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Presquevoix...
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12 mars 2011

Le bébé

Pour sa chambre, ils avaient choisi un papier rose, un petit lit blanc, une armoire blanche et des peluches roses et blanches… ils avaient aussi choisi son sexe et la couleur de ses yeux. Ils savaient aussi qu’il n’aurait aucune maladie génétiquement transmissible.
Maintenant ils étaient prêts à accueillir le bébé, pour le meilleur…

 

7 mars 2011

Le rendez-vous

Q101_0134Voilà une heure qu’il observait sa femme. Que faisait-elle dans ce restaurant avec ce bellâtre de gondolier ?  A les voir rire tous les deux, on aurait presque dit qu’ils se connaissaient depuis des siècles. Quand il pensait qu’avec lui elle n’esquissait que des sourires de convenance. Pourtant, n’avait-il pas de l’esprit ? N’était-ce pas ce que tout le monde disait ?  De quoi pouvaient-ils donc  parler ? Elle ne connaissait rien à l’italien et le gondolier n’était sûrement pas un amoureux de la langue française. Il devait avouer qu’elle n’avait pas pris le plus moche, c’est tout au moins ce qu’il lui semblait de loin.

 Et si c’était un gigolo ? Quand il se rendit compte qu’il allait contribuer à leur folle journée avec leur compte commun il ne se contint plus. Il sortit de sa cachette, traversa le canal, entra comme un fou dans le restaurant et il se planta devant leur table tel un torero prêt à planter ses banderilles.

 

- Maintenant ça suffit ! tonna-t-il.
Elle le regarda surprise.
- Mais Michel, qu’est-ce que tu fais là ?
- Et toi ? Hurla-t-il, et avec un jeune con en plus !
Elle fit un signe au gondolier qui se leva immédiatement.
- Ah non, tu ne vas pas le faire sortir ce gigolo, ce serait trop facile !
La salle de restaurant n’avait d’yeux que pour eux. Elle finit par dire, le visage empourpré.
- Mais tu ne reconnais pas Tomaso, mon filleul ? Le fils de Catherine et  Luigi. Tomaso a trouvé un job de gondolier pendant l’été.

Terrassé, il s’assit sur la première chaise venue et se servit un verre de vin. Au quatrième verre il buvait à la santé de Tomaso et au cinquième, sa femme et son filleul le prenaient par la taille pour le faire sortir du restaurant...

PS : Texte écrit à partir de cette photo prise par C.V.  à Venise en 2007

 

4 mars 2011

Le tableau

5 ans que ce tableau lui avait été promis pour service rendu,  mais son amie ne s'était toujours pas donnée la peine de le lui apporter. Chaque année elle se rappelait à son bon souvenir.
- Passe quand tu veux et  choisis un tableau, répondait invariablement  son amie.
Elle  lui précisait alors qu'elle avait déjà choisi ce tableau cinq ans plus tôt et que c'était à elle de le lui apporter. Son amie concluait toujours de la même façon.
- Bien sûr, bien sûr,  alors passe pour en choisir un deuxième, ce sera un dédommagement.
Et puis la vie reprenait son cours, comme si de rien n'était. Elle ne passait pas chez son amie, celle-ci ne lui apportait pas le tableau, et la place qui lui était réservée sur le mur de sa chambre restait toujours inoccupée. Leur  relation  n'existait que par le leitmotiv de ce tableau virtuel. Elle se demandait parfois si son amie ne l'avait pas vendu ? Peut-être était-ce même le seul tableau qu'elle avait vendu ?
D'ailleurs, et c'était sans doute le plus cocasse, elle ne se souvenait même plus du tableau qu'elle avait choisi chez son amie cinq ans plus tôt...

3 mars 2011

Comment faire disparaître un homme ?

Chaque jour elle déposait un mot – ou deux -  dans sa poubelle ; les mots des lettres qu’il lui avait envoyées et qu’elle dépiautait consciencieusement. En désossant ses phrases, elle désossait son souvenir. Comme il ne lui avait écrit que 4  courtes lettres, elle en aurait  assez vite fini avec lui. Le précédent, par contre, il lui avait fallu  douze longs mois pour le faire mourir, c’était un amoureux des mots. Il l’avait aimée un mois, à raison d’une lettre tous les deux  jours, et pas n’importe quelles lettres, des lettres longues et romantiques qu’elle avait  eu le tort de  croire. Quant à l’avant avant dernier - un rustre - la seule missive qu’il lui avait écrite, c’était ces trois  phrases griffonnées à la hâte sur une enveloppe : « Marre de ta névrose. Je pars. Tout est fini entre nous. ». Elle l’avait achevé en une semaine.

1 mars 2011

Le coq

Hier matin, j’ai entendu le cri d’un coq. Un coq ? Ici ? En centre ville ? Incroyable ! Mais comment il est arrivé ce coq ? J’ai demandé à mon mari s’il l’entendait, mais peine perdue ! Mon mari dit qu’il devient sourd. Alors, j’ai ouvert la fenêtre en grand et je lui ai dit.
-  Et maintenant, tu l’entends, le coq ? Et il l’a entendu.
- Tu crois que c’est un vrai ? lui ai-je fait
- Pourquoi voudrais-tu que ce soit un faux ?
Je n’ai pas aimé le ton léger avec lequel il a dit cette dernière phrase. Comme si ce coq n’avait aucune importance !
Son cocorico a, hélas, la régularité d’un métronome. Il semblerait tout de même qu’il s’arrête à 8 heures…
C’est quoi, l’espérance de vie d’un coq ?

28 février 2011

A la recherche de l’ombre perdue

cygneElle ne photographiait que ce qui la troublait, pour le plaisir de s’adonner ensuite à l’obsession de l’analyse. Postée devant l’écran de son ordinateur, elle contempla longuement les cygnes noirs. Pourquoi son ombre l’avait-elle abandonnée ? Elle se dit qu'elle pourrait peut-être passer une annonce dans Le journal local : 
« Cherche ombre disparue prématurément. Qui pourra me donner de ses nouvelles ?  ombreperdue@hotmail.fr  "

Deux jours plus tard l’annonce paraissait et elle recevait dix mails. Seul l’un d’entre eux retint son attention. Il disait :
 « Je suis l’ombre, êtes-vous le jour ? Pour notre analyse, louons un divan afin de nous y retrouver une fois par semaine ou plus, si affinités. Ombre-ment vôtre »
Après deux échanges de mails, une rencontre fut prévue à 16 heures, le 28 février, au Vieux Carré. L’ombre avait précisé qu’elle serait en noir.

PS : texte écrit à partir de cette photo gentiment prêtée par Alienor du blog "éclat de mots"

 

25 février 2011

La coiffure

La coiffeuse lui avait fait une coupe trop courte et, en plus, ses cheveux avaient gonflé sur le dessus. Quand il revint chez lui, il tenta à toute force de les aplatir avec un gel qui traînait dans le tiroir du meuble de la salle de bain.
- Mais qu’est-ce que tu fais ? Lui dit sa mère.
- Tu vois pas ? Tu veux quand même pas que j’aie une tête d’intello ?
Injure suprême ! Elle hocha la tête résignée et évita de lui demander s’il valait mieux avoir une tête de « con »…

24 février 2011

L’ordre croissant

Le professeur de Mathématiques arrivait toujours en cours revêtu de sa blouse blanche immaculée, le cartable dans une main, le pardessus dans l’autre. Pour les copies, le rituel était toujours le même, il les rendait par ordre croissant : un tic ou peut-être bien un toc. A chaque  remise de devoir, le cœur de Lucas s’affolait, sa nullité dans cette matière y était pour beaucoup. Cette fois-ci le professeur commença à 2, puis 4, 5, 7, 8, 9, 10...  il arriva à  16 et sa copie n’avait toujours pas été rendue. Se pouvait-il que cette fois… ? A la copie suivante, le visage du professeur accusa une légère crispation et il dit.
- Bon, l’erreur est humaine, j’ai ici un 3 qui s’est égaré. Lucas Bourré, c’est votre copie, désolé, mais bon, vous ne croyiez tout de même pas que vous aviez 17 ?
Lucas fit la grimace et rangea immédiatement la copie dans son sac, sans la regarder. L’ordre croissant faisait toujours des victimes, le problème c’est qu’elles n’étaient jamais indemnisées…

22 février 2011

Le papillon

papillonQuand elle vit le papillon posé sur la barrière en bois, elle lui dit :
- Regarde comme il est fragile !
Il ne put s’empêcher de répondre.
- C’est con un papillon, à part voler et se poser qu’est-ce que ça fait ?
Elle aurait voulu lui dire que c’était lui qui était con, mais elle ne pouvait pas. Six mois plus tôt, elle avait annoncé à toutes ses amies qu’elle avait trouvé le prince charmant... Seulement maintenant,  elle avait de plus en plus de mal à y croire.

PS : texte écrit à partir de cette photo de Patrick Cassagnes

21 février 2011

L’enfant

9 heures, les portes du métro s’ouvrent. Je suis en retard de dix minutes sur l’horaire habituel. J’avise un siège libre et je m’assieds. On est mercredi, le jour des enfants, il y en a justement un en face de moi, le genre de gamin qui ne donne pas envie d’en avoir. Sept ans, un avis sur tout, même quand on ne lui demande rien. Soudain il me vise avec son pistolet en plastique et me fait une grimace. Je lui tire la langue, je ne sais pas pourquoi, ou plutôt si, je voudrais lui donner une claque mais je ne peux pas. La mère le sermonne :
- Arrête de faire ça, ce n’est pas poli.
Et le monstre aux cheveux châtains de répondre :
- Il faut que je tue toutes les moches, c’est Dark Vador qui me l’a demandé !

PS : texte inspiré par une brève, très brève, lue sur le site « une vie de merde »

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