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13 mars 2010

Le directeur de cabinets

Il est Directeur de cabinets en sous-sol, place de la Calende. Oh, de tous petits cabinets – il y en a peut-être quatre - et souvent, il remonte à la surface pour prendre l’air. Je le sais car je l’observe de la fenêtre du salon de Thé où je déjeune le lundi. Il faut dire que les odeurs de désodorisants et de désinfectants doivent prendre à la gorge : on ne se débarrasse pas comme ça du Canard WC !
Parfois, je me demande à quoi ça ressemble une vie de Directeur de cabinets…

12 mars 2010

Le peintre

Plus il regardait son tableau, plus il le trouvait laid. Ces sapins rachitiques et cette neige trop blanche lui devenaient odieux. Peut-être que si la forêt avait été plus touffue, les troncs plus gros et les feuillages moins verts... peut-être que si la neige avait été moins blanche…  Mais ne l’avait-il pas déjà touché et retouché mille fois ? L’épaisse couche de peinture était là pour en témoigner. Non, ce tableau le déprimait, il ne pourrait plus rien en tirer ; il ne voulait plus le voir. Après le repas, il le descendrait à la cave, comme les autres.
Et si désormais il peignait dans le noir ? N’était-ce pas son regard qui l’empêchait de peindre ?

5 mars 2010

Le CAC, mais pas quarante

Samedi, pour la première fois depuis dix ans, il avait fait les courses avec elle. Ils avaient parcouru les rayons d’intermarché ensemble, mis les produits dans le caddy ensemble, commenté les achats éventuels ensemble : le bonheur.
A la caisse, il avait tout rangé dans les sacs bleus à une vitesse qu’elle avait jugée raisonnable. Lorsqu’elle eut payé, elle lui déclara :
- Tu es reçu !
Il s’étonna :
- Je suis reçu ? Mais à quoi ?
- Ben tu as ton diplôme du CAC : « Certificat d’Aptitude aux Courses ». Tu ne te croyais pas capable de faire les courses, maintenant je te déclare que tu es reçu avec 20 sur 20 dans toutes les disciplines : recherche des produits, choix des produits selon leur coût et leur qualité, rangement des produits.
Ce qu’il ne savait pas encore, c’est que les dix années suivantes, il serait préposé aux courses, comme elle l’avait été les dix années précédentes.

26 février 2010

La liste

Avant qu’elle ne parte chez sa mère, il lui avait dit :
- Je peux te faire une liste de tout ce qu’elle va dire. D’ailleurs, tiens, je te  fais la liste et tu cocheras au fur et à mesure.
Elle n’avait pas pris la liste, mais quand elle l’avait consultée au retour, elle avait constaté que tout y était rigoureusement passé, du début jusqu’à la fin.

23 février 2010

Chronique du lycée

Hier, retour à la case départ, celle du travail. Remarquant que mes 10 élèves de seconde n’avaient que de très, très vagues souvenirs de tout ce qui pouvait avoir trait au portugais – pourtant ils pratiquent cette langue depuis quatre ans ! Je leur ai demandé imprudemment :
- Mais, vous avez ouvert votre cahier de portugais pendant les vacances ?
L’un d’entre eux m'a répondu :
- Moi je l’ai ouvert, madame, mais c’était pour prendre une feuille !
Rideau.

13 février 2010

L’ourlet

Hier j’ai accompagné mon mari dans une boutique de vêtements ; il voulait s’acheter deux pantalons et mon avis précieux lui était indispensable. Une fois dans la cabine d’essayage, il m’a dit de monter la garde. Le texte  sur la « cabine d’essayage » que je lui ai fait lire la semaine dernière a dû déclencher chez lui une mini-phobie. Pour lui faire plaisir j’ai  aboyé et je suis restée près du rideau consciencieusement tiré.
Comme le pantalon convenait,  la vendeuse a été appelée pour l’ourlet. Elle a demandé à mon mari de s’installer devant la glace et, à genoux devant lui, elle a commencé l’opération épingles. A un moment, elle  a posé cette question, pour le moins ambiguë :
- Il est bien monté ?
Mon mari l’a regardée l’air interrogateur, pendant que je pouffais dans mon coin.
J’espère qu’ « il » était bien monté sinon il en sera quitte pour revenir faire l’essayage.

12 février 2010

Perdre le fil

Je sors Titus deux fois par jour, je dis deux mots à la boulangère une fois la semaine et je regarde la télé en boucle, voilà ma vie. Je me demande quand même si je perds pas le fil. Le jour où Robert est parti j'ai crié « Bon vent », de toute la force de mes poumons, depuis le temps qu’il empoisonnait ma vie, Robert ! Au moment où il descendait les escaliers avec sa valise à la main, la voisine est sortie mais elle a vite refermé sa porte quand je lui ai gueulé que c'était pas ses oignons. Maintenant on  se parle plus, une bonne chose de réglée.
Avant hier un type a frappé à ma porte :
- Les services sociaux, a-t-il dit.
J’ai regardé à l'œilleton mais j’ai pas ouvert. D'ici à ce que la Régie veuille m'expulser parce que je suis en retard pour le loyer. Quand le type est parti, j'ai mis le buffet devant la porte. Maintenant, j'attends. Si je dois  partir, ce sera les pieds devant.

6 février 2010

Le premier baiser

P8150008_lightIl  lui avait dit « Tu te souviens ? » et elle lui avait répondu sèchement :
- Non !
Il n’avait pas insisté. En s’éloignant, il avait fait valser quelques feuilles qui jonchaient déjà l’allée centrale et   elle était restée seule devant les grilles, les yeux perdus. Oui elle se souvenait du château et du premier baiser, oui elle se souvenait de tout mais elle le lui refuserait aussi longtemps qu’elle vivrait ; elle se l’était promis.
Le jour où elle l’avait vu faire l’amour avec l’autre, oubliant le serment  qu’il lui avait fait devant ces mêmes grilles, elle avait voulu mourir, l’avait-il oublié ?
Depuis, elle grattait la rouille qui lui rongeait  le cœur…

PS : texte écrit à partir de cette photo de C. V.

4 février 2010

Se donner de la peine

Pour réussir dans le bien il faut se donner de la peine.* Et il s’en donnait. Personne ne lui avait encore dit combien il avait changé, combien il se montrait attentionné, combien il était maintenant d’humeur égale. Qu’on ne  remarquât aucun changement lui laissait un goût amer ! Il  en voulait à tous ceux qui avaient su voir ses défauts mais ne notaient guère ses progrès. Ils le regretteraient...
Un jour il a disparu, et du jour où il a disparu, on l’a aimé.

PS : phrase lue dans le pressentiment, d’Emmanuel Bove

3 février 2010

Maigrir

« Moi,  pour que je maigrisse » - lui avait dit son amie Annick un mois plus tôt en guise de confidence - « il y aurait qu’un truc qui marcherait : il faudrait que mon mari me plaque ! »
Elle comprenait  pourquoi elle était toujours aussi grosse ! Non seulement son mari ne l’avait toujours pas plaquée mais, circonstance aggravante,  il faisait une dépression. Il avait bien choisi le moment, les hommes choisissent toujours le bon moment…
Son mari la tuerait, c’était sûr.

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