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Presquevoix...

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1 avril 2014

La statue

Elle lui avait souri. C’était la première fois depuis bien longtemps qu’une femme lui souriait. Certes, elle était de pierre, mais il s’en contentait. Que de légèreté et de grâce dans son attitude. Il s'assit non loin d'elle et la regarda presque avec passion. Avant de s'endormir - ces deux derniers mois passés à l’hôpital l’avaient épuisé - il sentit sur sa joue ensoleillée le frais baiser de la statue de pierre ; jamais plus il ne se réveilla.

30 mars 2014

La question

Ils étaient assis l’un en face de l’autre dans un café bruyant du centre-ville. Elle lui parlait de choses et d’autres, mais elle voyait bien qu’il écoutait peu. Elle finit par lui demander.

- A quoi tu penses ?

- A la même chose que toi.

Elle rougit instantanément.

Ils se quittèrent sans déroger aux habitudes – une bise chaste sur chaque joue -  mais dorénavant,  l’un comme l’autre savaient…

 

28 mars 2014

Le pullover

Hier, une élève a remarqué – et elle en a fait profiter toute la classe -  que la couleur de mon pullover était assortie à couleur de la poubelle que je brandissais afin qu’une « mastiqueuse » y dépose son chewing-gum.

Je crois que je suis la seule à n’avoir pas participé à la liesse générale…

26 mars 2014

L’ombre

J’ai dû lui dire qu’elle me faisait de l’ombre. Il n’a pas eu l’air de comprendre. Je le lui ai répété et il a répondu.

-          Mais je ne peux tout de même  pas l’arracher !

-          Et pourquoi pas ? Elle est si importante que ça pour toi ?

Il s’est résigné.

-          Très bien, tu l’auras voulu.

Et il a passé son dimanche après-midi à arracher la vigne vierge.

Quinze jours plus tard, en faisant mes courses en ville, je l’ai vu à la terrasse d’un café avec une femme. Je les ai observés : il était légèrement penché vers elle et devait lui chuchoter des choses très drôles puisqu’elle riait.

Maintenant, je m’en veux de lui avoir demandé d’arracher sa vigne vierge…

24 mars 2014

Le chat

Elle l’avait fait entrer un sourire aux lèvres et lui avait dit de s’asseoir. Le jeune homme avait rapidement regardé autour de lui et avait choisi le fauteuil fleuri, à droite de la cheminée. Une fois assis, il avait remarqué que le visage de la jeune femme avait perdu sa bienveillance première ; elle ne souriait plus et semblait hypnotisée par un gros chat roux qui menaçait de sauter sur le fauteuil qu'il occupait. Elle lui signala d'une voix impatiente.  
-    Vous vous êtes assis sur le fauteuil de Robert et il n’aime pas ça !  
Le jeune homme jaugea le mâle roux  et  comprit  qu’il était de trop.

22 mars 2014

La panne

 

- Ça vous déçoit ?

Allongée sur le lit à moitié défait d’une chambre d’hôtel tristement banale, elle restait silencieuse alors qu’il attendait une réponse de sa part. Pourquoi  persistait-il à la vouvoyer ? Elle en ressentait une certaine  irritation. Sans doute souhaitait-il être rassuré, s’entendre dire que ce n’était pas grave, que tout vient à point à qui sait attendre, que demain serait un nouveau jour, qu’il n’y avait quand même pas que « ça » dans la vie… mais elle n’y arriva pas et articula  :  Je ne suis pas Mère Teresa !

 

20 mars 2014

8 mars

Samedi 8 mars, quand  j’ai dit à mon fils que c’était la journée de la femme, il m’a dit : Bonne journée maman ! Et il est parti.

18 mars 2014

Survie

La sanction était tombée, on l’avait isolé dans un placard : un bureau, une chaise, un vieux clou d'ordinateur et pas de fenêtre. L'humanité n'avait jamais été ce qui les étouffait au ministère. Qu’ils aillent se faire voir !

Après avoir fouiné à tous les étages, il avait fini par se trouver une salle de sieste dans les archives. Toutes les conditions étaient réunies pour qu’il y soit au calme ; le passé n’intéressait plus personne, seul le futur avait de l’avenir.

Tous les jours, de deux à quatre, il dépliait son tapis de sol entre des dossiers poussiéreux et s’endormait comme un bienheureux. Ce temps volé valait tous les postes du monde…

16 mars 2014

Je me souviens…

Je me souviens de mes non-cours de piano. J’avais 9 ans et, le jeudi matin – jour des enfants – j’allais  chez mon professeur qui habitait une grande maison au fond d’un parc. Au milieu du parc,  un cèdre singulier étendait ses branches  jusqu’au deuxième étage de la maison. Je rêvais d’y élire domicile.

J’aimais pianoter, mais j’aurais voulu pouvoir  progresser sans travailler. Mon professeur - une dame sympathique et dotée d’un certain humour  - sans doute lassée de me répéter les mêmes choses, finit par se plier aux règles que ma « paresse » lui avait dictées : elle jouait et je l’écoutais…

 

 

14 mars 2014

Les vacances

Il faut que j’arrête, se dit-il. Il chercha résolument un sparadrap dans son sac à dos, il n’y en avait pas. Ses doigts exposaient leur souffrance au premier venu. S’il ne trouvait pas de sparadrap,  son index serait bientôt un charnier. Il pensa à sa femme, partie depuis un an, à ses enfants qui ne venaient jamais le voir, à sa mère, morte deux ans plus tôt, à son frère qui ne voulait plus entendre parler de lui…
Il fallait qu’il arrête de se ronger les ongles sur le champ, question de survie. Maintenant qu’il était en vacances, il devait en profiter. Son regard se posa à nouveau sur ses doigts et il arracha une peau qui dépassait. La dernière de l’après-midi, se dit-il.
Il ferma son sac à dos, le remit à l’épaule et marcha lentement vers la grande bâtisse  où il résidait. Près des escaliers, il dit bonjour à deux femmes en blouse blanche qui discutaient. Elles lui répondirent aimablement. A 16 heures, ce serait le thé, à 19 heures, on servirait le repas du soir et à 21 heures il serait au lit. Finalement, il avait eu raison de choisir cet hôtel en lisière de  forêt. Il ne pouvait pas sortir comme il l’aurait souhaité mais au moins, il y était bien, loin des rumeurs du monde.

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