Quand elle lui a demandé ce qu’il en pensait, il n’a rien dit, comme d’habitude. Elle a insisté, mais il n’a en rien rompu son silence, une longue habitude le condamnait à observer plutôt qu’à parler.
- Très bien, a-t-elle conclu, je le mettrai pour aller chez Muriel.
Léa a eu un franc succès en arrivant chez son amie. Jean Louis l’a accueillie d’un œil concupiscent en lui disant qu’elle n’avait pas grossi d’un poil. Michel, le mari de Martine, lui a fait des compliments sur le choix de la matière en osant un geste pour toucher le produit. Quant à Éric – qui venait de se séparer d’Odile – il lui a dit que maintenant qu’il était libre… et il a laissé la phrase en suspens.
Les femmes ont été moins enthousiastes, il faut dire que ces messieurs ne tarissaient pas d’éloge, ce qui en devenait gênant. Muriel a fini par dire.
- Et toi Jean Marc, comment tu trouves ta femme ?
Un silence a suivi la question mais Muriel s’est enhardie.
- Alors, qu’en dis-tu ?
- J’aurais préféré ne pas commenter, mais puisque tu insistes, je trouve que ça fait un peu pute.
- Un peu pute ? a repris Léa, furieuse.
- Oui, un peu pute !
A ce moment-là, Léa s’est adressée à Éric.
- Qu’est-ce que tu dirais de passer la soirée avec une pute ?
Éric ne se l’est pas fait redire deux fois et ils sont partis ensemble. Le groupe est resté abasourdi.
- Ça alors ! a fini par dire Muriel.
- C’est dingue, a renchéri Martine.
Et Jean Marc a conclu.
- Vous ne saviez pas encore qu’ils couchaient ensemble ?
L’Assemblée, médusée, n’a rien répondu mais Jean Marc a ajouté.
- Que cela ne nous empêche pas de prendre l’apéritif à la santé des putes… et de leurs clients !
PS : photo prise dans le cadre de l'exposition " Art et déchirure"