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Presquevoix...

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8 octobre 2008

Le chef de service (texte de gballand)

Quand elle l’avait vu pour la première fois, elle s’était dit qu’il avait l’air caractériel, mais elle avait quand même accepté le poste. Au bout du deuxième jour, elle regrettait déjà d’avoir signé un contrat de six mois.

Le premier matin où le chef de service traversa son bureau pour aller dans le sien, il ne lui dit même pas bonjour. C’est à l’heure du café qu’il se souvint d’elle : « Un café sans sucre », lui cria-t-il de son bureau. Elle alla de mauvaise grâce à la machine à café. Quand elle revint, le café à la main, il grogna quelque chose qu’elle supposa être « Merci » et  lui cria de fermer la porte. Le deuxième et le troisième jour, le rituel ne changea pas, elle accusa le coup.

Le quatrième jour, quand  il traversa  son bureau, elle ne put s’empêcher de lui dire qu’un bonjour faisait toujours plaisir. Il lui répondit crûment  « Moi, les risettes, ça m’emmerde ! ». Elle ne répondit rien.

Mais Le cinquième jour, quand il lui demanda à nouveau, d’une voix impérieuse son café sans sucre, elle cria « Moi, aller chercher des cafés ça m’emmerde ! », elle n’avait rien à perdre. Seul le silence lui répondit ; elle s’en étonna.

Il ne se manifesta qu’à midi pile, comme les autres jours. Il s’approcha d’elle, menaçant, et aboya.

- C’est ma femme qui vous envoie  ?
- Votre femme, balbutia-t-elle, mais… mais non, pourquoi ? Je ne la connais pas !
- Parce que ma femme est une emmerdeuse, comme vous, hurla-t-il.
- Mais… j’ai juste dit…
- Parce que si vous vous êtes mis d’accord toutes les deux pour avoir ma peau, ça va marcher, et elle l’aura sa pension de reversion, elle l’aura !


Le visage de son chef de service devenait cramoisi et elle eut presque peur. Elle bredouilla néanmoins.


- Mais… Mais monsieur, je ne connais même  pas votre femme…
- Vous ne la connaissez pas ! Vous vous foutez de moi ? C’est déjà ce que me disait l’autre et elle n’a pas fait long feu.

Puis il sortit en claquant la porte. A peine remise de ses émotions, elle entendit un bruit sourd et un appel au secours qui semblait venir de la cage d’escalier. Elle crut même discerner la voix de son chef de service.

Elle  continua pourtant  à taper calmement  son rapport, comme si de rien n’était.

6 octobre 2008

L'inconnue (gballand)

Toutes les nuits, le même cauchemar, il est l’inconnue d’une équation qui ne peut se résoudre. Il se réveille en sueur, essaie de se rendormir, n’y parvient que longtemps après son réveil. Les matins qui suivent le cauchemar, la même inquiétude vague, des accélérations du pouls dans la journée et la sensation de disparaître à lui-même. Le jour où il se décide à en parler à son médecin, son rêve change légèrement, il y a deux inconnues dans son équation, et la résolution ne se fait toujours pas...

6 octobre 2008

Elle n'avait qu'une envie.

Elle n’avait qu’une envie, s’enfuir et pourtant elle restait là, immobile, la tête basse, les bras sans vie le long du corps, les épaules voutées en une attitude qui donnait, elle le savait, elle le sentait au plus profond d’elle, toute puissance à son adversaire. Pourtant elle ne faisait rien pour se défendre contre cette rafale de reproches injustifiés et négatifs.

Alors que les mots pleuvaient comme des pierres qui font mal à chaque impact, son esprit a fini par s’envoler dans un monde où les autres auraient été gentils avec elle, un monde où sa laideur serait reconnue sans rejet, un monde où sa timidité maladive serait une ouverture à plus de compassion et d’aide, un monde où elle aurait sa place. A ce rêve d’une vie meilleure, son visage s’éclaire et un sourire fleurit, telle une rose s’ouvrant au soleil qui la réchauffe. Elle ferme les yeux et se voit vêtue d’une belle robe en soie verte, chaussée d’escarpins à talons aiguilles mettant en valeur ses jambes qu’elle sait belles, son seul atout avait dit son père. Légère, elle descend l’escalier qui conduit à la cafétéria, faisant ainsi danser le tissu dans un ballet cadencé attirant tous les regards des mâles présents. Les autres femmes ne seraient pas jalouses car elles seraient amies, partageant confidences, espoirs, rêves en se soutenant lors des moments difficiles. Oui, ce serait bien…

- Bon, vous pouvez sortir mais que cela ne se reproduise plus, je ne veux pas avoir d’autres critiques vous concernant.

D’un coup de bâton symbolique, elle reprend douloureusement pied dans la réalité, son beau rêve éclaté comme un ballon que son chef aurait percé d’une aiguille . Elle peut sortir de ce bureau où elle n’a pas sa place, c’est le plus important. Alors qu’elle tourne les talons, son supérieur hiérarchique la rappelle.

- Encore une chose. Vous ne souriez jamais, vous êtes toujours dans votre coin, faites un effort que diable, vos collègues se plaignent de votre manque de collaboration, nous sommes une grande famille ! 

Elle ne dit toujours rien, se contente d’opiner du chef. Il en a de bonnes, faire un effort…comment peut-on sourire dans une...famille pareille ?

5 octobre 2008

« Chers » voisins ( texte de gballand )

Je vous écris parce que je suis à bout. Le médecin vient juste de sortir de chez moi ; il a diagnostiqué une dépression sévère. Déprimé ? Moi ? Je n’arrivais pas à le croire.

Depuis que vous vous êtes installés ici, dans cette maison mitoyenne de la mienne, ma vie a changé : deux années  sombres, pour ne pas dire noires. Dès que vous êtes arrivés – et j’ai maudit ce jour - je vous ai surnommé : Monsieur, Madame et l’Adolescent hirsute !

Comment ai-je supporté que Monsieur sorte les poubelles le mardi, le jeudi et le samedi matin, à grand renfort de couvercles et de porte claqués ; que Monsieur, encore lui, m’impose son bricolage le samedi, aux aurores, avec un choix de scies, de perceuses et de visseuses toutes aussi sonores les unes que les autres ; que Monsieur, toujours lui, tonde longuement et méticuleusement sa pelouse à 14 heures, le dimanche, alors que le règlement  stipule que la tonte ne peut commencer qu’à 16 heures.

Comment ne pas déprimer quand Madame interpelle son fils du rez-de-chaussée alors qu’il est au deuxième et joue  de la guitare avec des « bouchons » dans les oreilles, quand Madame, encore elle, apostrophe Monsieur du jardin pour un oui ou pour un non, en « gueulant », HERVE !!!, de sa voix suraiguë.

Comment survivre  quand l’Adolescent hirsute qui ne peut être que votre fils, fait hurler sa guitare électrique avec une constance remarquable, à des heures où les gens respectables se mettent au lit ? Jimmy Hendrix n’a-il jamais  de devoirs  à faire ? Ne connaît-il pas l’usage du livre ? Ignore-t-il  le respect d’autrui ?

Et pour finir, comment dormir, quand le couple que vous formez – et que vous n’auriez jamais dû former, croyez-en  l’avis d’un voisin éclairé par deux ans de vie presque commune avec vous  – se traite de noms d’oiseaux pour un oui ou pour un non, en ayant soin de rester au plus près de la cloison qui sépare nos deux chambres afin que j’entende tout en stéréophonie ?

Je pense que vous  pourrez comprendre, mes « chers » voisins, que l’homme que je suis, solitaire et discret, ne vous supporte plus, au point que ce « bonjour », que je me forçais  à vous adresser mécaniquement chaque jour, me soit devenu odieux et ne puisse plus passer la barrière de mes lèvres. Me croiriez-vous si je vous disais que récemment, des idées de meurtre m’ont même traversé l’esprit ?

J’ai préféré vous écrire - vous comprendrez aisément que la parole m’aurait desservi -  pour vous supplier de changer vos habitudes afin d’éviter un « carnage » qui ne ferait que troubler le voisinage.

Votre voisin déprimé.

PS : texte inspiré par ce site qui vous permet de trouver des voisins à la hauteur de vos espérances… mais aux Etats Unis.

4 octobre 2008

Le cauchemar (gballand)

Elle prend son petit déjeuner, l’œil éteint, quand son mari entre dans la cuisine et lui demande.
- Bien dormi ?
- Non, j’ai passé une nuit épouvantable, j’ai rêvé qu’il y avait des inondations, j’étais les pieds dans l’eau et je me demandais si j’allais en réchapper.
Il laisse passer un silence et  lui dit.
- Ben au moins, t’es contente de te réveiller !
Elle sourit. C’est vrai,  la  réalité a parfois ses avantages...

3 octobre 2008

Le catalogue du Vieux Campeur (gballand)

Il était étendu sur le lit et tournait les pages du catalogue du Vieux Campeur pendant qu’elle regardait son feuilleton quotidien à la télévision ; elle n’en ratait jamais aucun épisode.
Soudain elle cria.

- Arrête de tourner les pages, tu m’énerves.

Il continua comme si de rien n’était, trop occupé par son prochain achat : une tente igloo qui supporterait des températures de moins 20 degrés pour sa randonnée du mois de juin.

- Arrête avec ces pages je te dis !

Il leva les yeux de son catalogue et la regarda un instant. Elle était assise sur son fauteuil, la tête légèrement penchée, buvant les paroles de «  héros » sclérosés, interprétés par des acteurs au jeu navrant.  Il ne put s’empêcher de lui dire.

- Je me demande comment tu  fais pour supporter cette daube tous les soirs ! Moi, ça me fait gerber, et pourtant, je n’ai pas fait d’études littéraires ! Ah toi, la randonnée, le camping, les grands espaces, la toundra, l’aventure avec un grand A… ça te passe au-dessus de la tête, tu préfères t’abrutir avec ce feuilleton à la con !… Parfois, je me demande pourquoi on vit ensemble !

Elle resta silencieuse. Elle n’allait pas gâcher la fin de son feuilleton pour lui dire son fait. Ses sarcasmes, elle allait les lui faire avaler un à un au moment de la publicité. Tiens, pour commencer, elle lui parlerait de la visite impromptue de sa « chère » mère cette après-midi. Quand il saurait  qu’elle avait l’intention d’arriver avec arme et bagages dès la semaine prochaine pour rester dans leur chambre d’ami, et ce, pour une période indéterminée, ça lui ferait un choc ! Sa toundra et sa steppe, il n’était pas prêt d’y mettre les pieds !
Par contre elle, elle ne se disait pas non à un petit voyage en solitaire…

2 octobre 2008

Si j'étais un ange. (MBBS)

Les nuages filent à toute allure et j’aimerais parfois être un ange pour, de mon nuage, observer ce qui se passe alentour, aider dans la mesure du possible mais aussi prendre le temps de vivre.

Si j’étais un ange, je pourrais surfer sur les vagues du cumulonimbus et m’adonner ainsi à ce sport de glisse  sans risque de me retrouver à terre, les fesses en l’air, les genoux et les poignets endoloris par la chute qui ne manquerait pas de survenir…

Je pourrais paresser sur mon blanc hamac ouaté en toute quiétude, sans me dire que j’ai plein de choses importantes à faire…

Je pourrais voyager de Suisse en Afrique, d’Afrique en Asie, d’Asie en Australie, d’Australie en Amérique sans devoir montrer patte blanche aux frontières et sans polluer la planète…

Je pourrais chanter à tue-tête, faux bien sûr mais avec tout mon cœur, sans me soucier des voisins et de mes enfants qui se boucheraient les oreilles en me faisant comprendre que je devrais me taire…

Je pourrais faire coucou aux baleines et aux dauphins et les prévenir de l’arrivée des chalutiers permettant ainsi à ces espèces menacées de fuir…

Je pourrais surveiller la banquise qui se fracture et avertir les ours polaires de changer de territoire…

Je pourrais dénoncer les bateaux qui purgent leurs réservoirs en mer provoquant ainsi des nappes polluantes et désastreuses pour le faune et la flore marine…

Oui, je pourrais tout cela si j’étais un ange…mais…je n’en suis pas un et je vais continuer à regarder les surfeurs avec envie, tracer sur ma longue liste les tâches effectuées, voyager dans ma tête, siffler au lieu de chanter et pester contre l’incohérence des hommes face à notre belle nature !

Quant au hamac, j’en ai un beau mais je ne sais pas où l’accrocher, c’est bête hein !

2 octobre 2008

Et vous, qu’est-ce que vous voulez faire avant de mourir ? (gballand)

Voici une question qui ne peut laisser personne indifférent. Déjà penser à sa mort ce n’est pas drôle, mais penser à ce qu’on voudrait faire avant de mourir et qu’on ne fera sans doute pas, c’est encore moins drôle.
Certains répondront sérieusement, d’autres exécuteront une pirouette et retomberont sur leurs pieds de vivants alors que d’autres encore sombreront dans la dépression…

Mais tout ça ne me dit toujours pas ce que je voudrais faire avant de mourir … Zut, je ne trouve rien. Ah si, avant de mourir j’aimerais bien pouvoir toucher ma retraite ! Pas la peine de demander autre chose, je suis la reine de la procrastination ! Quant à ma retraite, je me demande même si je la toucherai un jour parce que, s’il m’est difficile de compter sur moi-même, je crois qu’il est encore plus difficile de compter sur l’Etat, surtout en ce moment, où l’Etat est dans tous ses états !

En tous cas, si vous n’avez pas d’idées sur ce que vous voulez faire avant de mourir, regardez ce que veulent faire les autres, c’est ici.

1 octobre 2008

C’était elle ( texte de gballand )

- Pourquoi me regardez-vous comme ça* ?
- Je ne sais pas moi…  parce que je vous trouve belle !
- C’est ça, foutez-vous de moi en plus, je ne vous dirai rien ! Et elle lui tourna le dos ostensiblement.

Il n’avait jamais rencontré une fille aussi piquante, au sens propre, mais il préféra ne pas lui répondre, faire comme si de rien n’était, et la suivre du regard à distance. Elle ne devait pas être de ces filles qui se laissent engluer dans le miel d’un discours. Il survola le rayon littérature étrangère sans la perdre des yeux.

Belle, elle ne l’était pas au sens classique du terme, mais elle avait touché son âme. L’expression peut paraître grave, mais c’est de ça qu’il s’agissait. Elle avait soulevé une petite pierre, là, au creux de l’enfance, et ce qu’il y avait sous la pierre venait de sortir de l’ombre.

Elle alla au rayon BD, il la suivit ; elle se dirigea vers le rayon CD, il lui emboîta le pas, mais elle stoppa net au milieu du rayon DVD et fit volte-face.

- Vous n’avez rien de mieux à faire que de me suivre ?
- J’ai décidé de vous consacrer ma journée.
- Vous m’avez demandé mon avis ?

Il parut surpris, ne répondit rien et elle continua.


- Il faut toujours demander aux femmes leur avis ! La prochaine fois, vous saurez !

Et elle le planta sur place sans qu’il ait eu le temps de lui dire qu’elle ressemblait à la femme qu’il aurait voulu aimer.

* phrase extraite d’une nouvelle de Jacques Sternberg « La Bifurcation »

30 septembre 2008

Saveurs et épices

Recette

Vous prenez une jolie salle boisée, poêle en pierre ollaire pour réchauffer l’atmosphère de départ, une longue table pour les convives et une exposition d’épices de toutes sortes, de toutes provenances et aux parfums enivrants.

Puis, vous mélangez les convives au fur et à mesure de leur arrivée, vous les mettez dans l’ambiance en leur servant un apéritif composé d’un sirop de fleurs de sureau, gin et Schweppes dans de jolies flûtes à champagne.

Quand les conversations vont bon train, vous conviez vos hôtes à s’asseoir et vous leur servez une petite salade tomates, concombres et oignons saupoudrée de coriandre fraîche.

Alors que les papilles sont en alerte, un petit voyage imaginaire à travers le monde des épices est offert. L’Inde, Madagascar, la Tasmanie, l’Egypte, La Réunion sont les étapes de cette épopée sans oublier le Maroc qui sera l’ultime escale de ce circuit épicé.

Comme vous ne désirez pas forcément que vos hôtes s’ennuient, vous accompagnez ce périple par des travaux pratiques. Vous leur fournissez un bol et une cuillère et vous faites passez dix-huit épices moulues qui entrent dans la composition du RAS EL HANOUT.

A savoir :

Coriandre – piments doux – piment Jamaïque – cardamome – macis – gingembre – cumin oriental – cannelle – poivre noir – nigelle – girofle – poivre long – maniguette – curcuma – ail poudre – sel et à volonté des boutons de rose et du piment fort.

Encouragez ces préparateurs occasionnels à humer les senteurs après chaque ajout, lesquelles senteurs vont évoluer au fil des minutes qui passent et emporter chacun dans un monde imaginaire.

Puis quand les nez seront pleins de sensations épicées, leurs servir un couscous marocain au mouton et au poulet relevé comme il se soit par un Ras El Hanout maison et accompagné d’Harissa pour les amateurs de sensations fortes.

Les ventres repus ne manqueront pas de clore ce repas par le traditionnel thé à la menthe servis dans des petits verres décorés.

Le poêle n’a plus que des cendres qui rougeoient et l’atmosphère est suffisamment chaude et conviviale pour que les timidités, les inhibitions fassent place aux rires et aux échanges d’un bout à l’autre de la table. Les conversations fusent, les thèmes de toutes sortes sont évoqués, défendus, travaillés tant et si bien que la soirée fortement avancée n’inspire aucunement l’envie de rentrer.

Vos hôtes sont bien mais vous, vous désirez clore. Vous leur fournissez alors des sachets joliment décorés pour qu’ils y mettent leur propre préparation épicée et c’est avec un petit souvenir qu’ils finiront par repartir dans leurs pénates, les habits tous imprégnés de parfums divers et le ventre plein et satisfait mais point trop lourd.

Satisfait de votre prestation, vous pouvez à votre tour aller vous coucher, la conscience en paix même sachant vos hôtes sur les routes, car la soirée si elle fut gustative n’a pas, à part l’apéritif de départ, eu besoin de (trop) boissons alcoolisées pour être réussie.

 

Recette tirée de l’expérience vécue lors de la semaine du goût, au Monde des Epices, à Seigneux dans le canton de Vaud en Suisse.

www.poivre.ch

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