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15 avril 2011

Apnée

Je suis né dans un aquarium. Ma mère a toujours eu de drôles d’idées, même avant ma naissance. Quand j’ai ouvert les yeux, je me suis trouvé nez à nez avec un gros poisson triste qui tournait en rond dans une eau trouble. De sa voix sans voix il m’a chuchoté.
- Tu vois, c’est ça la vie ! Et puis il a disparu.
Il m’a fait si peur que j’ai voulu retourner dans le ventre de ma mère, mais il était trop tard. Elle avait fermé sa porte à clef, sans état d’âme.
Aujourd’hui, j’attends qu’on m’ouvre l’autre porte…

14 avril 2011

Le journal

Il était accoudé au comptoir du café de la Mairie, un verre de rouge à la main et le verbe haut quand son collègue de boisson lui dit.
- Tiens, tu veux Paris Normandie, Maurice ?
- Paris Normandie ? J’ai jamais lu un journal de ma vie, je vais pas commencer aujourd’hui.

Il ne répondit rien. Maurice était vraiment trop con. Sa femme avait raison, s’il continuait à fréquenter le café de la Mairie, il tournerait mal. Il valait mieux qu’il mute au café de la Gare, plus cosmopolite.

13 avril 2011

Le pantalon

Retenir sa respiration, il fallait à tout prix qu’il la retienne pour pouvoir  rentrer dans son pantalon en coton blanc. Il enfila la première jambe, la deuxième, le remonta progressivement et se mit en apnée au moment de fermer le bouton, mais rien n’aurait pu combler les cinq centimètres qui manquaient !
Il l’enleva anéanti. La vie était cruelle. 
Il préféra n’en rien dire à sa femme ; elle se serait gaussée. Il faut dire qu’une semaine plus tôt, il lui avait fait remarquer qu’elle ne risquait plus de rentrer dans sa robe de mariée... 

9 avril 2011

Préservatifs renforcés

Il était devenu « capotier » sur le tard – peut-être un coup du destin - et il vendait du préservatif comme d’autres vendent de la pizza au mètre. Sa spécialité : le préservatif renforcé.
L’oreillette vissée à l’oreille,  et le coffre rempli de kits de survie, il patrouillait sur les routes lyonnaises en suivant la courbe des passes, de jour comme de nuit. Des lingettes aux sex toys, les dessous de l’amour tarifé n’avaient aucun secret pour lui…

*Brève écrite  à partir de cet article -  le capotier de lyon - vu sur le site de Rue 89. N’oubliez pas de regarder la vidéo !

8 avril 2011

Le dictionnaire d’espagnol

Depuis une semaine, le dictionnaire d’espagnol traînait sur la table du salon ; il n’avait toujours pas commencé à étudier son texte « adapté », de Garcia Marquez, au programme du baccalauréat. Soudain, samedi 2 avril, à 19 heures pile, elle l’a vu se saisir du dictionnaire comme s’il y avait urgence. Agréablement surprise, elle n’a pu s’empêcher de lui demander.
- Tu vas te servir du dictionnaire d’espagnol ?
Sa réponse lui ôta tout espoir.
- Ben oui, j’en ai besoin pour aplatir des feuilles de philo !
Elle sentit que le texte resterait à l’état de jachère et que l’espagnol ne serait jamais, pour lui, qu’une langue obscure parlée par une peuplade « barbare » de la péninsule ibérique qui avait colonisé l’Amérique…


 

7 avril 2011

Prise d’otage

Il avait retenu sa femme en otage pendant plusieurs heures sous la menace d’un fusil de chasse, un différend familial qui visiblement ne pouvait trouver aucune solution hormis dans une prise d’otage. Quel différend, me direz-vous ? Interrogé par les policiers, il avait expliqué qu’il exigeait que chaque soir sa femme, au chômage depuis six mois, lui enlève ses chaussures quand il rentrait du travail. Comme celle-ci manquait à l’appel un soir sur deux, et sans excuse valable, cette situation lui était devenue insupportable.

6 avril 2011

Les yeux

natureElle s’était approchée, intriguée, et avait vu deux yeux qui la fixaient, mais étaient-ce des yeux ou l’effet de l’alcool ingurgité au café.  Des yeux aussi verts ?
Une fois de plus, elle avait craqué et rien ne l’avait arrêtée, pas même son fils qui était venu la chercher et l’avait tirée par la manche pour qu’elle rentre à la maison. Elle savait que si elle rentrait, ce serait comme d’habitude : les cris, la violence, la solitude. Elle se rendit compte que ce qu’elle avait pris pour deux yeux n’étaient que deux petites plantes dont le cœur renflé ressemblait un peu au sien.
Inutile de reprendre le chemin de la maison, il valait mieux qu’elle se perde dans les rues et ne revienne jamais, ils n’avaient plus besoin d’elle. Personne n’avait jamais eu besoin d’elle, pas même elle…

PS : texte écrit à partir de cette photo gentiment prêtée par Patrick Cassagnes

5 avril 2011

Le vélo électrique

Elle s’était achetée un vélo électrique pour se donner l’impression qu’elle faisait du sport. Il faut dire qu’il était plus que temps, elle avait terriblement grossi et ses rotules gémissaient sans retenue.
Le vélo n’était pas son fort. Déjà, pour l’enfourcher, il lui avait fallu l’aide de son mari et d’un copain à lui. L’équilibre était revenu au bout d’un mois d’entraînement intensif. Elle en voulait à ceux qui lui avaient certifié que l'apprentissage du vélo ça ne s'oubliait pas ! Etait-elle une exception ?
La première fois qu’elle l’avait utilisé, seule, elle avait voulu passer par la côte des Deux vallons, une petite côte de rien du tout qu’elle pouvait monter les doigts dans le nez avec un moteur. Hélas, au bas de la côte, la batterie  rendit l’âme et elle dût pousser son vélo, suant sang et eau sous les lamentations redoublées de ses rotules ébranlées. A mi-côte elle s’effondra en pleurant…

1 avril 2011

La carte de fidélité

Quand il allait faire ses courses – c’était sa participation hebdomadaire aux tâches ménagères - il avait droit  à la traditionnelle question de la caissière.
- Vous avez la carte de fidélité du magasin ?
D’habitude il la tendait sans faire de commentaires et la caissière la passait dans la machine, mais ce jour-là, sa femme l’accompagnait et quand la caissière regarda sa femme, il répliqua d’une humeur massacrante.
- C’est pas à ma femme qu’il faut demander ça : la fidélité et elle, ça fait deux !!!
La caissière le regarda gênée, puis accepta la carte qu’il lui tendait.

30 mars 2011

Le voisin

Aujourd'hui, je n’ai pas entendu mon  réveil sonner,  mon voisin si. C’est lui qui m'a réveillée, comme d’habitude, en frappant contre la cloison et en gueulant à deux reprises : « C’est l’heure, merde ! ».
Parfois je me demande ce que je ferais sans lui. J’aurais sans doute déjà été renvoyée du boulot.
Le pire, c’est que je ne sais pas même à quoi il ressemble mon voisin ! Aussi bizarre que cela paraisse, je ne l’ai jamais rencontré. Je me demande pourquoi…

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