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Presquevoix...

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15 janvier 2014

L’ami

Quand son ami Jean, après les salutations d’usage, lui avait dit.

-          Tiens, jeudi dernier  j’ai vu ta femme au " café des cerises ", mais je n’ai pas osé aller lui dire bonjour.

Intrigué il rétorqua.

-          Ah bon ? Et pourquoi ?

-          En fait elle était avec un type et… ils avaient l’air tellement pris par leur conversation que j’ai eu peur de les déranger.

Il ne répondit rien. Qu’aurait-il pu  dire à Jean ? Qu’il le  remerciait, au nom de leur amitié, de lui signaler que sa femme avait des conversations « passionnées » avec un autre homme ?

C'était sans doute absurde mais, depuis ce jour-là, un soupçon empoisonnait sa vie…

13 janvier 2014

Duo

Aujourd’hui, avec caro-carito, nos textes se croisent en un  duo stimulant : son texte est sur Presquevoix, quant à mon texte, il  est sur son blog.

La consigne était la suivante : écrire  à partir de cet article.

 

Un dieu familier

 

Une menotte dodue tente d’arracher la photographie qu’elle tient entre ses mains. Vanessa gronde doucement « Ma photo de classe ! Pas touche, Minouchette... » Heureusement, un oiseau fait une plongée non loin de la petite, elle tourne la tête. Minouchette aperçoit alors ses camions rouges et bleus. Oubliée la photo !

Trente et un élèves. Vanessa se tient au deuxième rang sur la droite. On est toujours mal fringué sur les photos de classe, tendance qui s’accentue avec le temps. Des bouches crispés et les yeux fixés sur le photographe. Vanessa ne sourit pas. On disait d’elle qu’elle était étrange. Sans doute murmurait-on bien d’autres choses car Vanessa surprenait parfois des regards en dessous. Elle n’avait jamais voulu savoir.

Bizarre et un peu effrayante depuis ce jour où une des grandes 3ème 5, une Patricia, l’avait cherchée. Vanessa s’était défendue, mordant, griffant. À la fin, elle lui avait jeté des mots comme une malédiction, comme dans les sagas familiales qu’elle dévorait en cachette. Genre : « Tu me touches, quelque chose te le fera regretter !» Bien sûr, elle n’avait ni troisième œil, ni fluide particulier mais le lendemain la Patricia était tombée. Bilan : une vilaine fracture, opération lourde, absence. On laissa Vanessa en paix, elle était bizarre cette fille.

Elle passe son index sur les visages dont les noms lui reviennent lentement en mémoire, le papier est froissé par endroits, les ridules des années, même sur les photos. Elle n’a jamais su ce qu’ils étaient devenus.

Elle se souvient d’un cours où le prof avait parlé des divinités du panthéon romain. Elle n’avait retenu que ces étranges dieux gardiens, les pénates qui se transmettaient de génération en génération. Elle avait aussitôt transposé la présence de ces petits dieux héréditaires dans la réalité. Elle imaginait sans peine celui de Constantin, une statue  tirée à quatre épingles lui soufflant à l’oreille de devenir comme son père et sa mère médecin. Celui de Frédéric au corps sans doute identiquement noueux. Celui-là ne devait causer que de tracteurs. Celui de la jolie Lucie devait avoir l’accent de cette mère qui joignait difficilement les deux bouts et  qui encourageait sa fille à être instit : elle savait y faire avec ses deux petits frères. Instit ou, si c’était trop dur, garder des enfants, même si sa fille était la plus brillante de leur classe. À moins d’un coup de pouce du destin, tous suivraient ce qui avait été tracé par ces dieux discrets et efficaces.

Vanessa scrute certains visages, elle les a peut-être croisés en retournant chez ses parents pour un week-end sans les reconnaître. Pour certains, elle devine sans peine ce qu’ils sont devenus : pas grand-chose. Si elle n’a jamais possédé de don ou d’aucun talent relevant de l’étrange, Vanessa sait décrypter ce que cachent les replis des autres : entre attitudes, mots, vêtements choisis avec soin ou avec provocation, négligence aussi, déceler l‘expression trop contrôlée ou cette posture quand l’on se croit inobservé.

Vanessa repose la photo. Trente et un visages et, comme toutes les photos, pas un pli. Même la présence de la fille étrange se fond avec celle des autres. À la surface.

11 janvier 2014

Le cadeau

Sa mère lui avait donné son cadeau en disant.

-          Bon, je sais que t’aimes pas le whisky, mais j’avais pas d’idées.

Il ouvrit le paquet et la remercia en souriant, comme si de rien n’était. Il pensa juste que c’était le cinquième Noël où il recevait une bouteille de whisky.

 

 

9 janvier 2014

le psychothérapeute

Après son entretien hebdomadaire de 30 minutes du mercredi après-midi, M. Simon s’était senti particulièrement léger. Son psychothérapeute venait de lui démontrer, de sa douce voix, qu’il n’avait aucune raison de se sous-estimer et que sa peur  des maladresses ne devait en aucun cas le tétaniser. Il  avait conclu en disant : qui n’a jamais commis de maladresses dans sa vie ?

Après le traditionnel « Nous allons nous arrêter là. », M. Simon se leva, léger, prit son manteau et s’employa à enfiler ses manches. C’est à ce moment qu’il entendit le bruit horrible. Aussitôt le psychothérapeute rugit.

-          Putain, vous êtes vraiment nul. Vous savez combien il m’a coûté ce vase de Chine que vous venez de foutre en l’air ?

M. Simon partit la tête basse. Finalement, pensa-t-il, les mots avaient-ils un sens ?

7 janvier 2014

La boutique

Pastelle

Elle avait changé de région et maintenant elle tenait une boutique, non loin de l’église de cette petite ville choisie pour son calme. Elle ne vendait presque rien, la boutique n’était qu’un prétexte dont elle ne retirait aucun bénéfice. Si elle ouvrait à 19 h31, exactement, la fermeture n’était jamais programmée ; elle dépendait de deux choses : des désirs de ses clients et de son état de fatigue.

Au comptoir on pouvait trouver de quoi boire et grignoter, mais surtout, au fond de la boutique, il y avait « le boudoir des pleurs », une petite pièce accueillante, unique en son genre, où les clients pouvaient s’isoler pour pleurer à volonté.

 

PS : merci à Pastelle de m’avoir gentiment prêté sa photo. 

5 janvier 2014

Amour

Un jour, l’air de rien, elle m’avait dit qu’au moins deux cent treize hommes étaient tombés amoureux d’elle. J’avais été étonnée de sa précision et admirative de sa mémoire, sans parler de sa performance ! Voyant mon étonnement elle avait ajouté.

-          Tu sais, à chaque fois je note leur nom dans un grand cahier.

-          Et comment sais-tu qu’ils sont tombés amoureux de toi ? avais-je rétorqué.

Elle avait souri et m’avait dit, catégorique.

-  Ces choses-là, ça ne trompe pas !

Depuis sa confession, je fais la même chose qu’elle, je note leurs noms… mais moi, je n’en suis qu’à trois !

3 janvier 2014

Les autres

Les autres lui servaient juste de décor. Elle ne leur accordait pas plus de place qu’à une chaise ou à un porte-manteau. Et si, par le plus grand des hasards, la chaise ou le porte manteau s’avisaient d’émettre une opinion, elle se chargeait de les remettre à leur place su-le-champ ; le temps n’était pas encore venu où les objets lui cloueraient le bec.

 

1 janvier 2014

Question

Combien de crapauds devrait-elle encore embrasser en 2014 avant de trouver le vrai prince charmant ? C'était sa seule et unique question en ce premier janvier.

30 décembre 2013

Le père Noël ( dernier épisode)

 

4.Entretien entre le psychiatre et le commissaire

Le commissaire attendait le psychiatre dans la salle d’attente. Il aurait préféré lui parler plus tard, surtout après l’entretien éprouvant qu’il avait eu avec la présumée coupable 24 heures plus tôt, mais le psychiatre avait insisté, disant qu’il devait mettre au point un certain nombre de choses.

 Il n’avait jamais eu de sympathie particulière pour les psychiatres, surtout depuis que sa femme avait multiplié les rendez-vous chez l’un d’entre eux tout au long de l’année dernière. Cela s’était d'ailleurs conclu par son départ de la maison avec les enfants !

 Il fut surpris par sa jeunesse et sa fragilité apparente. Celui-ci lui indiqua son bureau d’un geste avenant et lui demanda de lui parler de l’affaire ; le commissaire s’exécuta sans se faire prier.

–        Quand je suis arrivé sur les lieux la pauvre fille était assise à côté du cadavre le regard perdu. Je dis la pauvre fille, mais en même temps quand elle s’est jetée sur moi au commissariat, elle n’avait pas l’air si fragile que ça ! Je crois que je l’aurais réduite en bouillie avec grand plaisir mais on m’a appris à bien me conduire avec les femmes.

–        A votre avis pourquoi s’est-elle jetée sur vous, Monsieur le Commissaire ?

–        Elle est cinglée, ce n’est pas la peine d’avoir fait des études de psychologie pour s’en rendre compte !

–        Celui qui a des notions de psychologie, ici, c’est moi, reprit le psychiatre. A part le fait d’être cinglée, il n’y a pas quelque chose que vous auriez dit qui aurait pu la pousser dans ses retranchements ?

–        Vraiment, je ne vois pas docteur.

–        Cherchez un  peu…

–     Je lui ai juste dit que, comme elle n’était pas coopérative, on allait faire venir sa mère et son ex petit ami pour mieux comprendre les choses !

–        Et c’est là qu’elle vous a sauté à la gorge ?

–        Exactement !

–        Parfait !

Le calme du psychiatre finissait par l’exaspérer. Qu’est-ce qu’il entendait par « Parfait ! ». Et cette voix doucereuse avec laquelle il lui parlait, dans quel but ? Et pourquoi ce silence où ses yeux bleus inexpressifs semblaient trouver un  bonheur évident. Il lui posa une nouvelle question.

–        Vous aimez les femmes Monsieur le Commissaire ?

–        Quel rapport avec l’enquête ?

–        Ma patiente semble croire que vous vous acharnez sur elle parce qu’elle est une femme. Mais je suis sûr que ce n’est pas votre cas, n’est-ce pas ?

–        C’est vous le psychiatre ! dit-il sèchement.

Le psychiatre sourit et s’abîma dans un nouveau silence qu’il interrompit pour souligner.

–        Ma patiente, contrairement à ce que vous pouvez penser, est loin d’être folle. C’est juste une de ces jeunes femmes atteintes du syndrome du prince charmant et qui vérifie, hélas, homme après homme, que le prince charmant n’existe pas, sans vouloir pour autant se plier au principe de réalité. Un cas classique en somme. Seulement elle a rencontré le grand méchant loup. Vous connaissez l’histoire du petit chaperon rouge commissaire ? Vous l’avez certainement souvent raconté à vos enfants ?

–        Pourquoi vous me parlez de mes enfants ? répondit-il sur la défensive.

Le psychiatre sourit.

–        Pour vous mettre en situation. Donc, quand ma patiente a rencontré le grand méchant loup, elle ne le savait pas, comme dans l’histoire, puisqu’il l’avait trompé en se déguisant en Père Noël. Alors elle a voulu le séduire, comme une petite fille qui veut séduire un père qui ne la regarde pas souvent, mais à ce moment-là, elle a compris que le loup était vraiment très méchant – ce n’est pas rien un violeur, vous en conviendrez Monsieur le Commissaire ! – alors son instinct de survie l’a protégée et elle s’est défendue comme elle a pu. C’est très simple.

Le commissaire avait une question qui lui brûlait les lèvres mais il n’osait pas la poser. Ce blanc bec avec sa blouse blanche et sa psychologie lui en imposait sans qu’il ne veuille se l’avouer. Pourtant il se décida.

–        On vous a parlé de ma situation personnelle ?

–        Non, pourquoi ?

–        Oh… pour rien, c’est juste que je viens de me séparer de ma femme et que son psychiatre travaillait ici, alors…

–        Je l’ignorais Monsieur le Commissaire.

–        Bon, tout est bien qui finit bien alors ! On ne va pas se plaindre de la mort d’un violeur, n’est-ce pas ?

–        Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit, M. le Commissaire.

–      Quant à Lise Dessous, j’imagine que bientôt elle pourra rentrer chez elle grâce au soutien psychologique que vous lui dispensez.

Le psychiatre sourit à nouveau, ce qui eut pour effet immédiat d’énerver le commissaire qui s’agitait sur sa chaise. Il se demandait franchement si le type en blouse blanche ne se moquait pas ouvertement de lui. Il avait l’impression qu’il lui cachait une partie de la vérité sur cette fille. Son intuition faisait quand même partie de son boulot, même si elle n’était pas sanctionnée par un diplôme.

–        Vous avez une question,  commissaire ?

–        Eh bien oui, je vais profiter de vos lumières psychiatriques… Pourquoi cette fille s’est acharnée sur moi ?

–        Parce que vous vous êtes acharnée sur elle, tout simplement, vous l’avez peut-être prise pour une autre…

Un nouveau sourire vague du psychiatre acheva de déstabiliser le commissaire qui dut serrer les accoudoirs du fauteuil pour ne pas lui sauter dessus ; sa vivacité lui avait déjà joué des tours et il ne souhaitait pas gâcher sa carrière à cause de ce crétin en blouse blanche. Pourtant, après mûre réflexion, il lui dit ironique.

–        Ce cas a vraiment l’air de vous passionner docteur !

–        C’est sans doute une interprétation de ma part, mais ne seriez-vous pas en train de me demander si je suis amoureux de ma patiente ?

Le commissaire toussa gêné.

–        C’est effectivement ce que je voulais dire.

–        C’est ma première vraie patiente, commissaire, j’étais stagiaire avant. Donc je m’intéresse à son cas comme à un premier cas. J’essaie de bien faire les choses. Quant à ce qu'il se passe au fond de moi, est-ce que je le sais vraiment ! De toutes façons, il y a l’éthique, mais je ne vous apprends rien, cela fait aussi partie de votre métier commissaire ! Répondit-il d’un air entendu, en lui adressant un imperceptible clin d’œil.

Le commissaire comprit l’allusion et décida de clore l’entretien prétextant un travail qui l’attendait. Il avait jugé que tout ce qui devait être dit, l’avait été. Ils se serrèrent la main. Le commissaire ne revit jamais Lise Dessous. Par contre, il prit rendez-vous avec le psychiatre quinze jours plus tard, pour le début d’un long traitement qu’il dut entamer afin de soigner ses crises de misogynie galopantes.

28 décembre 2013

Le Père Noël ( épisode 3 )

3. le commissaire

Le 22 décembre, le commissaire avait passé une journée de chien à essayer de négocier avec son ex-femme le problème des fêtes : allait-il enfin pouvoir garder les enfants ? A l’époque, il aurait mieux fait de se rabattre sur les chats ou les hamsters, mais comment aurait-il pu prévoir le drame ? Il se garda bien de faire part du cours de ses pensées à  son adjoint ; celui-ci avait l’incroyable don de retourner chacun de ses propos contre lui. Un fieffé imbécile cet adjoint qu’on lui avait collé dans l’urgence ; le précédent étant mort d’une étrange façon, dans le lit d’une prostituée.

Le parcours d’obstacles des fêtes s’était soldé par un échec. Il n' aurait ses enfants ni pour Noël, ni pour le jour de l’an. « Décision de justice » avait répondu son ex-femme à chacun de ses arguments. « Une vraie salope ! » avait-il conclu. Peut-être même le lui avait-il dit.

Le 24 décembre, le commissaire avait choisi d’être de service plutôt que de rester chez lui à se morfondre, il se résigna à attendre gentiment les appels de détresse  qu’on lui lancerait. Si Dieu était avec lui, sa soirée serait tranquille. Quand le téléphone sonna à minuit un quart, il décrocha au bout de la cinquième sonnerie : Commissariat du cinquième, dit-il d’un ton ferme.

–        Allô ? Je crois que j’ai tué le Père Noël, aidez-moi….AIDEZ-MOI JE VOUS EN PRIE !

Le premier moment de surprise passée, le commissaire répondit.

–        Calmez-vous et dites-moi où vous êtes !

En route vers l’adresse que la voix lui avait donnée, le commissaire se dit qu'il s'agissait certainement d' une hystérique. Tuer le père Noël ! Et pourquoi pas Dieu pendant qu’elle y était ! La femme lui avait donné les informations au compte goutte ; ses sanglots et ses hoquets l’avaient obligé à lui faire répéter plusieurs fois le nom de la rue.

En cette aube du 25 décembre, il n’y avait curieusement aucun embouteillage dans Paris. Une circulation fluide qui ne reflétait en rien la confusion des pensées qui lui martelaient le cerveau. Il trouva l’immeuble sans difficulté et, alors qu’il sonnait, il se promit d’accepter le pire sans impatience ni railleries. Une voix blanche lui répondit à l’interphone et lui indiqua l’étage. Il n’eut pas besoin d’attendre à la porte car elle était déjà ouverte. Le spectacle offert à ses yeux le laissa bouche bée : le père Noël était allongé dans sa tenue rouge, du sang avait maculé le carrelage blanc et une jeune femme habillée en noir se tenait debout près de lui ; ses mains écarlates pendaient  le long du corps. Il chercha à prendre le pouls du père Noël mais inutile,  il était bien mort.

La jeune femme le regarda hagarde et s’écria.

–        Je vous jure que c’est de sa faute. Il l’a cherché….  sanglotait-elle.

Il ne put rien lui tirer de plus. Il regarda un instant autour de lui et fut surpris de l’absence totale de meubles. Un de ses collègues arriva pour récolter les indices existants, suivi à quelques minutes près de deux ambulanciers qui emportèrent le corps du père Noël à la morgue. Dans un geste d’humanité qu’il regretta ensuite, il  mit un manteau sur les épaules  de la jeune femme et l’invita à le suivre.

Pendant toute la durée du voyage elle resta silencieuse. Ce n’est que tard, dans la soirée du 25, après avoir dormi plus de 12 heures sur un lit de fortune, qu’elle accepta de parler.

–        Je vais  tout vous dire.

–        Voilà qui est mieux, ajouta-t-il soulagé en s’essayant à un vague sourire.

–        Il s’est invité chez moi et je l’ai tué parce qu’il voulait me tuer !     

Le commissaire resta silencieux, elle aussi. Au bout d’un moment, il se sentit obligé de l’encourager.

–        C’est un peu juste comme explication.

–        Vous pensez peut-être que je l’ai poussé à vouloir me violer ?

–        Nous y voilà donc, il voulait vous violer.

–        Exactement !

–        Expliquez-moi quand même ce qu’il faisait chez vous, ce père Noël ? il n’est quand même pas arrivé par la cheminée ?

–        Je l’avais invité pour oublier que j’étais seule.

–        Et c’est pour ça que vous vous étiez habillée en robe longue ?

–        Vous y voyez un inconvénient ? Répondit-elle sur la défensive.

–        Je trouve ça un peu… surprenant, finit-il par dire.

–        Vous ne vous êtes jamais senti seul ? Dit-elle en guise de contrattaque.

–        Ici c’est moi qui pose les questions, lui intima-t-il.

–        Je ne sais pas pourquoi, monsieur le commissaire, mais j’ai l’impression que vous n’aimez pas beaucoup les femmes.

Elle le surprit. Encore une qui essayait de lire dans ses pensées.

–        Méfiez-vous de votre intuition féminine, répondit-il furieux, et n’essayez pas de me détourner de l’essentiel, parce que votre histoire est loin d’être nette, vous pouvez me croire ! Vous invitez chez vous un père Noël inconnu, vous êtes en tenue de soirée, décolletée qui plus est, et pour finir vous le tuez en me disant qu’il a voulu vous violer. Quelles preuves j’ai, moi, de tout ça ? Dites-moi !

–        Ma parole.

–        Et ce couteau suisse avec lequel vous l’avez tué, d’où sort-il ?

–        Un cadeau que j’ai fait au père Noël.

–        Et qu’est-ce que vous étiez en train de faire au moment où il a voulu vous violer ?

–        Nous dansions.

–        Vous dansiez ? Avouez que c’est pour le moins équivoque et…

Le commissaire n’eut pas le temps de terminer sa phrase ; elle se rua sur lui, le griffa au visage et laissa deux traces profondes dans sa chair. Abasourdi, il n’eut que le temps  de bafouiller un lamentable « Vous êtes cinglée ! » qu’il répéta plusieurs fois d’affilé, alors que son adjoint essayait de maîtriser la présumée coupable à l’aide de deux policiers alertés par les cris. Il la fit interner en hôpital psychiatrique et cette mesure eut pour effet de le soulager immédiatement. Son adjoint l'entendit maugréer : « Ces emmerdeuses pensent qu’elles vont faire la loi, mais elles se trompent ! ».

 PS : suite et fin le 30 décembre.

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