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Presquevoix...
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16 février 2012

Les cadeaux

Pour la St Valentin, elle lui avait acheté un peignoir de superman. Quand il avait découvert « la chose », il avait dû lutter pour faire bonne figure.

- Alors, tu aimes ? avait-elle fini par lui dire, étonnée de son silence.

Il ne répondit pas immédiatement. Comme elle s’impatientait,  il fit semblant, comme souvent. Ensuite, il lui offrit son cadeau. Quand elle découvrit « la chose », elle eut du mal à cacher sa déception.

- Alors, tu aimes ? avait-il fini par lui dire, dans un élan d’enthousiasme.

Elle resta silencieuse puis, voyant qu’il attendait une réponse, elle essaya de faire semblant, comme souvent.  Avec un  sourire forcé  elle lui dit.

- Tu m’as aussi pris un forfait pour les cours ?

Il ne répondit rien, mais elle savait que son mutisme cachait le début d’une crise de mauvaise humeur.

 

 

15 février 2012

L’homme au masque blanc

pastelleSes rêves étaient hantés par une tête de cheval prise dans les glaces. S’il n’y avait eu que cette tête, elle n’aurait pas eu peur de s’endormir, mais il y avait aussi l’homme au masque blanc qui l’obligeait à sculpter une crinière que jamais elle n’achevait. Rêve après rêve, armée d’un d’une visseuse et d’un burin, elle imprimait à la glace des formes irréelles, mais jamais la crinière ne se pliait à ses désirs. Au début de chaque rêve, l’inconnu  l’accueillait avec une citation, jamais la même, qu’il articulait d’une voix neutre. Lors du dernier rêve il lui avait dit : Soyez résolu de ne servir plus, et vous serez libre*.

Etait-ce pour cette raison qu’elle l’avait tué ? Le sang avait giclé de mille fontaines et  avait recouvert la glace d’un drapé rouge. Elle avait longuement contemplé l’homme allongé, comme figé par le froid et, au moment où elle avait voulu lui retirer son masque blanc, sa main était restée prisonnière des glaces…

* citation de Etienne de la Boétie (1530 – 1563)

PS : texte écrit à partir de cette photo gentiment prêtée par Pastelle.

14 février 2012

La page 137

Chaque soir, depuis un mois,  il prenait le même livre à  la  page 137 et il s’endormait inévitablement après la lecture du  premier paragraphe. Il aurait pu changer de page ou changer de livre, mais non, il insistait.

Devenait-il fou ? C’est la question que sa femme se posait mais elle n’était pas certaine de la réponse. Son mari, apparemment, était toujours le même, à part une certaine tendance à la méfiance : la veille, il lui avait demandé si ce n’était  pas elle qui avait mis son signet à la page 138…

 

12 février 2012

La fontaine

Quand Gérard, usé par sa journée d’errance, s’était penché au-dessus de la fontaine, il avait juste pensé qu’il aurait préféré un petit filet de vin rouge au lieu de l'eau insipide qui le rendait  triste à mourir.  Quelle ne fut pas sa surprise quand un jet de gros rouge qui « tâche » lui  éclaboussa le visage avant d’atterrir dans son gosier d'éthylique.

Après avoir copieusement requinqué son organisme affaibli, Gérard, le bardas sur l'épaule, zigzagua en direction de l’église de la Madeleine où il exigea d’être baptisé sur le champ. Puisque Dieu l'avait écouté, lui, Gérard, ne lui était-il pas redevable ?

PS : texte écrit après avoir vu cette vidéo-gag particulièrement drôle. 

11 février 2012

Les bruits

Il lui a téléphoné pour lui demander si elle pouvait passer chez lui tout de suite.
-    Tout de suite, mais pour quoi ?
-    A cause des bruits.
Il faut dire que depuis des mois, il se plaignait de ses voisins. Elle arriva presque instantanément, sa maison était au bout de la rue.
Quand il lui a ouvert la porte, son visage était triomphant.
-    Cette fois-ci, avec ton témoignage, ils vont l’avoir dans l’os les connards. Viens dans la salle à manger !
Elle l’a suivi.
-    Ecoute !
Et elle a écouté. De vagues bruits de guitare lui parvenaient, mais rien qu’elle n’aurait pu appeler du tapage.
-    Alors ? Lui a-t-il dit le visage radieux, c’est quand même dingue, hein, le sans-gêne de ce mec !
Elle a acquiescé prudemment et a loué le ciel de ne pas l’avoir comme voisin.

7 février 2012

Les huiles essentielles

Elle venait de voir, chez Nature et Découverte, ce petit coffret magique : les huiles essentielles de la bonne humeur.
Et si elle essayait de diffuser ces huiles en cours, à leur insu ? Sans doute tout se passerait-il mieux ? Peut-être qu’une fois assis, les élèves desserreraient leurs mâchoires et souriraient ? Peut-être  oublieraient-ils toute agressivité ?  Et si les huiles avaient vraiment le pouvoir qu’on leur conférait, peut-être  qu’elle aussi se détendrait…


4 février 2012

Laisse-moi t’aimer…

Juste au moment où elle était passée à côté de lui, il  avait chanté « Laisse-moi t’aimer toute une nuit… ». Ce type ne doutait de rien. Non seulement il chantait faux, mais il était moche et il avait l’air bête. Elle lui a souri et lui a répondu, malicieuse.
-    Quand tu auras musclé  ton cerveau, on pourra peut-être y penser !
Et elle s’est éloignée d’un air digne, perchée sur ses hauts  talons,  laissant le type sans voix.

2 février 2012

La coupe

La semaine dernière, je suis allée chez la coiffeuse.
- Coupez très court, lui ai-je demandé et j’ai fermé les yeux.
Je n’aurais pas dû. Quand je les ai ouverts, j’ai poussé un cri. Le même que celui que mon fils a poussé quand je suis rentrée à la maison.
- C’est trop court ? Lui ai-je demandé.
- C’était mieux plus long, a-t-il nuancé.
Deux minutes plus tard il a ajouté.
- Quand même, on dirait que tu viens de faire une chimiothérapie.
J’ai accusé le coup.
Quand ma fille est rentrée, deux heures plus tard, elle a eu l’air surprise.
-    Alors, lui ai-je dit ?
Elle n’y est pas allée par quatre chemins.
-    On dirait une lesbienne intégriste !
J’ai presque eu envie de retourner chez le coiffeur, mais pour me faire faire quoi ?

30 janvier 2012

Je veux plus tes vœux

voeuxTous les ans, il lui envoyait une carte de vœux le 30 janvier ; non parce qu’il voulait lui faire plaisir, non, juste pour l’empoisonner, une petite vengeance de l’enfance.
Il savait qu’elle serait obligée  de sortir sa règle et son crayon à papier, qu’elle tracerait des traits avec application sur la carte achetée à contrecœur,  et surtout – surtout -  qu’il lui faudrait trouver des mots pour remplir les lignes vides.
D’ailleurs, d’année en année, il remarquait que  les lignes s’étaient réduites. La dernière carte n’avait que quatre misérables lignes :

Merci de tes voeux
Reçois les miens et surtout la santé
Une  bonne année,
Simone. »

26 janvier 2012

Le craquement

Ce matin-là, alors que  mon fils mangeait ses miel pops, avachi sur la table de la cuisine, je n’ai pu m’empêcher de lui dire :
- Tu en as fait tomber un par terre.
Il m’a répondu taciturne qu’il allait le ramasser. Je dois signaler que mon fils ne fait jamais les choses tout de suite, il se laisse toujours un temps pour la réflexion.
15 minutes plus tard, je suis revenue dans la cuisine qu’il avait désertée, pour mettre le linge dans la machine à laver. Soudain, j’ai entendu un craquement suspect qui ressemblait fort au craquement d’un miel pops sous une semelle énervée. J’ai lentement soulevé mon pied droit et  je l’ai vu de mes yeux vus : le miel pops était bel et bien collé à ma semelle. J’ai failli dire « Connard ! », mais non. A quoi cela servirait-il de s’énerver contre un miel pops ?

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