Peut-on juste aimer une nuque ?
Je l'observais depuis un bon moment car le discours du conférencier me plongeait dans une somnolence sans nom ; il faut dire que ma soirée de la veille dans un bar du port avait été un peu trop arrosée et que je ressentais encore dans ma tête le ressac du pastis.
Elle était assise devant moi et tapait frénétiquement sur son clavier afin de prendre en note les moindres mots de l'intervenant ; tant d’application faisait bonheur à voir ! Joli profil, nuque gracieuse, des cheveux courts et châtains... Pourquoi ne l'inviterais-je pas à prendre un verre sur le port après le stage ? Mes yeux passaient alternativement de mon clavier, où j’essayais vainement de taper quelques notes cohérentes, à sa nuque... Oui, c'est vrai, c’était surtout sa nuque qui me fascinait, je ne savais pas pourquoi, ou plutôt si, je le savais trop bien, son long cou gracile me faisait penser à celui de la première femme que j'avais aimée.
Quand, à mon plus grand soulagement, l'intervenant a mis un point finale à sa conclusion, j'ai jeté un nouveau regard vers elle et c'est là que tout a basculé : son fond d'écran venait de faire apparaître le logo de l’UMP.
D’un mouvement sec j’ai fermé mon portable et j’ai rapidement quitté la salle.