Duo de mai avec Caro du blog "les heures de coton". Comme point de départ, cette photo gentiment prêtée par Espiguette.
Aujourd’hui je vous propose mon texte. Mardi, vous pourrez lire celui de Caro.
La fuite
Elle n’arrête pas de lui dire de regarder dans le rétro pour voir si la police n’est pas à leurs trousses, mais il ne semble pas l’écouter.
Il a tué une femme et elle est complice. Voilà pourquoi ils fuient.
Tout a commencé il y a deux ans. Elle l’a rencontré à la terrasse d’un café. Une belle gueule, de celles dont on se souvient.
- Je peux m’asseoir ? lui a-t-il dit
- Pourquoi pas ? a-t-elle répondu.
Elle ne repoussait jamais ceux qui l’abordaient, sans doute parce qu’elle ne s’aimait pas. Et puis elle a été flattée qu’un type si beau s’adresse à elle.
Une fois à sa table, il n’a pas arrêté de parler, zigzagant entre les compliments les plus éhontés et les drames de sa vie. A l’époque, elle aimait soigner les bleus à l’âme.
Il la rappelle brusquement à la réalité.
- Putain, tu conduis comme une merde ! T’as failli te taper le trottoir.
Elle se retient de lui dire de prendre le volant. Deux ans qu'elle se tait et qu'elle se mord la langue. Pourtant, à la terrasse de ce café, deux ans plus tôt, il lui avait joué le grand jeu de la Rencontre. Se faire prendre à un piège aussi grossier. Etait-elle sotte !
- J’en ai ras le cul, maugrée-t-il. Ras le cul des connasses qui pètent de trouille !
Pourquoi lui parle-t-il sur ce ton ?
- Vas-y, dis quelque chose, s’agace-t-il.
Elle continue à se taire.
- Cette fille, si je l’ai tuée, c’est qu’elle voulait ma peau : c’était moi ou elle !
- Peut-être, mais moi, elle ne m’avait rien fait.
- Bon, on arrive. Ma mère, c’est la cinquième maison à droite. Tu te gares dans la cour et tu m’attends. J’en ai pas pour longtemps. Un truc à régler avec elle.
Elle arrête le moteur et il sort. Il ne lui demande pas d’entrer chez sa mère. D’ailleurs elle n’en a pas envie, elle ne l'aime pas.
Dès qu’elle le voit disparaître, elle met le contact et démarre. Elle ne sait pas pourquoi, un instinct de survie, et elle roule sur la nationale jusqu’à ce que le soleil disparaisse à l’horizon. A la prochaine ville, elle larguera la voiture et elle prendra le premier train pour Paris. Ensuite, direction l’Espagne, pourquoi pas Séville ou Grenade ? Elle a toujours rêvé de l’Alhambra…