Désespérés, ils erraient dans les rues de cette ville de bord de mer depuis 10 minutes sans trouver aucune place pour se garer, quand soudain sa mère s’écria d’une voix impatiente. - Non, mais regarde-moi ça, il y a plein de places handicapés et ils occupent même pas leur place, les handicapés ! Tu n’as qu’à t’y mettre !
Voilà un an qu' il s'envoyait des lettres, tous les jours, sans jamais indiquer l'expéditeur. Sa femme s'étonnait de ce courrier massif, mais elle préférait se taire, elle ne voulait pas lui laisser penser qu'elle s'intéressait à lui. Quand il les parcourait, il prenait un air mystérieux. Parfois il souriait, mais la plupart du temps son visage n'exprimait rien.
Jamais elle n'avait ouvert son courrier, mais l'envie la tenaillait de lire l'une de ces lettres, non qu'elle fût jalouse - elle ne l'aimait plus depuis longtemps – mais curieuse.
Le jour où elle le retrouva pendu à la cave et où elle vit le sol jonché de lettres, elle comprit. Chaque lettre répétait le même texte, mot pour mot :
" Voilà une bonne chose de faite, je me suis suicidé ; j'ai cru que je n'y arriverai jamais, mais si, la méthode Coué fait des merveilles, n’est-ce pas ce que tu me disais ? Tu es devant moi, ma tête pend au bout d’une corde et je suis enfin débarrassé de moi… et de toi.
Jean
PS : les enfants sont grands, tu inventeras le mensonge qui t'arrange, comme d'habitude, je te fais confiance."
Etrange, cette panique qui s'empare de nous lorsque les premières rides arrivent, sans parler de la détresse qui nous saisit quand deux poches impitoyables soulignent nos yeux presbytes et de l'angoisse qui s'installe quand nos joues, autrefois si fermes, se ramollissent irrémédiablement !
Je me demande s'il ne vaudrait pas mieux se faire opérer dès la naissance… pour avoir une tête de vieux !
Il n’a eu qu’un but dans sa vie : me contredire. Quand j’indiquais une route, il en prenait une autre ; si je montrais le Nord, il regardait le Sud et si je disais rouge, il me répondait vert. Notre vie était un contresens. Nous avions atteint ce que j’ appellerais « le seuil de l’angle mort ».
Au bout de 5 ans, nous ne nous parlions plus. Nous griffonnions sur des papiers les mots du quotidien : « Ferme le gaz !», « Donne à manger au chien ! » ou « Achète du pain ! »…
Un beau jour, j’ai cessé de lui écrire, je n’avais plus d’encre. C’est à ce moment là qu’a germé en moi l’idée de le tuer, idée chassée très vite. Moi ? Le tuer ? Non, je respecte trop la vie, même la sienne !
Lui, par contre, il n’a pas hésité, et maintenant je coule des jours paisibles sur cette colline… Vous voulez savoir où j’habite ? Et bien c’est par là… vous suivez l’allée centrale, vous prenez la cinquième allée à gauche, et c’est tout au fond, juste sous l’érable. Vous verrez, elle est en marbre rose. Ah, ça, il m’a gâtée !
- Et Christine, comment elle va ? M’a demandé mon amie à la fin du repas. En cinq minutes, je lui ai dit tout le mal que je pensais de Christine. Dommage qu'elle n’ait pas eu plus de temps à me consacrer ! Avant qu’elle ne parte, je l’ai remerciée chaleureusement. Je me demande si elle a compris pourquoi
Je voudrais t’envoyer mille mots
d’amour pour contrer la maladie qui s’empare de toi. Chaque mot serait comme un
aimant qui garderait collé à lui les souvenirs, les idées, les pensées que ton
cerveau laisse partir sans que tu en sois consciente.
Mille mots d’amour pour te dire
tout ce que j’ai oublié de te dire durant toutes ces années, obnubilée par une
vie où tout était pressant sauf toi !
Mille mots d’amour pour récupérer
la chaleur de ta tendresse si peu expansive par une pudeur que peut expliquer
ta vie d’orpheline.
Mille mots d’amour pour retrouver
les fous-rires, les peines et les joies que nous avons partagés au fil des
jours communs.
Mille mots d’amour pour te
remercier d’avoir su me transmettre tes valeurs même si elles se sont envolées
au fil des années, écrasées par les chocs de la vie.
Mille mots d’amour pour m’avoir
si bien défendue face à ceux et celles qui me faisaient le mal que tu ne
pouvais tolérer.
Mille mots d’amour pour les idées
tapies en toi, refoulées par une éducation rigide que tu as quand même pu me
transmettre même si à ton insu.
De ces mots posés sur le papier,
j’ai tiré une citation qui m’a fait penser que le monde qui devient le tien
n’est peut-être pas si mal pour toi.
« Il y a des cas où la
vieillesse donne, non pas une éternelle jeunesse, mais au contraire une
souveraine liberté »*
Ils se faisaient face dans le compartiment de deuxième classe qu’ils occupaient seuls. L’homme pencha légèrement sa tête vers la femme et lui dit.
- Je voudrais ne jamais quitter ce compartiment. - On se connaît à peine, protesta-t-elle. - J’ai l’impression de vous connaître depuis toujours.
Le soleil se couchait et on entendait, de temps à autre, des bruits de conversations dans le couloir. Elle lui avait déjà confié qu’elle ne pouvait pas rester longtemps avec un homme et qu’elle ne savait pas aimer…. Tant de choses en si peu de temps ! Il la dévorait de ses yeux gris et elle ne savait plus où poser son regard, il était si près.
- Il y a en vous quelque chose de... Donnez-moi votre main.
Il n’attendit pas sa réponse et la lui prit. Il la caressa d’une façon si étrange qu’elle finit par la lui abandonner totalement. Il lui chuchotait des mots tendres qu’elle connaissait trop bien. La nuit commençait à tomber, on ne distinguait plus le contour des choses, et le compartiment se laissait gagner par l'obscurité. Elle ferma un instant les yeux et sentit ses lèvres sur les siennes ; la sensation était délicieuse, mais soudain elle pensa à l’arrivée du train et à Charles qui l’attendrait. Elle avait encore trois heures devant elle, mais saurait-elle encore embrasser Charles si elle avait le goût de l’étranger sur la bouche ?
Le TGV s’apprête à démarrer, les
dernières personnes s’installent. Une jeune femme arrive, essoufflée et cherche
sa place, située deux rangs après la mienne. Elle fait le geste de saisir sa
petite valise pour la ranger au-dessus de sa tête et aussitôt, deux messieurs
volent à son secours. Remerciements de la belle et sourire satisfait de celui
qui a emporté la mise, à savoir être galant et se faire récompenser ! Il
faut avouer que la jeune femme est mignonne et répond aux critères de séduction
qui font qu’un homme peut y être sensible. Arrive une autre femme qui me faire
revivre la même scène que précédemment sauf que la personne qui tient le
premier rôle est sensiblement plus âgée. Là, aucun homme ne vient à son secours
alors qu’elle fait mine de soulever sa lourde valise. Elle évalue l’effort mais
finalement demande au plus proche représentant du sexe fort de l’aider. La
galanterie spontanée ne serait donc réservée qu’à de jeunes et belles
femmes ?
Lors d’une conférence donnée par
Benoîte Groulx (encore elle !) et dans les questions qui lui ont été
adressées, une a suscité les rires de la salle par sa réponse. A la
question : « comment sont les hommes autour de vous ? »
elle a répondu : « Inexistants car pour eux, je suis devenue
transparente. ».
Hélas, dois-je comprendre que mon
âge avançant, mon quotient attractif diminuera de telle sorte que plus aucun
regard masculin ne se posera sur ma petite personne ? Pourquoi un homme
aux tempes argentées, à la chevelure blanche reste-t-il séduisant et pourquoi
une femme aux mèches grises l’est-elle moins ? Pourquoi un homme mûr
peut-il convoler avec une femme de 20 voire 30 ans de moins que lui sans
provoquer quolibets et critiques qui seront le lot d’une femme épousant jeune
beau ?
Un doute m’assaille au moment où
j’écris ces lignes et je pars à la recherche des définitions* des mots séduire,
« détourner du bien, faire tomber en faute », attractif-ve « qui
attire » et galanterie « courtoisie que l’on témoigne aux
femmes ». Un homme galant peut aussi être « un homme redoutable pour
la vertu des femmes » mais il n’est pas précisé qu’une galante peut être
une femme redoutable pour la vertu des hommes…
Et pourquoi ne pas renverser les
rôles, changeons la donne…mais à notre façon ! On pourrait aller vers un
collègue et lui dire qu’il a de belles mains, que son petit ventre rond est un
oreiller où l’on poserait volontiers notre tête, que sa calvitie naissante est
attachante, tout comme ses kilos en trop, que nous aimerions bien lui faire le
coup de la panne, que….Mais je repars dans les stéréotypes alors que je voulais
proposer des choses différentes ? Caramba, difficile d’éviter les clichés
quand il s’agit des rapports hommes-femmes-séduction et il faut reconnaître que
j’aime les hommes galants et courtois. Pfff, je ne suis pas au bout de mon
questionnement !
- Tu te souviens quand tu as dit à la femme de Gérard qu’elle était mieux en photo qu’au naturel ? Tu as même ajouté que si elle ne t’avait pas dit que c’était elle sur la photo, tu ne l’aurais même pas reconnue ! - Moi ? J’ai dit ça ? Franchement, ça m'étonnerait, parce que les photos des autres, je les regarde jamais, ça ne m’intéresse pas !
« Je vous tuerai »*, c’est ce qu’avait hurlé Michel Riboux, son chef de service, quand il lui avait confessé qu’il couchait avec sa femme. Pourquoi lui avait-il tout raconté ? Il faut dire qu'il ne pouvait plus supporter sa prévenance – « Et vous prendrez bien un apéritif » par ci ou « Restez dîner avec nous, vous ferez plaisir à ma femme » par là… - tout ça lui donnait des bouffées de culpabilité. Il n’avait jamais supporté le mensonge ; une question d’éducation, sans doute.
Depuis qu’il était à l’hôpital, il refaisait chaque jour, en pensée, la course qui l’avait amené à sauter par-dessus le portail d'entrée des Riboux pour échapper à la fureur du mari trompé. Mais le portail était trop haut et son élan trop court. Résultat : le col du fémur cassé, la hanche déboîtée, trois dents de devant envolées, un contrat de travail qui ne serait pas renouvelé et une maîtresse qui l’ignorait...
* phrase extraite de « l’ours en peluche » de Simenon