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Presquevoix...
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13 juillet 2012

La publicité

A Carrefour, elle resta longtemps en arrêt devant les téléviseurs, fascinée par les énormes écrans plats. Sur toutes les télés s’affichaient des publicités en cascade avec leurs slogans stéréotypés. Soudain elle dit à son mari.
- Moi aussi je pourrais faire de la pub, non ?
Il eut un regard amusé et  répondit :
- Pour toi, je  vois que deux pubs possibles : la convention-obsèques ou les lessives.
Elle ne répondit rien, mais une fois à la maison elle lui dit.
- Et toi ? Tu sais dans quelle pub je te vois ?
- Non, répondit-il.
- Eh bien aucune, même pas la convention obsèques.
Il voulut lui asséner une remarque mais  se ravisa.
- Tu ne me demandes pas pourquoi ? poursuivit-elle.
- Ça ne m’intéresse pas, décréta-t-il.
Et elle en fut pour ses frais. Jamais il ne voulait connaître ses raisons.

11 juillet 2012

L'or et le noir

Marie lui avait dit de lire ab-so-lu-mentl'or et le noir ”, un livre incontournable. Et elle s'était exécutée. Marie avait un goût très sûr en matière de littérature, mais un goût qui n'était pas forcément le sien.

Un mois plus tard, Marie lui demandait.

- Alors, il t'a plu ?

Elle ne répondit rien. Comment dire à Marie que " l'or et le noir " lui avait paru imbuvable et qu'elle l'avait d'ailleurs fermé à la dixième  page ? Marie enchaîna.

- Je savais bien que ce livre te laisserait sans voix. Si tu ne l'avais pas aimé, ça m'aurait déçue. J'étais certaine qu'il allait te plaire. On a toujours eu les mêmes goûts.

Elle hocha la tête, sans conviction, et s'en voulut presque un peu d’avoir construit leur amitié sur de tels faux semblants...

 

PS : texte écrit dans le cadre des " impromptus littéraires "

 

2 juillet 2012

Le pantalon

C’étaient les soldes et il regardait les pantalons dans cette boutique, plutôt calme, en début de matinée. La vendeuse s’est approchée, souriante.
- Je peux vous aider ?
Il a répondu aimable, malgré sa haine atavique des vendeuses.
- Je cherche un pantalon, plutôt léger.
- Et vous faites quelle taille ?
Troublé par la question, il a fini par répondre.
- Oh, je ne sais pas, ça change tout le temps !
Elle l’a examiné attentivement et a conclu, péremptoire.
- Un petit 56, je pense !
Comment pouvait-elle oser ? Lui qui faisait du 50 six mois plus tôt !

1 juillet 2012

Le chien

banc2C’était là, dans les herbes folles, qu’il avait trouvé le chien mort  il y a 20 ans, et il ne l’avait jamais oublié. Des mouches, comme autant de soldats prêts à l’attaque, voletaient au-dessus de la plaie béante qui avait vidé l’animal de son sang. Alors qu’il contemplait la scène,  stupéfié, une main puissante l’avait saisi, lui avait passé une laisse autour du cou, et l’avait attaché au banc. Un homme dont il avait oublié le visage lui avait ligoté les poignets à l’aide d’une corde rêche. Avant de  partir, il lui avait dit.
-  Maintenant, t’as plus qu’à aboyer, comme ce connard que je viens de tuer ! Peut-être qu’on viendra te chercher. Vas-y,  aboie !  avait-il ricané.


Et il avait aboyé jusqu’à ce que l’homme disparaisse à l’horizon. Aujourd’hui encore  il aboyait ; mais personne ne l’entendait...

PS : texte écrit à partir de cette photo, gentiment prêtée par Patrick Cassagne.

29 juin 2012

La tunique

Hier, je me suis acheté une tunique dans une boutique «  femme forte », juste pour avoir l’air mince. La première taille, c’était le 42 -  pile poil la mienne -  la dernière le 60.
Quand j’en ai parlé à mon mari et que je lui ai dit que psychologiquement, cela m’avait fait un bien fou, il a conclu.
- Méfie-toi, quand on commence comme ça, on sait jamais où ça va s’arrêter.
Pourquoi devrais-je me méfier ? Décidément, je ne comprendrai jamais mon mari…

27 juin 2012

Les emballages

Elle emballait tout dans des sacs en plastiques : les  produits d’entretien, les journaux, les produits de bain, les chaussures, les chaussettes... même sa carte vitale et sa carte d’identité étaient emballées. Elle ne supportait pas qu’un seul objet puisse vivre sa vie sans emballage. Et si elle avait pu s’emballer elle-même, elle l’aurait fait avec plaisir, c’aurait été une bonne chose de réglée.

25 juin 2012

Le slip

Isabelle lui avait dit qu’elle s’était tout de suite aperçue du jour où son mari l’avait trompée.
- Ah bon, mais comment ? avait répondu Sylvie qui se demandait justement si son mari était aussi fidèle qu’il lui jurait l’être.
- C’est tout simple, du jour au lendemain, Bertrand a changé de slips. Il est passé du slip classique taille haute, genre « hissez la grand-voile » au slip de couleur, taille basse, qui le comprimait de partout…
Une fois chez elle, Sylvie fouilla de fond en comble le tiroir où son mari rangeait ses slips. A première vue, rien d'anormal, mais en cherchant bien, elle trouva un slip vert qui ne ressemblait en rien à ce qu’il portait d’habitude…

PS : prochain texte, le mercredi 27 juin à 7 heures sonnantes !

23 juin 2012

Le SDF

Il était sur la place du Capitole, le premier mai, et il attendait les « généreux donateurs ». Il avisa un type à moustache et se dit que celui-là, peut-être… la moustache lui inspirait confiance. Il lui chanta sa ritournelle – cinquante centimes, c’est pas cher et je pourrai manger -  et le moustachu se laissa séduire.
-    Deux euros, tenez, dit-il, en ajoutant tout sourire :  vous rendez la monnaie ?
-    Non, répondit le SDF rigolard, mais tenez, pour le prix, je vous fais la bise.
Ce qui fut fait illico.

22 juin 2012

Le cannibale

Depuis qu’il avait dépecé un homme,  on l’appelait « le cannibale ». Pourtant, lui ne se souvenait de rien. Sa mémoire était  immaculée, comme les draps blancs que sa mère étendait au soleil après les avoir fait bouillir dans la lessiveuse qu’elle installait dans  la petite cour carrée. 
Maintenant, il tournait en rond dans sa cellule de quatre mètres sur quatre et son enfance, longtemps oubliée, commençait à se glisser au travers des barreaux de sa mémoire : la cour carrée, ses odeurs, les vociférations de son père, les coups, les cris de sa mère, et parfois des rivières de sang qu’aucun drap ne pouvait jamais absorber…



15 juin 2012

La féministe

Quand il lui avait adressé la parole au café, elle lui avait dit.


- Moi, je suis féministe*, alors…


Il l’avait regardée en souriant et avait rétorqué.


- Féministe jusqu’où ?
- Jusqu’au bout des ongles.


Il s’était senti obligé de lui dire qu’il détestait les féministes. Elle s’était sentie obligée  de lui répondre qu’elle détestait les hommes qui détestait les féministes. Et il lui avait répondu.


- Ce n’est pas pour autant que tout nous sépare, si ?


Elle lui avait répondu qu’elle n’aimait pas les hommes qui se sentaient obligés de lui rendre hommage, mais que ça ne la gênerait pas de le passer à la question, en tout bien tout au honneur évidemment,  parce que justement, elle écrivait un livre sur « les séducteurs » et il lui semblait bien qu’il entrait dans cette catégorie-là…


Il ne lui refusa pas cet « hommage »…

* Voici un sketch de Noémie De Lattres intitulé «  la féministe »:

 Je vous conseille aussi cet autre sketch, intitulé L’adultère. Je suis sûre que vous ne regretterez pas d’avoir cliqué ;)



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