les conversations n’ont pas changé en bas ou si peu.

Certains hommes  surnomment le lavoir, radio lavoir. Envient-ils aux femmes le pouvoir qui est le leur de parler mais aussi d’écouter ?  Et qui dit « j’écoute » dit aussi « je me comprends à travers les histoires que les autres me racontent ».

Aujourd’hui, jour de lavoir, Yvonne est seule. Pourquoi ? Où sont-elles passées, les autres ? Ont-elles été enfermées chez elle par leur paysan de mari, mais quel homme ferait ça ?

Soudain arrive Zéphirin, le sourd muet, celui que les femmes plaignent parfois car le pauvre vit seul dans sa maison vétuste. Yvonne lui fait un petit signe de la main et lui montre le ciel, si bleu et tendre ; puis elle lui dit en articulant.

-          Belle journée pour laver le linge. Je me demande pourquoi les autres femmes ne sont pas là.

Zéphirin sort quelques sons graves qu’elle interprète comme son bonjour à lui. Il est timide. Jamais il ne se présente quand le lavoir s’emplit du gloussement des femmes. Il préfère la solitude. Dans ses mains, il tient une feuille qu’il lui tend et où sont écrits les mots suivants : « Aujourd’hui c’est jour de grève des femmes »

-          Zut, c’est vrai ! Jour de grève. Je range tout et je rentre chez moi. Merci Zéphirin. Elles vont me maudire si je  reste au lavoir.

Elle remet son linge dans son large sceau, s’approche de Zéphirin, lui tape gentiment le dos et rentre chez elle. Aujourd’hui, elle ne fera rien de rien, comme les trente autres femmes du village, et si son mari dit quoi que ce soit, ce sera SILENCE.

PS : aquarelle de Chinou. Merci à elle de me l’avoir prêtée. Prochain texte, jeudi.

 

5 octobre 2023

L’oreille

Dans cette classe de première, le cours de français de Monsieur Chouvieux se déroulait toujours dans une ambiance étrange. Certains disaient qu’il n’avait pas la cote et qu’il ne cherchait pas à l’avoir. Lui, souvent, racontait à ses collègues, en salle des professeurs.

-          Avant je mettais des notes négatives, maintenant, j’y ai renoncé, je n’attends plus rien d’eux, c’est la fin !

Ses nouveaux collègues pensaient qu’à 55 ans, il allait peut-être finir par passer à autre chose. Ce qu’il fit, mais d’une bien étonnante façon. Le mardi, son premier cours avait lieu de 11 h à 12 h avec sa classe « merdique » - comme il l’appelait - de première STMG*1. Ce jour-là, trois garçons lancèrent les hostilités en disant à tour de rôle : « On comprend rien m’sieur, rien, vous parlez pas la même langue que nous. C’est comme quand  le Président parle ! » Remarque à laquelle Le professeur avait répondu.

-          Quand vous saurez conjuguer un passé composé, au moins, vous comprendrez mieux les cours et la vie.  Quant au président, c’est une autre histoire, il se prend pour un être supérieur et il prend les autres pour des imbéciles !

Les élèves sourirent et le cours continua mais, cinq minutes plus tard, Leila – l’insolente en chef, comme l’appelaient les autres – entama les hostilités. Celle-ci, de sa voix haut perchée articula la phrase suivante.

-          Monsieur, c’est quand la retraite pour vous, parce que là, vraiment, votre cours c’est …

Elle n’eut pas le temps terminer sa phrase. Le professeur – 1 mètres 90 et 95 kilos - se rua vers elle et lui tira l’oreille avec une telle vigueur que nul ne dit mot, sauf Leila. Son hurlement fut immédiatement suivi de celui du professeur qui la mit dehors, en tirant toujours son oreille et en disant « Tu me fais autant chier que notre président, bravo, sans parler de notre crétin de ministre de l’éducation dite nationale qui lui aussi me fait chier  ! »

Résultat : plainte des parents, blâme de l’administration et sortie de l’établissement pour le professeur. Finalement, il fut envoyé au CNED – centre national d’enseignement à distance - pour une « pré-retraite » paisible. « Des copies à corriger, rien que des copies à corriger, et la paix », disait-il en plaisantant à ses anciens collègues. Il eut presque envie d’envoyer une lettre de remerciements à Leila, mais son épouse insista pour qu’il n’en fit rien, elle aussi connaissait Leila et elle se méfiait de ses réactions…

*Science et Technologie du Management et de la Gestion

PS : prochain texte, dimanche.

1 octobre 2023

L’île

Cette vieille dame lui donnait l’impression d’être seule en pleine mer, loin, si loin. Elle l’écoutait une fois par semaine et se demandait si Jacqueline – c’est ainsi qu’elle s’appelait -  n’était pas prise au piège de l’île du Narcissisme où nul autre n’existe sinon soi.

Pouvait-on être sauvé de cette île-là à quatre-vingts ans passés ? Sans doute allait-elle mourir sur cette île-rocher isolée du monde. Souvent la veille dame disait d’un ton péremptoire : Je suis détachée du monde et mon cœur est sec.

Jamais elle n’avait demandé à Jacqueline ce qu’elle ressentait dans ce monde-là, jamais elle ne le lui demanderait et ce, pour une raison très simple : Jacqueline ne s’interrogeait jamais : elle savait  tout sur tout et elle avait toujours raison. 

 

PS : prochain texte, jeudi.

 

28 septembre 2023

Lecture

Tous les jours, en classe de CM1, en début d’après-midi, il y avait le quart d’heure lecture. Gaétan, 9 ans, détestait ça. Lui, il ne savait pas lire, ou si peu. Il avait transformé le quart d’heure lecture en quart d’heure sieste mais, quand il ne dormait pas, il observait la maîtresse et il se demandait si elle-même aimait lire car, quand les enfants étaient censés lire, elle, elle regardait son portable et écrivait des SMS. Mais sans doute préférait-elle écrire ? Un jour il lui poserait la question, un jour peut-être…

PS : prochain texte, dimanche.

16 septembre 2023

Le mur de paroles

 

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 Thierry avait donné rendez-vous à Jean devant le mur de paroles. Maintenant ils étaient tous les deux assis sur un banc, face au mur, mais rien ne sortait. Soudain le portable de Jean  sonna et Thierry  dit.

-          Quand ça sonne, on éteint !

Jean n’avait qu’une envie, répondre, mais il savait Thierry irascible et il  le portable fut éteint.

-          Si je t’ai donné rendez-vous ici, Jean, c’est tout simplement pour que les paroles sortent.

Jean ignorait de quelles paroles Thierry voulait parler et il le laissa continuer en regardant le ciel qui semblait avoir un rendez-vous avec les nuages d’Eugène Boudin. Le monologue continua quelques instants jusqu’à ce que Thierry conclut.

-          Bon Jean, voici comment on va procéder : Je commence, tu continues et ainsi de suite jusqu’à ce que vérité s’en suive.

-          Comme au bon vieux temps de notre enfance ?

-          Exactement.

Jean se demandait de quelle vérité Thierry il s'agissait, mais avec lui, il valait mieux ne pas poser trop de questions. Jean  hocha de la tête et Thierry  commença.

T ( Thierry) :  La vérité attend son heure pour pouvoir se dire.

J ( Jean ) : Soit, alors lions nos mots pour le meilleur et pour le pire.

T : Ah, ah, ah, rire et dire, donc ?

J : Oui. Oublions-nous nous-mêmes, ça nous changera !

T : Certes, mais quand les mots de l’un ont la parole, les mots de l’autre ne doivent pas fermer leur gueule.

J : Serais-tu le meurtrier de la bienséance ?

T : Je n’ai jamais assassiné personne à part ma femme, et encore, par inadvertance. D’ailleurs, comme tu le sais, elle a ressuscité.

J : C’est vrai, je l’ai vue hier.

T : Ah bon, où ?

J : Avec votre chien. L’avantage avec les chiens, c’est qu’ils nous contredisent rarement, alors Cécile en profite pour parler avec lui.

T :  Tu veux dire que le chien est un bon compagnon pour Cécile ?

J : Exactement. Avec un chien, on a la priorité, qui que nous soyons et quoi que nous soyons. Au fait quelle heure est-il ?

T : Tu m’emmerdes avec ton heure. Le temps est toujours à l’heure.

J : Oui, mais jusqu’à quand ?

T : Jusqu’à ce que la vérité trouve le temps de pouvoir se dire.

J : Tu sais, moi je n’ai l’application « vérité » que sur mon portable, et comme il est éteint ! Ah, j’ai même l’application « comment être con ».

T :  Ça ne m’étonne pas, tu l’as même sans ton portable, non ? Mais revenons à Cécile et au chien. Donc ?

J : Donc, ils se promenaient bras dessus bras dessous dans la rue des bons enfants. Cécile riait et le chien bougeait de la queue.

T : intéressant. Tu leur as dit bonjour ?

J : A Cécile, oui. Le chien, lui, je l’ai caressé.

T : Je préfère ça que l’inverse.  Et ensuite ?

J : Tu veux la vérité ?

T : C’est le but du jeu, non ? Paroles et vérité.

J : Parfait. Elle m’a dit qu’en ce moment elle te trouvait bizarre, même avec le chien.

T : Et ?

J : Et qu’il valait mieux ne pas être seul avec toi parce que tu avais acheté deux choses : un révolver et un détecteur de pensées.

T : Ce qui est vrai. Tu as peur ?

J : Non parce que je viens de faire le tour de la vérité.

T : Rien d’autre ?

J : Je cherche… Ah oui, elle m’a dit que tu passais ton temps à faire des listes, mais elle ne savait pas de quoi. Elle m’a même dit que ça l’inquiétait.

T : Toi qui es psy, ça t’inquiète ?

J : Non, pas du tout, pas du tout… C’est même passionnant les listes. Moi si j’en faisais une, ce serait la liste de mes rendez-vous manqués. Et toi, quelle liste tu ferais ?

T : Celle des cons qui m’entourent.

J : Celle-ci doit être longue, non ?  

T : Comme tu le dis. Moi-même j’y siège.

J : en tête de liste ou en fin de liste ?

T : j’ai oublié. Mais pour en finir : tu couches avec Cécile oui ou merde ?

J : Tu veux la vérité ?

T : c’est le jeu, non ?

J : Eh bien oui, j’eus couché mais je ne couche plus. Cécile s’est lassée et maintenant, elle préfère se promener avec le chien qui, comme je te le disais est plus reposant.

T : parfait. Merci Jean. Maintenant, je me demande qui est le suivant sur la liste. J’imagine que tu ne le sais pas ?

Jean fit non de la tête. Il n’en savait rien. Il aurait pu dire à Thierry que sa femme était aussi  chiante – voire plus – que lui,  et qu’elle l’avait exténué, au propre comme au figuré, mais il  préféra terminer le « petit  jeu » dans le silence en pensant au proverbe : « la parole est d’argent et le silence est d’or. »

Au bout de 5 minutes Thierry se leva, partit sans rien lui dire. Jean alluma son portable,  écouta le message qu’on lui avait laissé. C’était Cécile qui lui disait en pleurant que son chien était mort.

 

PS : prochain texte, jeudi 28 septembre.

PS1 : photo prise sur un mur de Duclair l’été dernier.

12 septembre 2023

A-BA-Y A

Dans ce lycée de la banlieue rouennaise, on avait briefé les assistants d’éducation sur les abayas et les maîtres mots avaient été EXPLIQUER ENCORE ET TOUJOURS. Evidemment, aucun des assistants d’éducation n’était sorti de la réunion avec les idées claires. L’une avait même dit à sa copine.

-          Ils nous font chier avec les abayas. Ils préfèreraient peut-être qu’elles se foutent en mini-jupe ras du cul ou en short avec un tip top sous les seins ?

Et l’autre avait répondu en souriant.

-          Moi, tu sais, je suis musulmane et je préfère le pantalon, comme toi. Tout ce que je sais, c’est qu’on va jamais y arriver, et puis il y en a qui arriveront encore plus en retard en cours que l’année dernière. Sans parler des menaces de mort si ça continue.

-          Tu crois ?

-          Ben qui sait ? Ils vont peut-être la jouer Samuel Paty.

-          Tu me fous la trouille toi.

Soudain un jeune assistant d’éducation arriva derrière elles et les interrompit

-          Eh ben il y a qu’à dire : Abracabaya, dis-moi si ta robe est une abaya !

-          Ah ah ah, très drôle, dit l’une.

-          En tout cas, déjà l’année dernière ce boulot m’a fait chier, mais cette année ça va être pire. Je me demande si je vais pas me tirer d’ici.

Et le jeune homme conclut.

-          Moi, demain, j’arrive en bermuda et par-dessus je mets mon abaya que je vais me couper aux genoux.

-          Chiche ? Tu vas lancer une mode masculine alors, super. Tu gagneras plus si tu es Influenceur !

-          En tout cas, pour les hommes, sache qu'on dit pas abaya, mais qamis !

Et ils partirent en trainant les pieds vers la salle où ils devaient avoir une réunion avec les CPE*

 

*Conseiller Principal d’Education

PS : prochain texte, samedi.

 

 

8 septembre 2023

Enigme

A 60 ans, après deux divorces, il avait épousé une femme de vingt ans de moins que lui qui avait toujours vécu seule. « Cela ne va pas durer longtemps ! » avait dit certains mauvais esprits. Pourtant si ! Et à 90 ans, avec ses cheveux teints, il en faisait vingt de moins ; quant à elle, avec ses cheveux blancs, elle en faisait vingt de plus.  La couleur des cheveux était-elle la seule explication de ce  rajeunissement  et de ce vieillissement chez l'un et chez l'autre ?

PS : prochain texte, mardi.

 

5 septembre 2023

L’instrument

Il était contrebassiste, son père était contrebassiste, son grand-père et son arrière-grand-père avaient été contrebassistes.  Un instrument que sa famille vénérait. Le seul problème : cette "maîtresse" l’obligeait à être considéré comme un hors-la-loi et elle lui coûtait cher. A chaque fois qu’il voyageait en train avec elle - les voitures avaient été banies de sa vie après un grave accident -  il le faisait la boule au ventre. Par deux fois les contrôleurs lui avaient fait payer une amende faramineuse car il n’avait pas le droit de voyager avec un instrument de plus de 1m30. Un « putain de merde vous vous foutez de ma gueule ! » lui avait échappé de la bouche ces deux fois-là, et l’amende avait failli être doublée. La troisième fois, il eut plus de chance. La contrôleuse avait elle-même un père contrebassiste et lui avait dit.

-           Motus et bouche cousue, un ? Mon père joue du même instrument que vous. Une fois, il a même été débarqué d’un train, vous vous rendez compte ! Bon voyage et bon concert à Orléans ; Que la contrebasse soit avec vous !

-          Merci. peut-être vous reverrai-je ?

-          Qui sait ? La SNCF nous fait beaucoup voyager en tant que contrôleur. Mais j'imagine que vous aussi, en tant que          contrebassiste !

-          Je suis sûr que nous nous reverrons. La contrebasse non plus ne vous oubliera pas.

Il regarda la jeune femme partir dans son uniforme sévère et il lui fit un dernier signe de la main.

PS : prochain texte, vendredi.

 

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