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Presquevoix...

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28 février 2009

L’homme du Paris-Bordeaux (gballand)

Je suis un homme vague*, lui avait-il dit alors qu’ils conversaient agréablement dans un compartiment de première classe d’un train qui les menait vers Bordeaux. Elle avait simplement hoché de la tête, comme elle savait si bien le faire depuis son enfance. Avant que le train n’arrive en gare, il lui avait demandé son numéro de téléphone et son adresse et elle les lui avaient donnés.

Trois jours après son retour, on sonna à l’interphone. Elle entendit distinctement une voix qui disait « Bonjour, c’est moi, l’homme du Paris-Bordeaux. » Elle revit ses yeux clairs et  son visage carré aux traits presque durs. Elle hocha la tête, comme elle le faisait depuis son enfance et elle appuya sur le bouton de l’interphone.


Aujourd’hui encore, elle se souvient de cette porte qu’elle avait ouverte. Jamais plus elle ne  la refermerait.

* phrase tirée d’un roman de Fred Vargas

27 février 2009

Une langue étrangère, sinon rien (gballand)

Vous pensiez qu’étudier une langue étrangère était une perte de temps ? Vous doutiez de l’importance des langues ? Vous n’imaginiez pas qu’une langue étrangère pouvait  vous sauver la vie ?
Allez donc voir cette vidéo -  « The importance of being bilingual » ! Après,  vous vous précipiterez sur la première méthode de langue venue... question de survie !

« Qui ne connaît pas de langues étrangères ne connaît pas sa langue » disait Goethe.

26 février 2009

Le maître-nageur (gballand)

surveillanceIl était maître-nageur, elle était hôtesse de l’air. L’eau la terrorisait, l’air le tétanisait. Il ne prenait jamais l’avion. ; elle s’interdisait le bateau. Quand elle prenait son bain, c’était  sous haute protection, celle de son mari.
La veille de son départ pour Nouméa sur le vol A 495 de la compagnie Air France, elle se noya dans sa baignoire ; une défaillance humaine. Une minute de somnolence du maître-nageur avait suffi.
L’enquête conclut à un accident ; il fut lavé de tous soupçons.

* Photo vue sur ce blog

« Ele vigiava-a de um modo obsessivo »peut être traduit ainisi « il la surveillait de façon obsessionnelle »

25 février 2009

Obsession (texte de gballand)

Ma femme était belle et douce, je l’aimais d’un amour particulier. Depuis que nous nous étions mariés, un an plus tôt, je ne pouvais m’empêcher de la surveiller de façon obsessionnelle. Elle sortait, je la suivais, elle téléphonait, je tendais l’oreille ; elle s’enfermait dans la salle de bain, je fouillais son sac. C’était devenu une habitude, j’étais son double, son ombre. Jamais elle ne me faisait une seule réflexion à ce sujet. Quand elle rentrait, je lui demandais où elle était allée et elle me racontait sa journée. Sauf mardi dernier où elle me répondit.
- Mais tu le sais bien !
Je répliquai le plus naturellement du monde.
- Comment le saurais-je ? J’ai travaillé ici tout l’après-midi.
Elle se contenta de sourire, de déposer un baiser sur mon front et, le soir, je m’endormis en elle.
Sans doute se lassa-t-elle d’être surveillée, et ce qu’elle prit au début pour une marque d’amour devint pour elle un supplice. Hier, elle était assise à la terrasse d’un café avec un homme. Elle dut m’apercevoir puisqu’elle me fit un signe. Je ne pus faire autrement que d’aller vers elle. L’homme assis à sa table était quelconque, il portait un costume foncé et ses cheveux grisonnants donnaient à son visage un air paisible.

- Jean, dit-elle d’une voix calme, je te présente mon futur amant.
L’homme qui l'accompagnait ne broncha pas.
- Paul sera mon amant cette après-midi, ajouta-t-elle. Je préfère t’avertir. J’ai loué une chambre à l’hôtel de la cathédrale, à 16 heures. Je rentrerai  tard, ne m’attends pas.

Je crois que je suis parti sans rien dire, je ne me souviens plus. J’ai passé une fin d’après midi infernale à les imaginer en train de faire l’amour. J’entendais même leurs râles et je dus me boucher les oreilles. Ce soir-là, elle revint beaucoup plus tard qu’à l’habitude. Je fis semblant de rien. Elle aussi. En la voyant s’endormir de façon  sereine alors que l’insomnie me terrassait, une idée me vint ; et je savais que je ne trouverais la paix que lorsque je serais passé à l’acte : il me fallait la tuer.

24 février 2009

L’entretien (texte de gballand)

- Pour être franc, je n’ai pas vraiment de questions à vous poser * mais …
Et à ce moment-là, il la dévisagea d’une façon étrange. Afin d’éviter de rencontrer ses yeux, elle fit mine de chercher quelque chose dans son sac. Allait-il lui demander si elle avait l’expérience de la chose ?
- En fait, je me demandais si vous aviez déjà fait ça auparavant, vous me paraissez bien jeune pour ce genre de métier.
Devait-elle lui dire la vérité ou lui débiter la phrase toute faite qu’elle avait apprise par cœur le matin-même ? 
- J’ai déjà eu une expérience dans la profession, mais à Londres, alors je n’ai pas vraiment de lettres de recommandation.
- Parfait, parfait, l’interrompit-il soulagé, je n’ai aucune raison de ne pas vous croire.
Vous commencerez demain. Bénédicte vous montrera votre loge et vous indiquera ce que vous devez faire. Quant au reste, c’est à vous de juger jusqu’où vous pouvez aller…
Puis, il se leva et lui tendit une main molle dont elle garda longtemps le souvenir...

* phrase extraite de l’énigmatique  nouvelle  deYoko Ogawa, l ‘annulaire

23 février 2009

Le rein (gballand)

Elle décida de divorcer, son mari lui devenait li-tté-ra-le-ment insupportable. Contrarié, celui-ci saisit aussitôt son avocat : si elle divorce, qu’elle me rende mon rein ! C’était un don par amour et elle ne veut plus de mon amour, se justifia-t-il le plus sérieusement du monde.

PS : brève écrite à partir d’une histoire vraie

22 février 2009

L’accent (texte de gballand)

Un matin, elle se réveilla avec l’accent américain. Au début, elle ne le remarqua  pas, c’est son mari qui le lui signala, l’air agacé.
- Arrête de prendre cet accent s’il te plaît, surtout celui-là !
- Quel accent ? répondit-elle étonnée.
Pourtant, ni l'anglais, ni l'Amérique ne lui étaient familiers ; à n’y rien comprendre ! Le médecin se déclara impuissant à vaincre son accent et lui conseilla de prendre son mal en patience. Il avait même ajouté « Patience et longueur de temps font plus que force ni que rage. » Elle avait pensé en son for intérieur qu’il se moquait certainement d’elle.
Sur les conseils d’une amie, elle alla voir un psychanalyste renommé. Il l’écouta patiemment et, à la fin de son histoire, il lui dit posément.
- Je ne peux rien pour vous, désolé.
Excédée par sa réponse, elle s’entendit lui riposter avec une aisance désarmante.
- You’re a fucking ass hole* !
A partir de ce jour-là, elle ne s’exprima plus qu’en anglais et rien ne put la faire changer de langue. Son mari, qui ne comprenait ni ne parlait l’anglais, la quitta ; et son patron, dont l’entreprise exportait essentiellement vers l’Europe du Sud, la licencia. Ce départ et ce licenciement ne semblèrent pas l’affecter outre mesure, c’était comme si on la débarrassait de vêtements trop étroits.
Un mois plus tard, elle partait pour New York avec pour tout bagage un minuscule sac à main.

* Vous êtes un foutu connard ( traduction approximative )

21 février 2009

Le loto (gballand)

Pendants 15 ans,  tous les mardis, elle avait joué invariablement  les numéros 1, 2 , 3, 4, 5, 6. Ce soir-là, elle vit apparaître sur l'écran de télévision les boules 4, 5, 6, 7, 8 et  9. Désespérée, elle avala deux tubes de somnifères. Ce fut son dernier loto.

20 février 2009

La courte échelle (texte de gballand)

« Fais-moi la courte échelle, il faut que je vérifie un truc ! », C’est ce qu’elle lui avait dit la première fois qu’elle lui avait vraiment parlé. Est-ce qu’on demande ça à un garçon la première fois  ? Il n’avait pourtant pas refusé et avait placé ses mains tout contre le mur afin qu’elle puisse se hisser. Il faisait beau, une brise légère agitait les feuillages et, pendant qu’elle regardait de l’autre côté du mur, lui regardait ses jambes blanches qu’il aurait bien aimé caresser.
- Je t’ai pas demandé de regarder mes jambes !
Comment avait-elle su ? Et elle avait rajouté comme par provocation.
- Mais si ça t’amuse,  te gêne pas !
Il avait rougi. Juste après, elle avait poussé un cri de surprise et avait dit d’un ton dépité.
- Ils font l’amour !
- Qui ?
- Lui et elle.
- Tu les connais ?
- Lui, oui.
C’est tout ce qu’elle avait daigné lui dire.
- Aide-moi à descendre, avait-elle ajouté d’un ton sec, j’en ai assez vu pour aujourd’hui.
Une fois à terre, elle l’avait regardé droit dans les yeux en lui demandant.
- Je te plais ?
Il avait répondu que oui, sans oser fixer ses yeux clairs.
- Alors fais-moi l’amour !
- Maintenant ? Avait-il articulé la gorge sèche.
- Oui ! C’est  maintenant ou jamais !
Et, les yeux brillants, elle s’était collée contre le mur.

PS : texte écrit à partir d’une consigne du blog des « impromptus littéraires ».

19 février 2009

Les mots (gballand)

J’ai servi tous mes mots* et vomi toute ma bile. Je suis exsangue, murée dans la marge de ma page blanche. On ne repasse jamais les plats, je devrais le savoir. Mon corps résonne du meurtre de mots avortés et mes phrases sont des friches où la colère grave ses lettres dans la terre sèche. Un jour j’y mettrai le feu, je le ferai, et quand les flammes jailliront, les mots  seront bien forcés de sortir en gueulant leur rage de vivre.

* Je me suis inspirée de la phrase de Lidia, du blog « petites régurgitations »   pour écrire ce texte.

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